Question de M. PEYRONNET Jean-Claude (Haute-Vienne - SOC) publiée le 19/11/1999

M. Jean-Claude Peyronnet attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les adhésions par les collectivités locales à des associations. En vertu du Code Général des Collectivités Territoriales, les collectivités règlent par leurs délibérations les affaires de leur ressort (art. L. 2121-29 pour les communes, L. 3211-1 pour les départements, L. 4221-1 pour les régions). Alors que les départements et les régions ont des compétences largement spécialisées, le conseil municipal détient une compétence de droit commun. Pour autant, la limite à l'action d'une collectivité reste l'intérêt local dans le respect de la compétence des autres collectivités. Cette notion d'intérêt local ne reçoit cependant pas de définition précise et il appartient à la collectivité de décider, sous le contrôle du juge administratif, si telle affaire relève de ses attributions. Cette situation est particulièrement vraie pour les communes. Une difficulté apparaît lorsque, par délibération, une collectivité décide d'adhérer à une association. En effet, alors que l'octroi de subventions à une association est strictement encadrée par le juge administratif, l'adhésion ne fait pas l'objet de jurisprudence fournie. Le problème s'accroît lorsque la collectivité souhaite adhérer à une association dont l'objet dépasse l'intérêt local : le contrôle de légalité alors opéré par le représentant de l'Etat dans le département risque de s'appuyer plus sur des questions d'opportunité que de légalité. C'est ainsi qu'en Haute-Vienne, la commune d'Aixe-sur-Vienne a adhéré à l'association ATTAC (Association pour la Taxation des Transactions Financières pour l'aide aux citoyens). Le préfet a alors fait part de ses doutes quant à la satisfaction d'un intérêt communal par cette adhésion et a demandé au maire d'indiquer en quoi cette dernière répondait à cette satisfaction. La limite entre la légalité et l'opportunité devient ténue. En conséquence, il souhaiterait savoir dans quelle mesure une collectivité peut adhérer à une association loi de 1901 à vocation nationale ou internationale. La vocation nationale ou internationale de l'association ne peut-elle pour la commune avoir un intérêt local ?

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Réponse du ministère : Outre-mer publiée le 22/12/1999

Réponse apportée en séance publique le 21/12/1999

M. Jean-Claude Peyronnet. Ma question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur, mais je ne doute pas que M.
Queyranne, fin connaisseur des collectivités locales, me répondra parfaitement à sa place.
A partir d'un fait précis, ma question concerne un très vaste débat que nous ne conclurons certainement pas
aujourd'hui, puisqu'il s'agit de la liberté des collectivités locales.
En vertu du code général des collectivités territoriales, les collectivités règlent par leurs délibérations les affaires de leur
ressort. Je vous fais grâce de la lecture des articles du code qui régissent la matière. Pour autant, la limite à l'action
d'une collectivité reste l'intérêt local dans le respect de la compétence des autres collectivités. Cette notion d'intérêt
local ne reçoit cependant pas de définition précise et il appartient à la collectivité de décider, sous le contrôle du juge
administratif, si telle affaire relève de ses attributions. Cette situation est particulièrement vraie pour les communes, et il
n'y a là rien d'anormal.
Toutefois, une difficulté apparaît lorsque, par délibération, une collectivité décide d'adhérer à une association. En effet,
alors que l'octroi de subventions à une association est strictement encadré par le juge administratif, l'adhésion ne fait
pas l'objet d'une jurisprudence fournie.
Le problème s'accroît lorsque la collectivité souhaite adhérer à une association dont l'objet dépasse l'intérêt local : le
contrôle de légalité alors opéré par le représentant de l'Etat dans le département risque de s'appuyer sur des questions
plus d'opportunité que de légalité.
C'est ainsi qu'en Haute-Vienne la commune d'Aixe-sur-Vienne a adhéré à l'association ATTAC, l'association pour la
taxation des transactions financières pour l'aide aux citoyens. Le préfet a alors fait part de ses doutes quant à la
satisfaction d'un intérêt communal pour cette adhésion et a demandé au maire d'indiquer en quoi cette dernière
répondait à ce critère. La limite entre la légalité et l'opportunité devient alors très ténue.
En conséquence, je souhaiterais savoir dans quelle mesure une collectivité peut adhérer à une association type loi de
1901 à vocation nationale ou internationale. En d'autres termes, la vocation nationale ou internationale de l'association
ne peut-elle présenter, pour la commune, un intérêt local ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer. La loi du 1er juillet 1901 a instauré un régime de liberté
d'association que le Conseil constitutionnel a rangé au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la
République.
Si le juge administratif a eu l'occasion de se prononcer sur l'intérêt local s'attachant à l'octroi, par une commune, d'une
subvention à une association, il n'existe en revanche ni texte ni jurisprudence relatifs à l'adhésion des collectivités
locales aux associations. Dans le cadre du principe de libre administration des collectivités locales, également reconnu
par la Constitution, il appartient donc au conseil municipal d'apprécier l'intérêt qu'une adhésion à une association
présente pour la commune et ses habitants.
Dans le cas évoqué, celui de l'adhésion d'une commune à une association dont l'objet est d'intervenir dans le débat
public sur les effets de la mondialisation financière, la question de savoir si cette adhésion présente ou non un intérêt
pour la commune est plus politique que juridique. Il appartient donc au maire et aux conseillers municipaux de justifier
cette décision devant leurs concitoyens, dans le cadre du débat démocratique local. Mais il est bien évident que
l'exercice de cette liberté d'administration se fait sous le contrôle du juge et que les recours sont toujours possibles.
Monsieur le président, vous êtes sénateur-maire de Marseille, et vous savez que, pour ce qui est des décisions
politiques du conseil municipal, il n'existe pas de règles précises. Mais cela correspond aux deux principes que sont la
liberté d'association et la libre administration des collectivités locales.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je me garderai bien de rouvrir le débat après une réponse aussi balancée de M. le
secrétaire d'Etat. (Sourires.) Effectivement, même si la liberté des communes est reconnue, je conçois bien qu'elle ne
puisse s'exercer que sous le contrôle du juge administratif.
La responsabilité politique étant affirmée très nettement par M. le secrétaire d'Etat, j'ai toute satisfaction, car c'est la
réponse que j'attendais.

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