Question de M. HAMEL Emmanuel (Rhône - RPR) publiée le 14/04/1994

M. Emmanuel Hamel signale à l'attention de M. le ministre de la coopération les affirmations, consécutives à la dévaluation du franc CFA, exprimées dans le Figaro du 18 mars 1994, d'un professeur éminent de l'université Paris-Dauphine, selon lequel " il est vain d'attendre des effets réels positifs de la modification du taux de change ". " C'est une erreur intellectuelle de prétendre que la dévaluation du franc CFA constituait une chance pour l'Afrique, comme s'il suffisait de manipuler un quelconque instrument de politique macroéconomique pour faire décoller un pays. " " Penser que l'on peut stimuler la croissance (des pays de la zone du franc CFA) par ce coup de baguette magique que serait une dévaluation, serait une dangereuse illusion. " " Il n'y avait probablement pas de surévaluation du franc CFA et il est donc vain d'attendre des effets réels positifs de la modification du taux de change. " " La dévaluation ne remplace pas les mesures d'ajustement réel. " " La dévaluation ne stimule pas la croissance. " Il lui demande quelles sont ses réponses à cette argumentation et quel bilan on peut établir des conséquences de la dévaluation du franc CFA trois mois après qu'elle ait été décidée.

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Réponse du ministère : Coopération publiée le 26/05/1994

Réponse. - Jusqu'à présent, et même s'il est encore prématuré de vouloir dresser un bilan de la dévaluation du franc CFA, les résultats enregistrés après la décision du 11 janvier 1994 sont encourageants : la décision de dévaluation n'a pas provoqué de secousses politiques et sociales majeures. La mobilisation des institutions multilatérales a été exceptionnelle : trois mois après la dévaluation, onze programmes d'ajustement structurel ont d'ores et déjà été approuvés par le conseil d'administration du FMI (seuls ceux du Congo, du Togo et de la Guinée équatoriale ne l'étant pas encore) ; parallèlement, six pays (Côte-d'Ivoire, Sénégal, Niger, Cameroun, Gabon, RCA) ont obtenu un réaménagement de leur dette en club de Paris. D'autre part, la Banque mondiale, l'Union européenne et la banque africaine de développement ont décidé de mettre en place des concours significatifs dès l'année 1994 au bénéfice des pays de la zone franc. La France, quant à elle, a fait un effort particulier sur plusieurs plans : aide à l'ajustement (4,5 milliards de francs pour 1994), annulation de dettes (pour un coût global de 25 milliards de francs), mise en place d'un Fonds spécial de développement de 300 millions de francs pour atténuer les effets négatifs à court terme sur les populations les plus vulnérables, mesures de soutien à la scolarisation (en particulier au livre scolaire), à la santé (médicament) et aux entreprises (par la mise en place d'une facilité de trésorerie à hauteur de 300 millions de francs par la Caisse française de développement), appui à la résorption des arriérés intérieurs des Etats. Les premiers effets économiques sont conformes à ce qui était attendu : l'augmentation des prix a été maîtrisée, les indicateurs mis en place par la coopération française évaluant cette hausse à 30 p. 100 en moyenne depuis la dévaluation, ces résultats étant conformes dans l'ensemble aux prévisions du FMI. Dans certains pays, des modifications de consommation apparaissent, les productions locales deviennent plus attractives que les productions importées. On observe des premiers signes de relance économique dans les pays de la zone : tant dans les filières agricoles d'exportation traditionnelles (coton, café, cacao, bois, élevage...) que dans les secteurs de l'industrie et des services. Ainsi, face à la baisse des flux d'importation et à la baisse des coûts locaux, notamment de la main-d'oeuvre, exprimés en devises, on assiste à une redynamisation du tissu productif dans plusieurs Etats de la zone. Ces premiers signes encourageants ne doivent cependant pas se traduire par un relâchement de la part des gouvernements dans leurs efforts de rigueur dans la gestion macroéconomique (politique budgétaire, politique de salaires) et d'assainissement de l'environnement des entreprises. Hormis ces premiers éléments de bilan, cette question parlementaire se réfère à une argumentation développée dans la presse par un universitaire en réponse à l'un de ses confrères qui développait des thèses opposées sur le bien-fondé de la dévaluation. Concernant la surévaluation du franc CFA, les analyses économiques, notamment celles des institutions de Bretton-Woods, avaient mis en évidence, sans ambiguïté, une surévaluation du taux de change effectif réel de leur monnaie, pour l'ensemble des Etats de la zone franc, même si celle-ci était différenciée selon les pays. L'argumentation développée par l'auteur repose sur une confusion : la dévaluation n'a jamais été présentée comme une recette magique. C'est une décision qui initie une stratégie d'ajustement global. Les politiques d'accompagnement de cette décision impliquent en particulier la poursuite des mesures d'ajustement réel, celles-ci étant au moins aussi importantes pour assurer la reprise de la croissance que la dévaluation elle-même. Enfin, la dévaluation était une condition indispensable au retour à la compétitivité des pays de la zone franc. ; cette décision impliquent en particulier la poursuite des mesures d'ajustement réel, celles-ci étant au moins aussi importantes pour assurer la reprise de la croissance que la dévaluation elle-même. Enfin, la dévaluation était une condition indispensable au retour à la compétitivité des pays de la zone franc.

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