Question de M. SOUVET Louis (Doubs - RPR) publiée le 29/06/1995

M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les conditions d'application de la convention franco-marocaine du 27 mai 1983 relative aux mariages des couples mixtes. Cette convention crée de nombreux problèmes quant à son application. Notamment la convention reste muette sur le fait que la charia interdit à un non-musulman de se marier à une musulmane sans qu'il se soit au préalable converti à l'islam ; les deux époux qui s'installent au Maroc seront donc considérés comme concubins, situation illégale dans ce pays. En se convertissant et toujours au Maroc, le ressortissant français dépend alors entièrement de la loi marocaine, il peut par conséquent répudier son épouse, devenir polygame ; ses enfants seront obligatoirement musulmans. Cette convention bafoue le principe de protection des intérêts du citoyen français résidant à l'étranger. Il demande si le Gouvernement entend renégocier de façon approfondie cette convention afin que le droit civil français ne soit pas considéré comme une entité négligeable.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 31/08/1995

Réponse. - L'honorable parlementaire fait vraisemblablement référence à la convention franco-marocaine du 10 août 1981 relative aux statuts des personnes et de la famille et à la coopération. Il n'existe pas en effet de convention, entre les deux pays, consacrée spécifiquement aux mariages des couples mixtes. La convention du 10 août 1981, entrée en vigueur le 13 mai 1983 comprend deux volets bien distincts. Le premier porte sur la loi applicable en matière de mariage et de divorce, le second porte sur la coopération dans le domaine de la garde des enfants, des droits de visite et des obligations alimentaires. Dans ses grandes lignes, les solutions retenues par le premier volet ne heurtent pas à priori les règles de notre droit positif français, selon lesquelles une compétence de principe est donnée à la loi nationale de l'individu, en application de l'article 3, alinéa 3, du code civil. La convention dispose ainsi que le mariage et le divorce sont soumis à la loi de celui des deux Etats dont les époux ont tous deux la nationalité. Elle a permis par là-même, et conformément au souhait des négociateurs marocains, que le divorce des ressortissants ayant la même nationalité et résidant dans l'autre pays, soit prononcé selon leur loi nationale. Ceci dit, il est vrai qu'en cas de mariage mixte l'application de la loi marocaine à un couple domicilié au Maroc en application de l'article 9, alinéa 2, peut se révéler préjudiciable, notamment, à nos ressortissantes. Par ailleurs, et comme le souligne l'honorable parlementaire, l'obligation de conversion à l'islam pour tout non-musulman désirant épouser une musulmane est totalement ignorée par la convention. Cette obligation n'est pas conforme à l'idée que l'on peut se faire d'un traitement équitable des parties et mériterait un examen attentif, de même que le statut des binationaux. Sur ces points il ne faut pas perdre de vue que la convention par son deuxième volet vise précisément à règler les conflits les plus graves qui peuvent surgir au sein des couples franco-marocains, et à faciliter la reconnaissance réciproque des décisions judiciaires. C'est en renforçant la coopération juridique recherchée par les deux pays à travers cet instrument conventionnel que l'on pourra mesurer si les avantages attendus sont de nature à compenser les difficultés signalées. A cette fin, le ministère des affaires étrangères veillera particulièrement, dans le cadre des réunions des commissions mixtes prévues à l'article 16 de la convention franco-marocaine à l'approfondissement de cette coopération. Un travail d'information auprès de nos ressortissants sera également effectué.

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