Question de M. MATHIEU Serge (Rhône - RI) publiée le 18/03/1999

M. Serge Mathieu appelle l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur son projet de loi " portant création d'une couverture maladie universelle " (CMU). Il convient de rappeler qu'il existe, actuellement, 150 000 personnes, résidant en France, exclues de la couverture de base de la sécurité sociale. Par ailleurs, 6 millions de personnes n'ont pas de couverture complémentaire, soit 10 % de la population. Cette couverture complémentaire représente un coût global de 9 milliards de francs. Mais le projet actuel est à la source de trois confusions : de financement, de responsabilité et d'institution. En effet, pour les bénéficiaires de la CMU, l'Etat est en concurrence avec les assureurs complémentaires. Il délègue la gestion des risques, qu'il prend en charge, aux caisses primaires d'assurance maladie et le financement global est du ressort d'un fonds public partiellement alimenté par une taxe à la charge des organismes complémentaires. On peut s'étonner que ce projet se substitue au dispositif préconisé par M. Jean-Claude Boulard auquel le Premier ministre avait pourtant confié la mission d'élaborer les modalités pratiques de mise en oeuvre de la CMU, en étroite association avec les acteurs de l'assurance complémentaire. Ceux-ci s'étaient accordés, à la fois sur la définition de l'ensemble des prestations qui devaient être offertes dans le cadre de cette nouvelle garantie, sur un mécanisme de solvabilisation (une allocation personnalisée santé) et sur les modalités d'accès, chaque personne pouvant s'adresser à l'assureur complémentaire de son choix, se voyant reconnaître un droit à l'accès à l'assurance complémentaire comme n'importe quel autre individu, dans le respect de la structure de notre protection sociale. On comprend, dans ces conditions, que le conseil d'administration de la CNAM (Caisse nationale d'assurance maladie), tout en se prononçant, à la majorité, pour le projet de la CMU, a proposé un protocole d'accord aux organismes d'assurance complémentaire, dans un esprit de partenariat (11 février 1999). Par ailleurs, le Conseil national des assurances, légalement saisi pour avis, a rendu un avis négatif sur le projet actuel. Nombreux sont ceux qui estiment que le projet gouvernemental, par sa complexité, risque de rendre plus difficile la mise en place de la CMU et de créer des problèmes institutionnels inextricables. Aussi exprime-t-il le souhait qu'il soit tenu compte, effectivement, des travaux de la mission Boulard, de la concertation alors menée et des propositions constructives faites par tous les organismes d'assurances complémentaires.

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Réponse du ministère : Emploi publiée le 18/01/2001

Réponse. - Le programme de prévention et de lutte contre les exclusions du 4 mars 1998 soulignait la situation inacceptable à laquelle étaient confrontées de nombreuses personnes du fait de la précarité de leurs conditions de vie. L'égalité d'accès aux soins était remise en cause car 150 000 à 200 000 personnes étaient privées de toute couverture maladie ou renonçaient à faire valoir leur droit. Par ailleurs, le coût d'une protection complémentaire empêchait une partie des ménages aux revenus les plus modestes de se doter d'une protection complète. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a engagé et mené à terme une réforme d'ampleur qui a abouti au vote par le Parlement de la loi nº 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle. Désormais, toute personne qui ne peut relever d'un régime d'assurance maladie à titre professionnel ou au titre d'un avantage social autre que le revenu minimum d'insertion, dès lors qu'elle réside de manière stable et régulière sur le territoire national, est immédiatement affiliée au régime général. Le régime de l'assurance personnelle aux modalités complexes a été supprimé. La loi précitée prévoit également, au bénéfice des personnes répondant à une condition de ressources, la prise en charge du ticket modérateur, du forfait journalier ainsi que des modalités de remboursement adaptées pour les prothèses, notamment en matière dentaire et optique sans qu'elles aient à faire l'avance des frais. Les bénéficiaires peuvent, selon leur choix, obtenir cette couverture complémentaire auprès de leur caisse d'assurance maladie ou auprès d'un organisme de protection complémentaire (mutuelle, société d'assurance, institution de prévoyance). Quel que soit le choix effectué par le bénéficiaire, la couverture est identique. En offrant cette possibilité de choix aux bénéficiaires, le Gouvernement a souhaité prendre en compte la diversité de leurs situations. Les bénéficiaires de la couverture maladie universelle bénéficient ainsi d'une prise en charge selon le droit commun dans toute la mesure du possible afin, notamment, d'éviter la démutualisation ou la rupture de contrats d'assurance. Il est également tenu compte des personnes qui ne peuvent ou ne souhaitent pas assumer cette démarche auprès des organismes complémentaires, en demandant aux CPAM de gérer cette nouvelle prestation pour le compte de l'Etat. La possibilité d'opter entre les deux modalités, au choix des intéressés, ne constitue pas un facteur de complexité mais conforte l'efficacité du dispositif en apportant la garantie qu'il s'adapte aux besoins des bénéficiaires. Ainsi, la couverture maladie universelle va bien au-delà de la simple solvabilisation des populations en difficultés : elle constitue une véritable prestation de solidarité nationale, distincte des remboursements de sécurité sociale et destinée à permettre à ces personnes d'accéder effectivement aux soins.

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