Question de M. SÉRUSCLAT Franck (Rhône - SOC) publiée le 31/10/1996

M. Franck Sérusclat attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la position que devrait adopter la France face au projet d'institution d'un tribunal international permanent. Le Parlement européen a voté à l'unanimité, au cours de sa session de septembre, une résolution demandant au conseil, à la commission et aux Etats membres de l'Union européenne de mettre tout en oeuvre afin que les recommandations du comité préparatoire sur la question deviennent leur position et que l'assemblée générale des Nations Unies se prononce en ce sens en novembre prochain. Il demande à ce que la France adopte une position claire et dépourvue de réserves sur la nécessité de fixer la conférence diplomatique plénipotentiaire instituant le tribunal à décembre 1998 et de prolonger le mandat du comité préparatoire, afin de ne pas voir une fois encore la date de cette création, dont il est question depuis la création de l'organisation des Nations Unies, repoussée. Les événements de ces dernières années ont en effet apporté la preuve éclatante que cette institution est nécessaire au niveau universel, évitant à l'avenir de créer des tribunaux ad hoc et ponctuels pour juger des crimes commis lors de conflits particuliers.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 19/12/1996

Réponse. - Comme le souligne l'honorable parlementaire, les Nations unies sont à nouveau saisies, depuis 1990, du projet de création d'une Cour criminelle internationale, après des années d'interruption. La France et ses partenaires de l'Union européenne ont apporté leur plein soutien à la relance de ce processus. Un projet de la Commission du droit international, point de départ utile mais incomplet, a été soumis aux Etats en 1994. Depuis, les négociations progressent sous l'impulsion notamment des pays européens, du Canada, de l'Australie, mais elles pâtissent de la faible implication des autres régions du monde. Le comité préparatoire chargé d'élaborer sous l'égide des Nations unies un projet de statut d'une Cour criminelle internationale permanente s'est réuni à deux reprises en 1996, sous la présidence d'Adrian Bos, des Pays-Bas. La France, qui est déjà largement à l'origine de la création de deux juridictions internationales ad hoc, pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, joue un rôle actif dans les travaux du Comité préparatoire : elle a d'ailleurs soumis un projet de statut complet qui constitue, par sa rigueur et sa cohérence, l'un des principaux instruments de travail des délégations. Notre texte, qui reflète naturellement les spécificités du droit romano-germanique, devrait permettre au comité préparatoire de s'entendre sur un vrai langage de synthèse dans un domaine, le droit pénal international, où le droit anglo-saxon a tendance à prédominer. Notre projet se caractérise également par sa grande précision : il s'agit en effet d'établir une cour permanente, que nous souhaitons universelle, et cette idée ambitieuse soulève d'importantes questions juridiques et politiques qu'il ne fallait pas esquiver. L'expérience engrangée au travers de l'activité des deux tribunaux ad hoc nous permet d'ailleurs de mieux connaître les difficultés qui ne manqueront pas d'apparaître dans le fonctionnement de la future institution et nous devons répondre à ces questions maintenant, pendant la phase de négociation. Le président du comité préparatoire a pu présenter à la 51e Assemblée générale des Nations unies, sur la base de nos propositions, de celles formulées par d'autres délégations, ainsi que du projet initial de la Commission du droit international, un rapport de grande qualité. L'Assemblée générale des Nations unies va maintenant se prononcer sur la poursuite des travaux du comité préparatoire : celui-ci devrait se réunir à trois reprises en 1997. Notre pays, soucieux d'élaborer un statut complet, qui entoure véritablement les travaux de la future juridiction de toutes les garanties de procédure lui permettant de rendre la justice de manière équitable et efficace, est tout à fait favorable à l'idée d'intensifier ainsi les travaux du comité. La France a soutenu avec clarté et sans réserve la résolution retenant le principe de la convocation, dès 1998, d'une conférence diplomatique qui aura mandat de faire aboutir le projet de convention. Dans cette perspective, elle entend poursuivre activement sa participation aux négociations menées au sein du comité.

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