Question de M. DUSSAUT Bernard (Gironde - SOC) publiée le 07/05/1998

M. Bernard Dussaut appelle l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur les difficultés engendrées par l'arrêté du 6 mai 1996 fixant les modalités du contrôle technique exercé par les communes sur les sytèmes d'assainissement non collectif dont la mise en oeuvre a été précisée par la circulaire du 22 mai 1997. Le transfert de ces attributions de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) vers les communes depuis le 1er janvier 1998 pose un certain nombre de problèmes d'ordre financier, technique et juridique : coût engendré, capacité d'appréciation technique, responsabilité civile et pénale des maires sont autant de sources d'inquiétude pour les élus locaux. Ainsi, il lui demande s'il lui est possible de lui donner des indications susceptibles de rassurer les maires, notamment les maires des petites communes pour lesquels ce transfert est très lourd. Il souhaiterait, par ailleurs, qu'elle lui précise s'il lui semble envisageable que des dispositions soient prises afin que les directions départementales de l'équipement (DDE) se voient attribuer cette responsabilité par délégation dans le cadre de l'instruction du permis de construire.

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Réponse du ministère : Logement publiée le 24/06/1998

Réponse apportée en séance publique le 23/06/1998

M. le président. La parole est à M. Dussaut, auteur de la question n° 263, adressée à Mme le ministre de
l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Bernard Dussaut. Monsieur le secrétaire d'Etat, depuis le 1er janvier dernier, en application de la loi sur l'eau du 3
janvier 1992 et de l'arrêté du 6 mai 1996 fixant les modalités du contrôle technique exercé par les communes sur les
systèmes d'assainissement non collectifs, les services des directions départementales des affaires sanitaires et
sociales, les DDASS, ne délivrent plus de certificat de conformité sur l'installation d'un dispositif d'assainissement
autonome. Ce sont les maires qui doivent s'en charger.
Les problèmes consécutifs à ce transfert de compétences, qui a été précisé par la circulaire du 22 mai 1997, vont se
poser réellement à compter du 1er juillet prochain. En effet, les services des DDASS avaient accepté une période de
transition, en instruisant pendant ces six derniers mois les dossiers nouveaux pour le compte des communes.
Les inquiétudes sont fortes, car ces nouvelles attributions sont lourdes, d'autant plus lourdes que les communes sont
petites. Nous nous trouvons face à quatre grands types d'interrogation.
Le premier est d'ordre technique : les maires s'inquiètent de la capacité d'appréciation technique de leurs services. En
effet, les communes non rattachées à une communauté urbaine ne disposent généralement pas de techniciens
qualifiés, voire de services capables d'assumer cette nouvelle responsabilité.
Les maires s'interrogent donc sur les aides techniques que les services concernés de l'Etat seront en mesure d'offrir,
notamment lorsqu'ils sont élus de petites communes rurales qui ne disposent, elles, d'aucun service technique. Certes,
pour ces communes, l'intercommunalité semble être un atout : elles peuvent confier au syndicat des eaux la gestion du
contrôle, puis du suivi des installations. Cependant, cette « solution » n'en est pas vraiment une puisque, comme nous
allons le voir, un certain nombre d'autres interrogations restent en suspens.
En effet, le deuxième type d'interrogation est d'ordre financier, avec la grande inconnue du coût que ce transfert va
engendrer.
Cette question du coût reste entière, que la commune soit intégrée ou non à une structure intercommunale.
Le troisième type d'interrogation est d'ordre juridique. Nous assistons, en effet, à un transfert de responsabilités des
services de l'Etat vers les maires. Une aide spécifique sera-t-elle prévue pour une appréciation technique de la validité
ou de la non-validité de ce type d'installation ? Que se passera-t-il en cas de problèmes ? Quelles seront les
responsabilités civiles ou pénales qui seront désormais celles des élus locaux ?
Et quand bien même vous pourriez, monsieur le secrétaire d'Etat, répondre à ces interrogations, il reste la difficulté
pratique de la mise en place d'un contrôle de l'assainissement autonome par les élus. L'accès aux propriétés est
indispensable pour effectuer le contrôle et, même si le maire dispose, de par sa fonction, des pouvoirs de police en
matière de salubrité, on peut craindre l'incompréhension de certains propriétaires.
Qui plus est, le flou juridique qui entoure encore les collectivités assurant la maîtrise d'ouvrage de travaux de
réhabilitation dans l'enceinte d'une propriété privée n'aura-t-il pas également des incidences dans ce cadre précis ? Je
vous rappelle que le propriétaire conserve le droit de faire appel au prestataire de son choix à partir du moment où l'on
intervient dans sa propriété.
Nous allons donc devoir faire preuve de grandes qualités en matière de pédagogie et de persuasion !
Ainsi, les problèmes résultant de ce transfert de compétences sont très nombreux et les élus qui se voient attribuer ces
nouvelles responsabilités ont le sentiment de n'avoir aucunement les moyens de les assumer correctement :
techniquement, pratiquement, juridiquement et financièrement, cela apparaît à la majorité d'entre eux comme une
charge supplémentaire et un désengagement total de l'Etat.
Au regard de toutes les questions soulevées, ne serait-il pas opportun, monsieur le secrétaire d'Etat, d'envisager que
les directions départementales de l'équipement soient autorisées, par délégation, à effectuer les contrôles techniques,
d'une part avant la délivrance du certificat de conformité dans le cadre de l'instruction du permis de construire, d'autre
part, lors des contrôles et de l'entretien de ces installations au cours des années qui suivront ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le sénateur, vous avez attiré l'attention de Mme Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, sur l'assainissement non collectif. Ma collègue est au
Danemark, où elle participe à une conférence des ministres chargés de l'environnement en vue de la signature de la
convention paneuropéenne sur l'information et la participation du public en matière de décisions environnementales. Elle
m'a donc demandé de vous prier de l'excuser et de vous faire part des éléments de réponse suivants.
La loi sur l'eau a modifié le code de la santé publique et le code général des collectivités territoriales pour faire de
l'assainissement non collectif un mode de traitement des eaux usées à part entière. En effet, lorsque les conditions
techniques requises sont mises en oeuvre, l'assainissement non collectif garantit des performances comparables à
celles de l'assainissement collectif et permet de disposer de solutions plus économiques pour l'habitat dispersé. Il
constitue alors la solution de référence en milieu rural.
Contrairement à l'assainissement collectif, la prise en charge de la réalisation et du fonctionnement des ouvrages
appartient aux personnes privées, qui sont par conséquent responsables en cas de pollution.
Cependant, afin d'assurer le bon fonctionnement de ces installations, la loi sur l'eau fait obligation aux communes de
mettre en place des services publics d'assainissement non collectif.
La mission de ces nouveaux services publics est d'assurer à la fois le contrôle des installations d'assainissement non
collectif lors de leur réalisation et un contrôle régulier de leur bon fonctionnement et de leur entretien. Ces services
pourront également proposer d'assurer eux-mêmes l'entretien des installations, mais cette mission est facultative.
Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a conscience de la lourdeur de cette nouvelle
mission pour les communes, en particulier les communes rurales.
Cette mission est toutefois nécessaire au bon fonctionnement de l'assainissement non collectif en milieu rural,
c'est-à-dire, en dernier ressort, à l'amélioration effective de la qualité de l'eau. En effet, il est à déplorer que les
programmes antérieurs, trop tournés vers l'assainissement collectif, aient été incapables d'améliorer réellement la
situation en milieu rural.
Pour faciliter la tâche des communes - c'est bien là votre préoccupation, monsieur le sénateur - Mme Dominique
Voynet tient à souligner différents points.
Tout d'abord, un délai important a été donné aux communes pour mettre en place le service de contrôle de
l'assainissement non collectif, puisqu'elles ont jusqu'au 31 décembre 2005 pour organiser ce service.
Par ailleurs, les communes, en particulier les communes rurales, ont tout intérêt à se regrouper en syndicat
intercommunal pour exercer cette nouvelle compétence afin de s'assurer d'un périmètre d'intervention suffisant. Ce
regroupement facilitera également l'emploi à temps plein de personnes qualifiées. Les agences de l'eau étudient
actuellement les modalités d'utilisation des emplois jeunes dans ce cadre, ce qui devrait permettre de réduire les coûts
de mise en place des services tout en créant des emplois durables.
Enfin, ce service industriel et commercial est financé, comme le service d'assainissement collectif, par une redevance
qui sera mise à la charge des usagers.
Le contrôle technique de l'assainissement non collectif ne doit pas être confondu avec l'instruction du permis de
construire. Il ne peut être délégué, j'y insiste, aux directions départementales de l'équipement, ni être réalisé dans le
cadre de la prestation d'aide technique à la gestion communale confiée par les collectivités locales aux directions
départementales de l'équipement.
Toutefois, le service d'assainissement non collectif chargé du contrôle peut faire appel à des prestataires privés pour
assurer certaines de ses missions et, éventuellement, aux services déconcentrés de l'Etat, notamment ceux de la
direction départementale de l'équipement, non pas dans le cadre d'une délégation de services, mais des prestations
rémunérées d'assistance aux collectivités, la charge revenant aux particuliers desservis.
Telles sont les précisions que je pouvais vous apporter. J'espère qu'elles vous éclaireront sur cette question qui
préoccupe sûrement les collectivités locales en milieu rural, puisque vous vous en êtes fait l'écho.
M. Bernard Dussaut. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Dussaut.
M. Bernard Dussaut. Je vous remercie de cette réponse, monsieur le secrétaire d'Etat. Toutefois, elle n'est pas de
nature à me rassurer. En effet, vous n'avez pas apporté de précisions sur le plan juridique, notamment.
S'agissant de l'intervention du maire sur des propriétés privées, le problème reste entier. Vous confirmez que cette
mission est confiée au maire. Certes, un délai est prévu, à savoir 2005. Cependant, d'ici là, la DDASS ne va plus
assurer ces attributions. En effet, les réunions qui se sont tenues dans les départements et les cantons ont mis en
évidence qu'elle n'assurerait plus ce service à partir du 1er juillet. Nous ne savons pas si tel sera le cas jusqu'en 2005.
En outre, nous n'avons pas de réponse sur le coût d'un tel dispositif pour les communes. Certes, les maires pourront
demander l'intervention des services de l'Etat, à savoir la DDE, mais, là encore, il y aura un coût.
Chaque maire devra-t-il acheter un niveau à bulle afin de déterminer si la pente est respectée ?
Il s'agit d'une mission très difficile à assumer et votre réponse ne me satisfait pas vraiment.

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