Question de M. BAYLET Jean-Michel (Tarn-et-Garonne - RDSE) publiée le 22/01/1999

Question posée en séance publique le 21/01/1999

M. le président. La parole est à M. Baylet.
M. Jean-Michel Baylet. Monsieur le Premier ministre, quelques jours après l'approbation, à une très large majorité, de
la révision constitutionnelle en vue de la ratification du Traité d'Amsterdam,...
M. Emmanuel Hamel. Hélas ! (Sourires.)
M. Jean-Michel Baylet. ... dont nous nous félicitons grandement, et quelques mois avant les élections européennes,
l'Europe demeure continuellement au coeur de nos préoccupations - et des vôtres aussi, mon cher collègue, mais pas
dans la même optique. Elle mérite donc, une fois de plus, toute notre attention.
Parce que ses avancées sont certaines, mais aussi parce que ses blocages sont, hélas ! une réalité, je voudrais vous
interroger, monsieur le Premier ministre, sur deux points.
Le premier porte sur la certitude quant à la fermeté de la position française dans le cadre de la réforme de la politique
agricole commune et, surtout, sur vos ambitions en ce qui concerne la construction européenne et, plus
particulièrement, la nécessité absolue de donner un nouvel élan à l'Europe politique.
La réunion des Quinze à Bruxelles, lundi et mardi derniers, a permis d'exposer les options qui s'ouvrent à l'agriculture
européenne : baisse des prix, cofinancement ou dégressivité des aides.
A l'heure où le Sénat débat du projet de loi d'orientation agricole qui prévoit la multifonctionnalité de l'agriculture, est-on
en droit d'imaginer que nos partenaires accepteront l'idée d'une agriculture européenne originale, dépassant la logique
productiviste, pour se soucier davantage du développement rural et de l'environnement ?
Par ailleurs, - c'est le second point - le drame du Kosovo sur lequel, en réponse à une question de M. Pierre Mauroy,
M. Hubert Védrine vient de s'exprimer, nous rappelle, s'il en était besoin, que l'Europe politique réellement est un
objectif prioritaire si nous voulons être crédibles.
Nous connaissons les limites actuelles et nous savons combien nous sommes encore loin d'une entité politique
réellement démocratique à vocation de puissance mondiale. C'est pourquoi les radicaux, campés sur leurs convictions
européennes, aimeraient, monsieur le Premier ministre, vous entendre sur ce sujet. (Applaudissements les travées du
RDSE ainsi que sur certaines travées socialistes.)

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Réponse du ministère : Premier ministre publiée le 22/01/1999

Réponse apportée en séance publique le 21/01/1999

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre, que nous remercions de participer à nos travaux.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le sénateur, la mise en place de la monnaie unique, au début de cette
année, en tout cas au plan des institutions financières et des entreprises, rend, à l'évidence, encore plus urgente et
impérieuse la nécessité de conforter la dimension politique de la construction européenne.
Les conditions sont réunies, selon moi, pour aller de l'avant. En effet, l'euro, mais aussi la création de l'euro à Onze,
voulue par le Gouvernement, et la coordination des politiques économiques nécessaires, ainsi que des évolutions dans
le paysage politique européen, qui font que beaucoup de gouvernements partagent des valeurs communes, permettent,
à mon sens, de progresser.
Cette volonté de rééquilibrer, de réorienter la politique européenne anime le Gouvernement depuis dix-neuf mois. Nous
voulons une Europe sociale, dont la priorité est la lutte pour l'emploi, qui vise à éviter le dumping social ainsi que les
concurrences fiscales déloyales.
Nous voulons une Europe capable de fédérer de grands projets industriels et technologiques. Nous voulons une Europe
solidaire.
L'Europe politique que vous appelez de vos voeux, monsieur Baylet, est aussi une Europe capable de s'exprimer d'une
même voix sur la scène internationale dans l'ordre monétaire - nous avons présenté à cet égard des propositions à nos
partenaires en vue de la reconstruction d'un système monétaire international digne de ce nom - mais aussi dans l'ordre
commercial alors que, l'an prochain, s'ouvriront de nouvelles grandes négociations multilatérales.
Naturellement, cela suppose aussi que des progrès soient faits dans le domaine de la politique étrangère et de la
sécurité commune. De ce point de vue, le traité d'Amsterdam, dont la ratification s'est engagée, nous dotera
d'instruments nouveaux. (M. Hamel se récrie.)
De ce point de vue, il nous faudra réussir la réforme institutionnelle, qui est un préalable au nouvel élargissement de
l'Union européenne avec des institutions plus efficaces et plus crédibles, avec une plus grande transparence et une plus
grande démocratie dans la prise de décisions, avec une prise en compte plus attentive des besoins réels de nos
concitoyens.
Vous avez également évoqué, monsieur Baylet, la politique agricole commune qui est évidemment un tout autre sujet,
mais qui vous tient à coeur. Aussi, je vous confirme ici que, pour le Gouvernement mais aussi pour le Président de la
République, car nous mènerons les négociations de l'Agenda 2000 de concert, la politique agricole commune est un
acquis historique de la construction européenne qu'il n'est pas question de laisser mettre en danger.
Nous voulons défendre un modèle agricole européen. Nous acceptons des aménagements dans la maîtrise des
dépenses mais nous refusons le cofinancement, la renationalisation de la politique agricole commune.
Prise en compte de la multifonctionnalité de l'agriculture, en termes à la fois d'emplois et de développement rural,
maintien de la vocation productive de notre agriculture : tels sont les principes qui nous guideront. Ils figurent déjà dans
le projet de loi d'orientation agricole que le Gouvernement a présenté aux suffrages de la représentation nationale.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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