Question de M. BALARELLO José (Alpes-Maritimes - RI) publiée le 09/02/1995

M. José Balarello appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice, sur les pratiques de blanchiment de capitaux liés aux procédures de permis de construire. Pour mettre en échec ces tentatives, il estime qu'il serait opportun de permettre au procureur de la République de demander le sursis à statuer dans la procédure de délivrance de ces autorisations par les autorités compétentes dès lors que des soupçons suffisants sur l'origine des capitaux pouvant être engagés dans ces opérations sont établis. La même possibilité pourrait intervenir dans le cadre des transferts desdits permis. Dans le cas où le traitement de renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN) consulté sur l'origine de ces fonds par le procureur donnerait un avis confirmant la provenance douteuse, il serait fait obligation à l'autorité compétente de refuser le permis demandé. Il lui demande de lui faire connaître ses sentiments sur ces propositions.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 21/12/1995

Réponse. - La proposition de l'honorable parlementaire tendant à instituer la possibilité d'un sursis à statuer dans le cadre de procédures de délivrance ou de transfert de permis de construire dès lors que seraient établis des soupçons suffisants sur l'origine douteuse des capitaux engagés dans le financement de ces opérations a retenu toute l'attention du garde des sceaux, en ce qu'elle rejoint la volonté du Gouvernement de renforcer la lutte contre le blanchiment de capitaux illicites. Toutefois, la mise en oeuvre de cette proposition suscite des difficultés au regard des principes qui gouvernent l'intervention des autorités judiciaires de poursuite. En effet, une intervention du procureur de la République, qui serait fondée sur la seule existence de soupçons pour solliciter un sursis à statuer, pourrait apparaître attentatoire aux libertés publiques, au premier chef desquelles la liberté d'entreprendre. Par ailleurs, la procédure d'octroi des permis de construire est une procédure purement administrative, qui n'a d'autre fondement que la nécessité d'assurer le respect des règles d'urbanisme. L'intervention du parquet dans une telle procédure ne va donc pas de soi. Il n'en demeure pas moins que les parquets, dans les relations qu'ils sont appelés à entretenir avec les autorités administratives concernées, sont à même, le cas échéant, de diligenter une enquête dès lors que les informations recueillies dans le cadre de ces procédures sont de nature à suspecter l'origine douteuse des capitaux. Dans ce contexte, un certain nombre de mesures judiciaires telles que celles relatives à la confiscation des produits issus du blanchiment - parmi lesquels les biens immobiliers - constituent d'ores et déjà des outils efficaces de répression dans ce secteur. De même, les opérations relatives à la réalisation d'investissements immobiliers sont susceptibles de faire l'objet de procédures judiciaires initiées par les déclarations de soupçons auxquelles sont assujettis un certain nombre d'intermédiaires, notamment les établissements financiers. Par le projet de loi visant à étendre le champ d'incrimination de délit de blanchiment aux produits de tous crimes ou délits et qui est actuellement discuté par le Parlement, le Gouvernement a réaffirmé le souci qui est le sien de se doter d'un dispositif efficace pour lutter contre le blanchiment de tous les capitaux illicites, notamment dans des investissements immobiliers, qui de fait constituent un débouché privilégié du recyclage de " l'argent sale ".

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