Question de M. CHARASSE Michel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 02/11/2000

M. Michel Charasse rappelle à M. le ministre de l'éducation nationale qu'aux termes de la législation en vigueur depuis le XIXe siècle, les communes sont tenues, en ce qui concerne l'enseignement élémentaire et préélémentaire, d'assumer les dépenses de construction et d'entretien des locaux scolaires, de chauffage et d'éclairage, de logement des enseignants ayants-droit et de petites fournitures scolaires, les dépenses d'enseignement les plus lourdes, et notamment celles relatives à la rémunération des personnels enseignants, relevant de l'Etat. Or, depuis plusieurs années, et de plus en plus au cours de la période la plus récente, l'Etat a modifié les programmes scolaires afin de donner une place croissante aux techniques modernes, notamment l'informatique et l'utilisation d'Internet. Mais l'Etat ne s'est pas préoccupé du financement de ces réformes, et aucune aide n'a été allouée aux communes et aux groupements qui assument la responsabilité dans le domaine élémentaire et préélémentaire. Or, les décisions prises jusqu'à présent et celles annoncées tous les jours conduisent les communes et les groupements à assumer les dépenses croissantes non seulement pour l'achat, le renouvellement et l'entretien des matériels informatiques et pour les dépenses de télécommunications qui leur sont liées, mais aussi pour aménager les locaux désormais indispensables pour entreposer un matériel volumineux et encombrant qui, autrefois, tenait sans problème dans les classes. Il est donc évident qu'en imposant par voie réglementaire des dépenses nouvelles aux collectivités locales, l'Etat va très au-delà des obligations qui découlent de la loi, tandis que de nombreuses communes et groupements ne peuvent plus faire face aux demandes répétées et croissantes des services académiques. Certes, et sans même se pencher sur l'utilité pédagogique de ce nouveau type d'enseignement, qui donne un accès au savoir sans commentaire et sans apprendre aux enfants à analyser et à comprendre, malgré les efforts des maîtres qui ont de moins en moins le temps d'enseigner, en raison du volume croissant d'heures consacrées à " jouer " avec l'ordinateur, les communes et leurs groupements pourraient envisager de réduire leurs achats en livres et cahiers puisque l'ordinateur conduit les enfants à lire et à écrire de moins en moins. Mais la réduction des achats de ces menues fournitures ne saurait compenser les charges, énormes pour certaines communes, engendrées par le tout informatique à l'école. Dans ces conditions, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître, s'il estime que désormais l'école doit se consacrer de plus en plus à l'informatique et de moins en moins à l'irremplaçable intervention des enseignants qui peuvent seuls, par l'analyse et le commentaire, apprendre aux enfants à réfléchir et à comprendre, quelles mesures il compte prendre pour que l'Etat assume pleinement les charges financières de la pédagogie dont il est seul responsable, ces charges concernant non seulement le matériel, mais aussi l'extension des locaux scolaires.

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Réponse du ministère : Éducation publiée le 28/02/2002

La généralisation de l'usage des technologies de l'information et de la communication dans les pratiques pédagogiques de tous les niveaux d'enseignement est une des priorités du gouvernement. Les objectifs en ont été fixés notamment dans le programme d'action gouvernemental pour l'entrée de la France dans la société de l'information de janvier 1998 et par les relevés de conclusion des conseils interministériels sur la société de l'information (CISI) de juillet 1999 et juillet 2000. Dans ce cadre, la responsabilité du système éducatif consiste à préparer tous les élèves à la société de l'information et de la communication qui se met en place et dans laquelle ils seront appelés à vivre et à travailler, et à former des citoyens avertis du bon usage des machines et des réseaux, sachant percevoir les enjeux sociaux des utilisations de l'informatique et leurs conséquences sur les droits et les libertés des personnes. Si la répartition des rôles entre l'Etat, les communes, les départements et les régions dans le domaine des dépenses pédagogiques demeure définies par la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983, la perspective d'une connexion à Internet de la totalité des écoles avant la fin de l'année scolaire 2002 (conférence de presse du ministre de l'éducation nationale du 20 juin 2000) peut constituer une charge trop lourde pour certaines communes. La nécessité de leur apporter un soutien privilégié a été reconnue et a guidé la mise en oeuvre de dispositifs spécifiques. C'est ainsi que des mesures de " discrimination positive " ont été prise dans la répartition des crédits pour les écoles des zones sensibles ou de grande ruralité ou pour aider les municipalités en grande difficulté. Ainsi près de 45,73 millions d'euros ont été délégués aux académies en 2000, comme en 2001 pour aider au développement des projets pédagogiques et au développement des équipements et des réseaux. Dans ce cadre, l'accent a particulièrement été mis, en lien avec les collectivités locales, sur l'aide aux écoles non encore connectées (équipement multimédia, connection à l'Internet, ressources pédagogiques). Plusieurs dispositifs (comme la possibilité d'utiliser la dotation globale d'équipement, par exemple), venant en complément de ces budgets de l'éducation nationale, ont également pu être sollicités afin d'appuyer l'effort des collectivités locales. le CISI du 10 juillet 2000 a en particulier décidé la mobilisation de financements prélevés sur le fonds national d'aménagement et de développement du territoire, en lien avec le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement (DATAR). Pour mémoire, les appels à projets menés conjointement par le ministère de l'éducation nationale et la DATAR avaient déjà permis la mobilisation de 2,29 millions d'euros en 1998, pour le financement de 153 projets impliquant 2 500 écoles et établissements scolaires situés en zone de reconversion industrielle et en zone rurale, et de 3,05 millions d'euros en 1999, pour un appui à plus du 500 projets d'aide à la connexion dans près de 5 000 écoles. De plus, un fonds de soutien de 76,22 millions d'euros a été ouvert en 1998 pour soutenir l'effort d'équipement informatique des collectivités locales au bénéfice des projets pédagogiques des établissements scolaires, en particulier ceux situés dans les zones sensibles ou rurales. Les prêts étaient accordés à taux zéro sur une durée pouvant aller jusqu'à douze ans pour réaliser des travaux de câblage ou de mise en réseau interne (les modalités de la mise en oeuvre du fonds on été précisées par la circulaire n° 98-133 du 22 juillet 1998 et par la circulaire n° 98-202 du 14 octobre 1998). Le fonds a été sollicité par les collectivités territoriales pour environ 38,11 millions d'euros. Le dispositif a permis d'accélérer de façon importante le développement de la mise en réseau et du câblage dans les écoles et les établissements scolaires, en ancrant ce développement dans la constitution de projets pédagogiques associant les collectivités et les acteurs du système éducatif. L'extension du champ d'application du fonds en septembre 1999, donnant la possibilité d'asscocier aux travaux de câblage et de mise en réseau interne la constitution d'un réseau de postes multimédias communicants dans les écoles, a permis de répondre à une véritable attente des communes. En ce qui concerne l'utilisation pédagogique des technologies de l'information et de la communication, on assiste à une progressive généralisation des usages et à l'émergence de pratiques nouvelles liées à la disponibilité des réseaux, comme en témoignent les très nombreux exemples qu'on peut découvrir notamment sur les site Educnet, à l'adresse : http://www.educnet.education.fr/pilotes/default.htm. Le réseau est utilisé, par exemple, pour mutualiser les ressources des bibliothèques-centres de documentation ou des centres de documentation et d'information et pour étendre la recherche documentaire aux ressources du monde entier (sites archéologiques, banques textuelles, images satellitales, etc.), transformant les conditions mêmes de l'enseignement. L'accès aux réseaux facilite aussi la mise en place d'une pédagogie centrée sur les projet des élèves, exploitant les possibilités de coopération entre classes et entre établissements, et faisant largement appel à la publication des production des élèves sur les sites des établissements. Les technologies de communication servent encore de vecteur au désenclavement géographique et culturel ; le courrier électronique, la visioconférence sont utilisés pour rompre l'isolement des classes rurales ou pour échapper à l'enfermement dans certains quartiers difficiles : présentation et échanges de leurs productions par les élèves, mise en placede travaux en coopération, etc. Ces échanges prolongent, en les facilitant, des pratiques pédagogiques antérieures au développement d'Internet (utilisation du minitel ou du fax). Ces pratiques nouvelles permettent d'intégrer aux renseignements traditionnels l'acquisition par les élèves de compétences liées aux technologies de l'information et de la communication. Ces compétences seront attestées par un brevet informatique et Internet, généralisé à l'ensemble des écoles en 2003. Parmi ces compétences figure notamment la capacité pour l'élève à adopter une attitude citoyenne face aux informations véhiculées par les outils informatiques. Les élèves sont amenées à réfléchir et à comprendre pour appréhender les conséquences sociales de l'utilisation de l'ordinateur, pour connaître les règles établissant le respect de la propriété intellectuelle, pour prendre l'habitude de s'interroger sur la pertinence et sur la validité des résultats produits par le traitement informatique des données, en adoptant une approche critique des informations disponibles sur les réseaux. Dans cette perspective, le rôle de l'enseignant, bien loin de s'affaiblir, garde au contraire son caractère primordial.

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