Question de M. de ROHAN Josselin (Morbihan - RPR) publiée le 10/05/2000

M. Josselin de Rohan interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les raisons qui ont conduit l'Etat français à exclure les ports bretons, et notamment le port de Brest, des propositions présentées lors des conseils transport des 9 et 10 décembre 1999 et du 28 mars 2000 relatifs au projet de réseau transeuropéen de fret ferroviaire.

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Réponse du ministère : Tourisme publiée le 14/06/2000

Réponse apportée en séance publique le 13/06/2000

M. le président. La parole est à M. de Rohan, auteur de la question n° 809, adressée à M. le ministre de l'équipement,
des transports et du logement.
M. Josselin de Rohan. Lors du Conseil européen « transport » des 9 et 10 décembre 1999, quatre projets de directive
ont été adoptés afin de redynamiser le secteur ferroviaire européen.
Cette initiative, issue d'un accord politique unanime, définit notamment un réseau transeuropéen de fret ferroviaire qui
devrait permettre aux entreprises ferroviaires de l'Union européenne d'avoir accès à ce réseau pour exploiter des
services de fret ferroviaire au sein de la Communauté.
Le Conseil européen « transport » du 28 mars 2000 a confirmé ces propositions, qui non seulement visent à revitaliser
les chemins de fer européens pour le transport de marchandises, mais s'inscrivent aussi dans le cadre du
développement du territoire.
Or, lors de ces deux Conseils européens, l'Etat français a exclu les ports bretons, notamment le port de Brest, du futur
réseau transeuropéen de fret ferroviaire, ce qui nuit au renforcement de la compétitivité du territoire et impose une
contrainte sur les liaisons directes de nos régions avec les grands pôles de développement internationaux.
Pis encore, cette décision tire un trait sur un enjeu fondamental pour nos ports bretons : être reliés à l'axe économique
majeur qui est en cours de restructuration en Europe centrale, entre Rotterdam et les ports de la mer Noire.
Alors que tous les grands ports européens développent des plans ambitieux d'expansion visant à rendre opérationnels
des centres d'éclatement mondial de marchandises par la construction de terminaux spécialisés et automatisés et à
garantir la qualité des liaisons entre les ports principaux ainsi que les zones industrielles européennes, cette décision
arbitraire pousse à la marginalisation de notre région par rapport au coeur économique européen et met en péril la
compétitivité de nos ports, notamment celle du port de Brest, qui pourrait être un véritable pôle de création de
richesses.
En conséquence, quelles sont les raisons qui ont conduit l'Etat français à exclure les ports bretons du réseau
transeuropéen de fret ferroviaire ?
Quelles sont les raisons qui ont conduit le Gouvernement à maintenir un modèle unipolaire au lieu de retenir un modèle
multipolaire valorisant au maximum la position centrale de la France en Europe ?
Alors que, lors du sommet européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000, le Gouvernement a souhaité accélérer la
libéralisation, notamment dans le secteur des transports, quelles sont les raisons qui ont conduit le ministre de
l'équipement, des transports et du logement à fragiliser l'avenir des ports bretons face à des concurrents européens et
mondiaux de plus en plus compétitifs ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, comme je l'ai indiqué à vos collègues,
M. Gayssot n'a pu être présent ce matin au Sénat et il m'a demandé de vous communiquer la réponse qu'il a préparée à
votre intention.
Le réseau transeuropéen de fret ferroviaire, appelé aussi RTEFF, est partie intégrante de ce qu'on appelle le « paquet
ferroviaire » qui englobe des projets de modification de la directive n° 91/440 relative au développement des chemins de
fer communautaires et des directives associées.
Vous savez très certainement que le principe de ce réseau transeuropéen de fret ferroviaire a été retenu, au nom du
Gouvernement français, sur proposition de M. Gayssot, lors du Conseil européen des ministres des transports du 6
octobre dernier.
L'objectif est de permettre un véritable développement du fret ferroviaire international et européen. Les entreprises
ferroviaires de l'Union européenne titulaires d'une licence pourront offrir des services de fret internationaux sur les lignes
constituant ce réseau, quel que soit le mode d'exploitation retenu.
Ces services pourront, par ailleurs, être étendus au-delà des limites de chacune des lignes du RTEFF, c'est-à-dire aux
lignes d'accès, soit sur un trajet de 50 kilomètres, soit sur une distance couvrant 20 % de la longueur du parcours total
d'un convoi, la plus longue des deux distances étant retenue.
Les possibilités d'utiliser ce réseau sont donc relativement larges, même pour les points qu'il ne recouvre pas.
La mise au point effective du RTEFF est intervenue lors du Conseil européen des ministres des 9 et 10 décembre 1999,
après de longues négociations. M. Gayssot a en effet particulièrement insisté pour que sa mise en place s'accompagne
d'importants efforts d'amélioration en matière d'interopérabilité des infrastructures et pour résorber les goulets
d'étranglement.
Dans le cadre de ce compromis, les lignes ferroviaires constituant ce réseau ont été retenues en tenant compte des
niveaux de trafics de fret qu'elles étaient susceptibles de supporter dans de bonnes conditions ainsi que des flux
susceptibles d'être générés.
Sans préjuger les ajustements qui pourraient être opérés par le Parlement européen, qui examine actuellement les
projets de directives en question, il va bien évidemment de soi que la consistance du RTEFF pourra évoluer afin de tenir
compte des évolutions de trafic et des besoins constatés.
En tout état de cause et quelles qu'en soient les modalités, M. Gayssot est, vous le savez, particulièrement attentif à la
qualité des dessertes ferroviaires offertes par la SNCF aux ports de commerce en général, et à celui de Brest en
particulier.
M. Josselin de Rohan. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. de Rohan.
M. Josselin de Rohan. Madame le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, mais je dois constater que
nous en sommes au même point : le RTEFF ne desservira pas la péninsule bretonne et l'extrême Ouest.
Or vous venez de nous dire - à juste raison - que l'avantage de ce RTEFF était d'ouvrir le réseau ferroviaire français à
plusieurs opérateurs et d'assurer une certaine concurrence entre eux, ce qui améliorerait la qualité du service et
stimulerait une entreprise qui dispose pour l'instant d'un monopole.
Par ailleurs, vous nous dites que les lignes qui peuvent accueillir des débits nouveaux auront accès au RTEFF. Or nous
pourrions parfaitement accueillir des services supplémentaires sur nos réseaux, même si, j'en conviens, nous devons
développer davantage nos services de fret ferroviaire en Bretagne. C'est bien d'ailleurs pourquoi, madame le secrétaire
d'Etat, nous demandons la réalisation rapide du TGV Ouest, qui nous permettrait de dégager la voie classique pour
accueillir le fret ferroviaire.
Le fond du problème, je crois, c'est que le Gouvernement adopte, en matière de fret ferroviaire, la même attitude qu'en
matière de gaz et d'électricité : il s'agit de verrouiller le marché au profit d'une entreprise, au demeurant parfaitement
respectable, et de limiter les conséquences de la concurrence que les traités de Rome et de Maastricht veulent
instituer.
C'est un mauvais service qui nous est rendu et, en tout cas, je constate qu'une fois de plus les régions de l'Ouest sont
« périphéricisées », marginalisées. Cela montre, à mon avis, que l'Ouest n'est plus une priorité pour l'aménagement du
territoire aux yeux du Gouvernement.

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