Question de M. TRÉGOUËT René (Rhône - RPR) publiée le 20/10/1994

M. René Trégouët appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du tourisme sur les conséquences à tirer du naufrage du ferry Estonia, qui a entraîné, le 28 septembre 1994, la mort de 910 personnes. Cette catastrophe, qui intervient sept ans après celle du Herald of Free Enterprise, est la plus grave du transport maritime depuis 1947, et pose la question du contrôle et de l'application effective, au niveau européen, des normes de sécurité applicables aux navires transportant des passagers. Il semble en effet que toutes les leçons de sécurité n'aient pas été tirées de la catastrophe de Zeebruge en 1987, puisqu'à la lumière des premiers témoignages la cause du naufrage très rapide de l'Estonia pourrait être une voie d'eau provoquée par une mauvaise fermeture d'une porte d'accès aux voitures. Si cela s'avérait exact, il s'agirait donc de la même cause de naufrage qu'en 1987 pour le Herald of Free Enterprise. Le renforcement des normes de sécurité internationales, intervenu depuis 1987 dans le cadre de l'Organisation maritime internationale et de la convention SOLAS, n'a pu éviter le renouvellement d'une catastrophe maritime sans précédent, ce qui montre à l'évidence que les normes de sécurité actuellement en vigueur en Europe doivent être immédiatement renforcées, et doivent faire l'objet d'un contrôle d'application accru. Ces normes doivent porter sur quatre points essentiels : l'obligation d'installer dans les plus brefs délais des cloisons transversales étanches dans tous les ferries en circulation, de façon à limiter les conséquences d'une voie d'eau importante ; l'adoption d'un nouveau système de sécurité encore plus fiable rendant impossible le démarrage effectif du navire tant que la fermeture complète des portes d'accès aux voitures n'a pas été effectuée, et rendant également impossible toute ouverture accidentelle en mer de ces portes d'accès aux voitures ; la généralisation des dispositifs anti-incendie ; le contrôle effectif de la capacité des équipages de ferries à organiser une évacuation complète du navire en moins de trente minutes, délai fixé par les règlements internationaux. Seul le renforcement dans ces quatre directions des règles de sécurité européennes semble susceptible, accompagné d'un contrôle accru, de prévenir de nouvelles catastrophes identiques à celle de l'Estonia. Il lui demande donc de lui préciser quelles initiatives il compte prendre au niveau communautaire pour que soient renforcées très rapidement les règles européennes en matière de sécurité des transports maritimes de passagers.

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Réponse du ministère : Équipement publiée le 08/12/1994

Réponse. - Les causes du dramatique naufrage du transbordeur à passagers Estonia ne sont pas encore connues avec précision, l'enquête menée conjointement par la Finlande, la Suède et l'Estonie étant en cours. Cependant, dès qu'il est apparu que la porte avant de ce navire était en cause, il a été demandé aux services de la direction des ports et de la navigation maritimes, le 4 8ctobre dernier, de lancer une campagne de contrôles systématiques de toutes les portes de bordé et de chargement des transbordeurs à passagers faisant escale dans les ports français. Ces contrôles ont porté essentiellement sur le fonctionnement et l'étanchéité des portes, l'état et le fonctionnement des verrous, des alarmes d'entrées d'eau, des voyants de fermeture et des dispositifs de surveillance (caméras en particulier). Sur soixante-cinq navires français et étrangers concernés, soixante ont été contrôlés fin octobre. Cette opération s'est déroulée avec la collaboration entière et sans réserve des armateurs, équipages et sociétés de classification dont l'activité était pourtant perturbée par ces contrôles. Un seul navire a fait l'objet d'une réparation, rapidement effectuée. Des défectuosités mineures, correspondant à des usures ne mettant pas en cause la sécurité, ont été relevées sur un certain nombre d'autres navires. Concernant les navires battant pavillon français, les contrôles ont permis de vérifier qu'ils sont tous parfaitement entretenus et que leurs portes sont étanches, aucun défaut notable n'étant à signaler. Après le tragique naufrage du Herald of Free Enterprise en mars 1987, l'Organisation maritime internationale a prescrit, dès 1989, l'installation, à bord de tous les navires à passagers, de dispositifs permettant de contrôler, depuis la passerelle, la fermeture et l'étanchéité des portes de chargement et a établi de nouvelles normes de stabilité après avarie applicables aux navires à passagers construits à partir du 29 avril 1990. Ces nouvelles normes, appelées encore normes SOLAS 90, qui renforcent considérablement la protection contre un chavirement rapide dans le cas d'une avarie de coque grave, ont été également rendues applicables aux transbordeurs rouliers à passagers construits avant cette date, selon un calendrier allant jusqu'en 2005. Concernant plus particulièrement les " ferries " exploités dans la région Ouest-Europe, incluant notamment la Manche, la mer d'Iroise et la mer du Nord, un accord est intervenu le 27 juillet 1993 entre les pays européens concernés, les Bahamas et l'île de Man, pour appliquer aux navires sous leur pavillon les mesures rétroactives selon un calendrier globalement plus sévère. De nouvelles actions sont d'ores et déjà envisagées après l'accident de l'Estonia : au niveau mondial, c'est l'Organisation maritime internationale qui est compétente. Un groupe de travail va être constitué par cette organisation pour examiner les divers aspects de la sécurité des transbordeurs. La France va participer activement à ces travaux en y associant les partenaires concernés. Ce groupe de travail OMI devrait faire connaître ses conclusions d'ici à mai 1995. Au niveau de l'Union européenne, cette question sera discutée lors du prochain conseil des ministres des transports de novembre 1994 qui adoptera une résolution à ce sujet, mettant notamment l'accent, d'une part, sur le soutien à apporter à l'Organisation maritime internationale et, d'autre part, sur le contrôle de l'application des règles de sécurité et la qualification des équipages. Sous sa présidence, au cours du premier semestre 1995, la France mettra tout en oeuvre pour que l'Union européenne adopte un règlement visant à appliquer le plus tôt possible aux navires à passagers les nouvelles normes de l'OMI en matière de gestion de la sécurité des navires. ; en oeuvre pour que l'Union européenne adopte un règlement visant à appliquer le plus tôt possible aux navires à passagers les nouvelles normes de l'OMI en matière de gestion de la sécurité des navires.

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