Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UC) publiée le 29/12/1994

M. Philippe Richert fait part à M. le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice, du découragement des élus locaux, maires ou présidents de structures intercommunales, qui ne comprennent pas que de plus en plus de leurs collègues sont condamnés à titre personnel pour des faits dont ils ne sont pas maîtres. Que penser en effet des condamnations d'un maire à verser personnellement plusieurs dizaines de milliers de francs d'amende parce que la station d'épuration ne fonctionne pas bien ou parce qu'un bassin d'orage a rejeté une eau trop polluée ? Cette situation crée un véritable malaise chez les maires et élus de petites communes qui n'ont ni les moyens techniques adéquats pour réagir au plus tôt ni les moyens juridiques pour se défendre. Il souhaiterait connaître son avis sur la question et les suites qu'il compte y réserver.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 02/03/1995

Réponse. - Le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice, comprend l'émotion, dont se fait l'écho l'honorable parlementaire, suscitée chez les élus locaux, maires ou présidents de structures intercommunales à la suite de condamnations, qui ont pu être prononcées à l'encontre de maires, du chef de pollution des eaux, délit prévu par l'article L. 232-2 du code rural. Cet article punit quiconque aura jeté, déversé ou laissé écouler dans les cours d'eau, canaux, ruisseaux ou plans d'eau, des substances quelconques dont l'action ou les réactions ont détruit le poisson ou nui à sa mutation, à sa reproduction ou à sa valeur alimentaire. Par ailleurs, aux termes de l'article 339 de la loi du 16 décembre 1992 dite loi d'adaptation, " tous les délits non intentionnels réprimés par des textes antérieurs à l'entrée en vigueur de la présente loi demeurent constitués en cas d'imprudence, de négligence ou de mise en danger délibérée de la personne d'autrui, même lorsque la loi ne le prévoit pas expressément ". A cet égard, la Cour de cassation précise que " la seule constatation de la violation en connaissance de cause d'une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son auteur l'intention coupable exigée par l'article 121-3, premier alinéa, du code pénal ". Il apparaît toutefois important que le contexte de commission de ces infractions puisse être pris en compte dans toute la mesure du possible. Il en va ainsi des difficultés financières propres à une petite commune ou de la carence éventuelle des autorités de tutelle ou des autorités dont peut dépendre le financement d'une réalisation urgente. En outre, la responsabilité pénale des personnes morales est, dans une certaine mesure, susceptible de limiter celle des personnes physiques, même si le cumul est évidemment possible, dès lors que les faits mis en évidence relèveraient plus d'une carence de la gestion communale que d'une faute directement imputable à une seule personne physique. La prise en compte de l'ensemble de ces considérations doit pouvoir permettre une réponse judiciaire appropriée aux affaires mettant en cause la responsabilité des élus.

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