Question de M. VOILQUIN Albert (Vosges - U.R.E.I.) publiée le 12/03/1992

M. Albert Voilquin attire l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre des affaires étrangères, sur l'annonce faite par Monsieur le Président de la Russie, autorisant les forces aériennes déployées sur le territoire de la Russie, à vendre à l'étranger jusqu'à 1600 avions qu'elles auraient décidé de ne plus utiliser, selon l'agence Interfax. Ces ventes ne sont pas soumises à l'impôt, ne nuisent pas au niveau indispensable des capacités de combat du pays, et doivent d'effectuer par l'intermédiaire du ministre des relations économiques extérieures. N'y a-t-il pas là un danger si ces ventes sont incontrôlées et faites à des Etats capables d'agression d'une part et, d'autre part, n'y a-t-il pas là une sorte de concurrence ressemblant à un " bradage " de matériel militaire ? Et enfin, si ces opérations ont lieu, le bénéfice retiré par l'Etat en cause ne devrait-il pas venir en déduction des intentions d'aide proposées par la Communauté européenne ?

- page 586


Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 04/06/1992

Réponse. - Un décret du Président de la Fédération de Russie autorise les responsables de l'armée russe à exporter jusqu'à 1 600 avions de (1) D'après les informations dont nous disposons, les avions qui pourraient être ainsi exportés sont ceux susceptibles d'être remplacés par les appareils de la nouvelle génération (MIG 29 et SU 27) : il s'agirait d'avions du type MIG 23, MIG 21 et SU 17, pour la plupart situés en dépôt. combat (1). Le Gouvernement partage les interrogations que cette décision a inspirées à l'honorable parlementaire et en particulier sur deux aspects majeurs. 1° Le premier concerne les conséquences déstabilisatrices que pourraient avoir de tels transferts d'armement sophistiqués dans certaines régions. La communauté internationale s'est engagée récemment, dans le cadre des Nations Unies (résolution 46/36 L de décembre 1991), à une plus grande transparence dans le domaine des transferts d'armements. L'exercice conduit parallèlement entre les cinq plus grands exportateurs d'armements, et auquel participe la Fédération de Russie, a débouché sur des règles de retenue dans ce domaine. Cela nous amène à souligner auprès de nos interlocuteurs russes la nécessité de rester cohérents avec les efforts internationaux auxquels ils souscrivent par ailleurs ; 2° Le second aspect est la façon dont cette décision sera conciliée avec les engagements dont la Fédération de Russie a hérité de l'U.R.S.S., en vertu du traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE). Ce traité prévoit (article VIII (1) et (7)) que l'Union soviétique, et aujourd'hui les Etats qui lui succèdent, aura l'obligation de réduire au moins 1 461 avions de combat, soit par destruction soit par " reclassification " contrôlée. Il exclut que cette obligation puisse être revue à la baisse entre la signature du traité et son entrée en vigueur. Nous sommes en train de rechercher auprès de nos interlocuteurs russes des explications sur les trois points suivants : a) Les avions de combat destinés à l'exportation proviennent-ils de la zone couverte par le traité FCE ou du stock des avions retirés à l'est de l'Oural ? Ont-ils été prélevés sur des unités ou sur des dépôts permanents ? b) Si ces avions se trouvaient antérieurement dans la zone FCE et ont été notifiés dans l'échange d'informations fait en application du traité FCE le 17 février 1991, les Russes envisagent-ils d'utiliser les procédures de déclassement prévues par ce traité ? c) Il résulte du traité FCE et des déclarations chiffrées faites par l'Union soviétique au moment de sa signature que les Etats successeurs de l'U.R.S.S. auront l'obligation de détruire 1 461 avions de combat, ce chiffre n'étant nullement affecté par les éventuelles cessions effectuées avant l'entrée en vigueur. Comment les Russes envisagent-ils de concilier en pratique l'exécution de cette obligation et leur décision d'exportation de 1 600 appareils ? Il va de soi que si les projets d'exportations annoncés par Président Eltsine se trouvaient contrevenir au traité FCE, la France se réserverait d'intervenir dans le cadre approprié, en liaison avec ses partenaires.

- page 1258

Page mise à jour le