Question de Mme BERGÉ-LAVIGNE Maryse (Haute-Garonne - SOC) publiée le 03/10/1996

Mme Maryse Bergé-Lavigne attire l'attention de M. le ministre délégué aux finances et au commerce extérieur sur la participation du groupe français Total à un projet controversé en Birmanie. En 1992, avec une compagnie locale et le groupe américain Unocal, Total lançait un projet de gazoduc pour relier un gisement off-shore à la Thaïlande. Or, il semble que les travaux de construction, entrepris sous la protection de l'armée birmane, ont entraîné, directement ou indirectement, des déplacements de population et l'utilisation du travail forcé, pratique courante dans ce pays. Bien plus, ce projet participe au renforcement de la dictature militaire actuellement au pouvoir, qui a, en 1988, réprimé dans le sang un vaste mouvement national pro-démocratique et annulé, en 1990, des élections emportées par le parti d'opposition Ligue nationale pour la démocratie. Ainsi, selon Mme Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix en 1991, et chef de file de l'opposition, " ce genre d'investissements contribue à soutenir directement le régime militaire en place ". L'attitude du groupe Total en Birmanie pourrait amener une campagne internationale de boycott, qui aurait des effets néfastes pour cette société et, plus généralement, pour l'industrie française. Or, l'exemple de l'Afrique du Sud a démontré que l'interdiction des investissements pouvait amener un régime dictatorial à négocier avec son opposition démocratique. C'est pourquoi elle lui demande de préciser la position du Gouvernement sur les investissements en Birmanie, et s'il ne lui semble pas que la France, par soutien au mouvement d'opposition non-violente menée par le prix Nobel Aung San Suu Kyi, devrait renoncer à des relations économiques avec le régime militaire birman.

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Réponse du ministère : Finances publiée le 30/01/1997

Réponse. - Depuis 1993, le Gouvernement birman encourage les investissements étrangers. Le flux annuel des investissements étrangers approuvés se situe aujourd'hui à 1 350 millions de dollars américains, à un niveau cinq fois supérieur à celui de 1990. Les principaux secteurs bénéficiant d'investissements étrangers sont les secteurs du pétrole et du gaz textile et l'hôtellerie. La France est le troisième investisseur étranger en Birmanie avec 15 % du stock des investissements, au même niveau que la Thaïlande, et derrière le Royaume-Uni (21 %) et Singapour (20 %). Le projet Total représente 50 % des investissements français dans ce pays. De nombreuses autres firmes pétrolières (Texaco, Nippon Oil) sont également installées en Birmanie. La France a opté, conformément à l'attitude de l'Union européenne, pour un " dialogue critique " avec le Gouvernement de Rangoon en encourageant les tentatives de démocratisation en cours et en saisissant toutes les occasions pour transmettre les messages de l'Union européenne aux autorités birmanes. La France a notamment suspendu son aide en 1988. La France a également soutenu les mesures, annoncées le 28 octobre dernier, visant à restreindre les contacts avec les dirigeants birmans et leurs familles. L'Union européenne étudie actuellement la possibilité de suspendre le système de préférences généralisées dont bénéficie la Birmanie, suite à la plainte déposée par des organisations syndicales sur les pratiques de travail forcé. Il n'a toutefois jusqu'à présent pas été envisagé d'interdire les investissements européens en Birmanie. Les voisins de la Birmanie et le Japon ont une attitude plus ouverte que la nôtre. L'Association des nations d'Asie du Sud-Est (A.N.A.S.E.) a développé une doctrine d'" engagement constructif ". Le ministre birman des affaires étrangères a participé à la réunion des ministres des affaires étrangères de l'A.N.A.S.E. à Bangkok, en tant qu'invité du pays hôte, en juillet 1 994. La Birmanie a été admise comme observateur au sein de cette organisation en juillet 1995.

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