Question de M. BONY Marcel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 03/10/2000

M. Marcel Bony interroge M. le ministre de l'intérieur sur la création d'emplois fonctionnels au sein des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ruraux. Il résulte en effet du décret nº 2000-485 du 2 juin 2000 que désormais les EPCI sont classés dans une strate de population en fonction de leur population intercommunale cumulée. Ce système simple, calqué sur celui des communes, demeure assorti d'un seuil : au moins 20 000 habitants pour la création d'emplois fonctionnels. Ce seuil introduit une différence de situation pénalisante pour l'intercommunalité rurale ou semi-rurale. C'est encore plus sensible lorsqu'il s'agit d'un EPCI " à vocation touristique " dont certaines communes membres sont surclassées et ont droit aux emplois fonctionnels. Face à l'extension des responsabilités des EPCI, il lui demande pourquoi une telle distinction a été privilégiée et comment valoriser la coopération intercommunale fortement intégrée dans ces conditions. N'est-il pas envisageable d'abaisser ce seuil comme cela avait été annoncé ? N'est-il pas au moins concevable que le surclassement des communes soit pris en compte au titre de l'intercommunalité ?

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Transmise au ministère : Fonction publique


Réponse du ministère : Intérieur publiée le 25/10/2000

Réponse apportée en séance publique le 24/10/2000

M. le président. La parole est à M. Bony, auteur de la question n° 891, tranmsise à M. le
ministre de l'intérieur.
M. Marcel Bony. Monsieur le ministre, le décret n° 2000-485 du 2 juin 2000 introduit un
progrès dans le classement des EPCI, les établissements publics de coopération
intercommunale : la simplicité. Le régime antérieur prévoyait en effet un classement en fonction
de trois critères cumulatifs : les compétences de l'établissement, l'importance de son budget, le
nombre et la qualification des agents.
C'est désormais le même régime que celui des communes qui s'applique, sauf en ce qui
concerne les seuils à partir desquels les nominations sur emplois fonctionnels sont possibles.
Pour les communes, le seuil est bas. En revanche, en fonction du mode de calcul antérieur, il
est de 20 000 habitants pour les EPCI.
Ce seuil pénalise l'intercommunalité rurale ou semi-rurale et ne correspond pas à la réalité du
terrain : nous savons bien que la coopération intercommunale rurale est aussi complexe, aussi
lourde que celle de la ville. Il faut donc dépasser ce clivage qui ne concorde plus avec l'actualité
du développement local.
Lorsqu'on ajoute à cela la problématique des stations surclassées, la situation devient
difficilement lisible.
Je connais, dans le Puy-de-Dôme, une communauté composée d'une dizaine de communes,
dont les trois principales sont des stations touristiques et thermales surclassées.
Ces trois communes ont, chacune, créé l'emploi fonctionnel de directeur général des services.
Elles en ont besoin. Leur budget et leur personnel sont importants. Leur gestion est très lourde.
Elles ont, comme les autres, délégué des compétences essentielles à la communauté de
communes, qui a choisi l'intégration fiscale pour mettre en oeuvre une intercommunalité de
projet dynamique.
Or, la communauté de communes ne peut pas, elle, créer d'emplois fonctionnels parce que le
surclassement ne lui serait pas transposable. Quel développement lui est promis dans ces
conditions ? Quelle est cette logique qui implique qu'on admette le surclassement pour
l'administration des communes et qu'on ne le leur reconnaisse plus à l'échelon surpracommunal
?
Monsieur le ministre, ma question est double : envisagez-vous d'abaisser le seuil de création
des emplois fonctionnels pour les EPCI, comme cela avait été annoncé, et prévoyez-vous de
prendre en compte le surclassement des communes au titre de l'intercommunalité ?
J'ajoute que l'esprit de cette question semble en phase avec les préoccupations de la
commission Mauroy puisque la proposition n° 125, rendue publique il y a quelques jours, vise à
« la suppression des seuils démographiques pour le recrutement des personnels de la fonction
publique territoriale ».
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, le Gouvernement a engagé
voilà près de deux ans une réflexion, en liaison avec les différents acteurs concernés, sur les
seuils de création de certains grades ou emplois dans la fonction publique territoriale.
A l'issue de cette réflexion, il s'avère que, dans son principe, le système des seuils
démographiques encadrant l'accès aux grades et emplois supérieurs demeure un instrument
utile à la fois pour garantir, concernant ces emplois, un niveau de recrutement élevé et pour
favoriser la mobilité, même s'il appelle des adaptations.
Ce sont de telles adaptations que le Gouvernement a souhaité retenir pour mieux répondre aux
besoins des établissements publics de coopération intercommunale et traduire les objectifs de
développement et de valorisation des EPCI intégrés à fiscalité propre, définis par la loi du 12
juillet 1999. En ce sens, ont été successivement publiés deux décrets, en juin, puis en
septembre derniers, pour permettre aux EPCI de disposer plus facilement qu'auparavant de
cadres plus qualifiés, qu'il s'agisse du régime des emplois fonctionnels ou des possibilités de
nomination à des grades plus élevés.
Le décret du 2 juin 2000 a tout d'abord introduit de nouvelles règles d'assimilation entre un EPCI
à fiscalité propre et une commune d'une strate donnée, pour déterminer s'il y a application des
règles relatives aux emplois fonctionnels de direction ; les anciens critères ont été remplacés
par un critère simple et unique : leur population regroupée.
Il est vrai que le seuil préexistant, qui détermine la fonctionnalité des emplois de direction dans
les EPCI, soit 20 000 habitants, est demeuré inchangé. Le maintien de ce seuil est cohérent
avec le maintien d'un seuil de fonctionnalité de l'emploi de directeur général des services d'une
commune : il répond à la nécessité d'atteindre un volume minimal justifiant, sur le plan
démographique et, par conséquent, sur le plan des charges et responsabilités en résultant, le
niveau d'emploi des personnels de direction.
Mais le changement introduit par le décret du 2 juin 2000 n'en est pas moins essentiel. Alors
que la très grande majorité des communautés de communes et des districts en était exclue, le
nouveau dispositif permet désormais à beaucoup d'EPCI à fiscalité propre de relever d'emblée
du régime des emplois fonctionnels. Il s'inscrit parfaitement dans le cadre des objectifs
poursuivis par la loi du 12 juillet 1999, consistant à développer la coopération intercommunale
fortement intégrée tout en encourageant des regroupements aussi larges et cohérents que
possible, tant en milieu urbain qu'en milieu rural.
Un EPCI qui se situe en dessous du seuil de 20 000 habitants n'est pas, pour autant, dépourvu
de possibilités. Il peut confier les fonctions de directeur, au titre des missions de son grade, à
un fonctionnaire relevant du cadre d'emplois des attachés territoriaux, tout en s'appuyant sur les
nouvelles possibilités offertes par un décret du 22 septembre 2000.
A titre d'exemple, une communauté de communes de 10 000 habitants peut désormais créer le
grade d'attaché principal et confier à l'intéressé la direction de ses services.
S'agissant, par ailleurs, du « surclassement » démographique dont peuvent faire l'objet des
communes classées stations - en matière de tourisme par exemple -, il faut rappeler que
l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique territoriale réserve ce dispositif aux seules communes, sans en tirer des
conséquences sur le calcul de la population d'un EPCI regroupant, le cas échéant, des
communes surclassées démographiquement.
En toute hypothèse, le surclassement d'une commune se traduit par une assimilation à la «
tranche » supérieure et non par l'attribution d'un chiffre de population déterminé. Il serait donc
techniquement très difficile de le prendre en compte pour établir la population de l'EPCI incluant
une telle commune.
En conclusion, monsieur le sénateur, les évolutions récentes en matière de seuils
démographiques applicables aux emplois de direction et d'encadrement des EPCI les plus
intégrés traduisent, dès à présent, un effort très significatif pour valoriser ces emplois et faciliter
le recrutement des personnels concernés ; elles constituent donc des étapes importantes du
développement de la coopération intercommunale.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments de réponse que je pouvais apporter à votre
importante question.
M. Marcel Bony. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Bony.
M. Marcel Bony. Monsieur le ministre, votre réponse ouvre la voie à une certaine évolution,
mais celle-ci paraît mesurée.
Je vous remercie d'avoir insisté sur l'importance du développement local et sur la nécessité de
faire avancer la décentralisation, mais j'espérais que vous prendriez en compte la proposition de
notre collègue M. Mauroy.

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