Question de M. BIZET Jean (Manche - RPR) publiée le 07/04/2000

Question posée en séance publique le 06/04/2000

M. le président. La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le ministre, voilà quelques mois vous déclariez : « La baisse des prélèvements doit toucher l'ensemble des
tranches pour éviter une fuite de la matière fiscale. Il convient de poursuivre les baisses de TVA, en particulier en
matière de restauration. »
M. René-Pierre Signé. Qui l'avait augmentée ? Juppé !
M. Jean Bizet. Or, les annonces fiscales du Premier ministre ne rejoignent pas vos propositions. En matière d'impôt
sur le revenu, seules les deux premières tranches d'imposition sont concernées. Pour la TVA, chacun sait qu'une
baisse du taux à 19,6 % sera peu ou ne sera pas répercutée sur les consommateurs. Il suffit de regarder le prix de
l'essence...
N'y a-t-il pas là une contradiction ?
Vous avez également déclaré : « Si l'on veut qu'une réduction du déficit se réalise, comme cela est nécessaire, et que
les prélèvements obligatoires soient moins lourds, il faut être très attentif à la maîtrise des dépenses publiques. »
Nous avons défendu les mêmes positions lors de l'examen du dernier budget et le Gouvernement n'a pas souhaité nous
suivre. Vous avez sans doute noté qu'aucun des 50 milliards de francs de recettes supplémentaires pour 2000 ne sera
affecté à la baisse du déficit mais que 10 milliards de francs de nouvelles dépenses ont été annoncées.
N'y a-t-il pas là aussi une contradiction ?
Je citerai une autre de vos déclarations sur les retraites : « Il faut assouplir le régime des retraites, complété par
l'épargne partenariale, et abonder le fond de réserve grâce, notamment, à la cession d'actifs comme France Télécom. »
Contrairement à vous, le Premier ministre a rappelé le 21 mars dernier son opposition absolue à tout système de
retraite par capitalisation, que de nombreux Français appellent pourtant de leurs voeux. Pour les cessions d'actions
France Télécom appartenant à l'Etat, je crains qu'il n'y ait quelque difficulté de compréhension entre vous et vos amis
communistes.
N'y a-t-il pas là encore contradiction ?
En clair, le nouveau ministre de l'économie, des finances et de l'industrie s'est-il rallié à l'immobilisme du Premier
ministre, ou bien l'ancien président de l'Assemblée nationale a-t-il conservé sa liberté de penser et sa volonté d'agir ?
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, et de l'Union centriste.)
M. Claude Estier. Ridicule !

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Réponse du ministère : Économie publiée le 07/04/2000

Réponse apportée en séance publique le 06/04/2000

M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Avant de répondre rapidement à la question
judicieuse qui m'est posée, je voudrais présenter par avance mes excuses au président Lambert. En effet, je ne pourrai
malheureusement pas assister au débat sur sa question orale car je reçois tout à l'heure les organisations syndicales
de mon ministère. C'est donc, avec sa compétence habituelle, M. Pierret qui me suppléera.
Monsieur le sénateur, je ne pourrai pas être très exhaustif s'agissant de votre question sur les retraites. Mais je pourrai
m'y attarder plus longuement à l'occasion d'une autre question, un autre jour, si vous le voulez bien.
Cela étant, en matière de retraites, il n'y a bien évidemment pas contradiction entre les orientations du Premier ministre
et ce que j'ai pu déclarer.
S'agissant de la maîtrise des dépenses, je vous confirme qu'elle est nécessaire parce qu'on ne peut pas souhaiter
réduire les déficits, alléger les prélèvements obligatoires, comme c'est notre ambition, sans mener dans le même
temps une politique de maîtrise stricte des dépenses. (Applaudissements sur certaines travées du RPR.)
Il est vrai que nous avons enregistré des surplus - je refuse le mot de « cagnotte » pour des raisons que j'ai expliquées
tout récemment à vos collègues de l'Assemblée nationale - s'élevant à 50 milliards de francs. Nous avons consacré
dans le collectif - vous en serez saisis - 10 milliards de francs à des dépenses nécessaires, ne serait-ce que pour
réparer les dégâts causés par la tempête, puis à des allégements d'impôts.
Je vous précise, ou je vous apprends - je ne sais pas exactement ce qu'il faut dire - que si - ce qui est fort possible -
nous avons, compte tenu de la forte croissance liée à nos bons résultats, de nouveaux surplus en fin d'année, nous les
affecterons à la réduction du déficit. (Très bien ! sur certaines travées du RPR.)
En effet, lorsqu'on compare notre situation avec celle d'autres pays, il est vrai que nous constatons une amélioration,
mais, en matière de déficit, nous avons encore du chemin à faire. (Applaudissements sur certaines travées du RPR.)
En ce qui concerne l'impôt sur le revenu, vous êtes suffisamment averti des mécanismes fiscaux pour ne pas dire - je
l'espère tout au moins - que l'abaissement ne concernera que les deux premières tranches du barème de l'impôt sur le
revenu. En effet, lorsqu'on abaisse les deux premières tranches de l'impôt sur le revenu, cela profite à l'ensemble de
ceux qui acquittent l'impôt sur le revenu.
Enfin, en ce qui concerne la TVA, j'ai repris les chiffres, et ils sont assez intéressants. Nous avons, dans un premier
temps, opéré toute une série d'allégements de TVA ciblés, que vous avez d'ailleurs sans doute votés, qui se sont élevés
à près de 30 milliards de francs. Et nous venons de décider de réduire d'un point la TVA, ce qui coûte, pour une année
pleine, 30 à 31 milliards de francs. Avec ces deux séries de mesures très importantes, nous aurons ainsi à peu près
effacé les deux points supplémentaires que la majorité précédente avait instaurés en 1995.
M. Serge Vinçour Il faut payer les dettes !
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le fond de votre question, c'est qu'il pourrait
y avoir une contradiction entre les positions du Premier ministre et les miennes. Je ne pense pas du tout que ce soit le
cas.
J'ajoute pour terminer que nous avons considéré l'un et l'autre - et cela peut valoir d'une façon générale - que ce n'est
pas en agitant les querelles du passé que l'on résout les problèmes de l'avenir. (Applaudissements sur les travées
socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - M. Machet applaudit également.)
M. René-Pierre Signé. Vous pouvez en tirer des leçons pour la mairie de Paris !
M. le président. Monsieur Signé, s'il vous plaît !

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