Question de M. DILIGENT André (Nord - UC) publiée le 21/10/1998

M. André Diligent appelle l'attention de M. le ministre délégué aux affaires européennes sur le Fonds social européen. Pour la période 1994-1997, la France s'est vu attribuer au titre des objectifs 3 et 4 la somme de 21,6 milliards de francs, et ce pour répondre à deux objectifs : à titre curatif, combattre le chômage de longue durée, faciliter l'insertion dans la vie active des jeunes, des femmes, des chômeurs de longue durée et des personnes exposées à l'insertion ; à titre préventif, améliorer la qualification des travailleurs menacés de chômage en raison des exigences des mutations industrielles. Ces programmes arrivant bientôt à leur terme, il lui demande si des dispositifs sont à l'étude pour mieux maîtriser la mise en oeuvre du Fonds social européen. En effet, le Parlement européen a fait état dans un rapport sur le FSE, discuté en séance le 18 juillet 1997, des retards constatés en France dans l'utilisation des crédits communautaires. Il les attribue à l'excès de centralisation et au manque de clarté dans la répartition des compétences entre les différents échelons administratifs qui aboutissent souvant à une marginalisation des collectivités locales et des acteurs locaux, à l'excessive rigidité du processus de programmation et des mesures d'éligibilité au plan national, à la lenteur de la présentation des projets, à la lourdeur et la lenteur des circuits financiers, à la difficulté de mobiliser les cofinancements, aux carences de l'information. Il semblerait que si la sous-consommation des fonds structurels est générale en Europe, en France elle serait de l'ordre de 30 % par rapports aux prévisions.

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Réponse du ministère : Enseignement scolaire publiée le 11/11/1998

Réponse apportée en séance publique le 10/11/1998

M. André Diligent. Je suis un Européen convaincu, tout comme M. le ministre délégué chargé des affaires
européennes, certainement. C'est la raison pour laquelle je suis désolé de constater un certain nombre de carences
dans le fonctionnement de la machine européenne. En effet, nous assistons, par moments, à un véritable gâchis : je
veux parler de la sous-consommation des crédits du fonds social européen, le FSE, dont la finalité est l'amélioration de
la situation de l'emploi en France.
Le FSE est le seul fonds stucturel qui concerne directement les personnes. Il symbolise les efforts déployés par l'Union
européenne pour lutter contre le chômage.
La situation est connue : 18 millions d'Européens sans emploi, dont la moitié déjà depuis plus d'un an, 5 millions de
jeunes chômeurs âgés de moins de 25 ans et un chômage qui touche plus durement encore les femmes.
Pour la période 1994-1997, la France s'est vu attribuer pas moins de 21 milliards de francs au titre du seul Fonds social
européen pour faciliter l'entrée dans la vie active des jeunes, des femmes, des chômeurs de longue durée, des
personnes à réinsérer, et pour améliorer la condition des travailleurs menacés par les exigences des mutations
industrielles.
Un rapport sur le FSE, remis l'année dernière à la commission de l'emploi des affaires sociales du Parlement européen,
a mis en évidence les retards constatés particulièrement en France, notamment dans l'utilisation des crédits
communautaires. On y constate l'excès de centralisation, le manque de clarté dans la répartition des compétences
entre les différents échelons administratifs qui aboutissent souvent à une marginalisation des collectivités locales et des
acteurs locaux, l'excessive rigidité du processus de programmation et des mesures d'éligibilité au plan national, la
lenteur de la présentation des projets, la lourdeur et la lenteur des circuits financiers, les difficultés à mobiliser les
cofinancements, les carences de l'information.
Le fait que la sous-consommation existe partout en Europe ne me console pas, d'autant que la France bat de façon
indiscutable les records à cet égard.
J'aimerais donc savoir quelles dispositions la France compte prendre à l'avenir pour mieux maîtriser la mise en oeuvre
du Fonds social européen, étant entendu que les programmes actuels vont bientôt arriver à leur terme et que les
arriérés de crédits non consommés à la fin de l'année 1999 seront supprimés.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire. Monsieur le sénateur, M. Moscovici,
retenu par un conseil européen, m'a chargée de vous répondre.
La bonne gestion de l'aide apportée par l'Union européenne à la France à travers le Fonds social européen est
évidemment d'une importance essentielle, car les concours communautaires versés à la France au titre du FSE
s'élèveront à 32,5 milliards de francs sur la période 1994-1999. Ces concours seront d'ailleurs largement sollicités dans
le cadre de la mise en oeuvre du plan national d'action pour l'emploi qui a été remis par la France à la Commission
européenne le 15 avril dernier et qui a fait l'objet d'appréciations très favorable, de la part du commissaire européen, M.
Flynn.
Les commentaires du Parlement européen ont été étudiés soigneusement par la Commission européenne et les
gouvernements des Quinze. En ce qui concerne la France, il est vrai que le niveau de sous-consommation a été
préoccupant. Il convient toutefois de noter que la plupart de ces sous-consommations ont été dues à la mise en réserve
de 1,4 milliard de francs pour soutenir le projet de loi contre les exclusions.
En effet, l'interruption, en 1997, du processus législatif qui devait aboutir à la loi de cohésion sociale, pour laquelle un
important financement du FSE était prévu - 1,4 milliard de francs - explique en grande partie l'érosion sur cette année
des progrès observés depuis 1994.
La mobilisation du FSE, en 1998 et en 1999, sur certains dispositifs du programme de prévention et de lutte contre les
exclusions - le programme Trajets d'accès à l'emploi, connu sous le nom de TRACE, le développement des plans
locaux d'insertion par l'économique, les PLIE, l'accompagnement des contrats emploi-solidarité, l'appui aux
demandeurs d'emploi, etc. - associée à l'accroissement des moyens des organismes chargés de leur exécution, telle
l'ANPE, par exemple, devrait permettre une meilleure réalisation du programme.
La complexité de la programmation de l'objectif 3, qui finance vingt et une mesures regroupant trois cents actions
publiques, n'est nullement contestable. Mais cet état de fait est imputable aussi à la complexité de notre organisation
administrative, qui comporte au moins quatre échelons compétents en matière d'action sociale et de formation : l'Etat,
les régions, les départements et les communes.
L'implication de plus en plus grande des acteurs territoriaux aux côtés d'un grand nombre de ministères contribuant aux
politiques en faveur de l'emploi multiplie les dispositifs et les sources de financements nationaux. La complexité dont
l'honorable parlementaire fait mention n'est qu'un effet induit de cette situation qui ne peut être imputée au seul FSE.
Pour ce qui concerne l'objectif 4, dont l'objet était de favoriser l'adaptation des salariés aux mutations industrielles et à
l'évolution des systèmes de production, la décision de la Commission européenne n'est intervenue que le 16 décembre
1994. De ce fait, l'année 1994 n'a connu aucune dépense, et les actions ont effectivement démarré en 1995.
Enfin, pour pallier cette insuffisance, il a été demandé à la Commission européenne - cela a d'ailleurs été obtenu - que
les fonds mutualisés par les organismes paritaires collecteurs agréés, les OPCA, soient assimilés à des crédits
publics. Cette avancée significative a permis une progression sensible des dépenses de 1995 à 1997. Cependant, une
sous-consommation n'est pas à exclure.
Afin de simplifier la gestion de cet objectif, il a été décidé récemment de demander aux préfets de passer des
conventions globales avec les OPCA au bénéfice des entreprises de moins de 250 salariés. Les OPCA interviendraient
ainsi conjointement au titre des fonds mutualisés et du FSE auprès des petites entreprises, leur épargnant ainsi en
partie les charges d'administration et de gestion.
Cela étant dit, on ne peut nier le fait que le système actuel doit être amélioré. Les sujets que vous avez évoqués,
monsieur le sénateur, seront pris en compte pour la réflexion en cours sur la réforme des fonds structurels. La France
continuera à souligner la nécessité de réduire le taux de sous-consommation des fonds structurels et d'en améliorer la
gestion, en réformant les procédures administratives et budgétaires.
M. André Diligent. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Diligent.
M. André Diligent. Madame la ministre, j'ai compris que vous m'avez compris ! (Sourires.)
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Tout à fait, monsieur le sénateur !
M. André Diligent. Je m'en félicite, car, s'il fallait résumer la réalité du fonctionnement de cette machine européenne,
on pourrait dire, comme un ministre que vous connaissez bien à propos de l'éducation nationale, qu'il s'agit bien, par
moments, d'un mammouth !
Ce fonctionnement est en effet caractérisé par sa lourdeur - certains dossiers font l'objet d'un véritable parcours du
combattant par sa longueur vous avez d'ailleurs vous-même cité le nombre d'étapes nécessaires - et par sa lenteur,
avec les difficultés que cela représente pour les trésoreries de certaines petites communautés.
Encore une fois, attention ! On ne pourra plus aller au guichet pour les arriérés à la fin de 1999. M. le secrétaire d'Etat
au budget, ici présent, m'a compris !
Il s'agit ici de problèmes éminemment humains : songez à tous ces malheureux, à tous ces chômeurs. Il s'agit vraiment
d'une subvention pour les personnes et pas simplement pour des investissements, raison pour laquelle je vous remercie
par avance de votre vigilance sur ce dossier.

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