Question de M. de ROHAN Josselin (Morbihan - RPR) publiée le 13/08/1992

M. Josselin de Rohan appelle l'attention de M. le ministre de l'industrie et du commerce extérieur sur les aides apportées à la restructuration des chantiers est-allemands. Alors que la France a réduit de 79 p. 100 sa capacité de construction navale depuis les dix dernières années, la Commission des communautés européennes a accepté d'accorder aux chantiers navals de l'ex-RDA des aides se montant à 36 p. 100 du chiffre d'affaires de ces chantiers sur la période 1991-1993 sans contrepartie réelle, puisque le Gouvernement allemand s'est engagé à réduire la capacité de production des chantiers est-allemands par rapport à un niveau fictif très sensiblement supérieur à la production réelle des chantiers de l'ex-RDA. Le montant escompté des aides devrait atteindre 20 milliards de francs français et contribuer à la création d'entreprises disposant d'un matériel neuf et sans personnel excédentaire qui seront pour les chantiers européens des concurrents particulièrement redoutables. Le Parlement européen consulté a émis un avis défavorable au processus envisagé et proposé de ramener de 36 p. 100 à 9 p. 100 du chiffre d'affaires le montant des aides prévues. En dépit de cet avis, le conseil des ministres a adopté, sans les modifier, les propositions de la commission. Il lui demande les raisons qui ont conduit le Gouvernement français, alors que nos chantiers navals ont dû procéder à des licenciements massifs et accepter une diminution drastique de leur capacité de production, à accepter le dispositif prévu par la commission. Il souhaiterait également savoir si le Gouvernement français estime que les mesures ainsi adoptées sont conformes au principe de libre et loyale concurrence qui constitue la charte du traité de Rome.

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Réponse du ministère : Industrie publiée le 22/10/1992

Réponse. - Comme le souligne l'honorable parlementaire, le conseil des ministres de la Communauté européenne a accepté pour les chantiers de construction navale, situés dans l'ex-République démocratique allemande, une dérogation au régime des aides à la production des navires défini par la VIIe/directive sur les aides à la construction navale. En complément de la réduction de 40 p. 100 des capacités de production de ces chantiers et des diminutions d'effectifs, qui ramèneront ceux-ci à 7 500 emplois (au lieu de 34 000 en juillet 1990), le Gouvernement allemand s'est engagé, à la demande de la France, à ne pas ouvrir de nouveau chantier dans cette partie de l'Allemagne. Ceci a mis notamment un terme au projet, élaboré par le chantier ouest allemand Meyer Werft (Papenburg), de création d'un nouveau chantier sur l'île de Rügen ; d'une capacité de 80 000 tonneaux bruts compensés, ce chantier spécialisé dans la construction des navires à passagers aurait constitué un concurrent direct des chantiers français, doté de moyens très modernes et de structures de bilan très favorables. De plus, la France a obtenu lors du Conseil industrie de juin 1992 des dispositions de sauvegarde. Ainsi, la Commission veillera à ce que les aides accordées aux chantiers de l'ex-RDA ne créent pas une distorsion de concurrence intra-communautaire. En cas de concurrence avérée entre ces chantiers de l'ex-RDA et d'autres chantiers de la Communauté, les Etats membres pourront saisir la commission, s'ils estiment que le prix offert est indûment bas en raison des aides accordées. La Commission pourra exiger le relèvement du prix proposé par les chantiers de l'ex-RDA, jusqu'au prix le plus bas offert par les autres chantiers de la Communauté. Enfin, le programme de réduction des capacités des chantiers navals de l'ex-RDA sera attentivement suivi par un cabinet d'audit, désigné par la commission en accord avec le Gouvernement allemand. Les rapports semestriels d'audit seront communiqués aux experts construction navale des Etats membres ; la commission organisera des réunions multilatérales des Etats membres au moins une fois par an, au cours de la période de restructuration, en vue de les informer des progrès réalisés en matière de réduction des capacités, des paiements de l'aide et des mesures prises pour éviter que les chantiers des Länder de l'Ouest ne bénéficient de façon détournée d'une partie de cette aide. Au total, on peut considérer que la décision est un équilibre acceptable entre, d'une part, le maintien d'une concurrence équitable entre les chantiers communautaires et ceux de l'ex-RDA et, d'autre part, la nécessité de stabiliser des emplois industriels maritimes sur la Baltique dans des régions fortement touchées par le chômage et où la tension sociale est forte.

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