Question de M. HAMEL Emmanuel (Rhône - RPR) publiée le 29/03/2001

M. Emmanuel Hamel attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'information parue à la page 7 du numéro 50 (juillet-août 2000) du Courrier de la chancellerie, revue de son ministère, selon laquelle " en Allemagne une expérience est menée pour permettre à l'enfant de vivre avec sa mère (incarcérée) jusqu'à 6 ans, à l'écart de la prison dans une unité pénitentiaire ouverte ". Il lui demande quel est son avis sur cette expérience et aimerait savoir si la France entend suivre un tel exemple.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 18/10/2001

La garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire que la circulaire du 16 août 1999, relative aux conditions d'accueil des enfants laissés auprès de leur mère incarcérée, consacre le principe de la limite d'aâge de dix-huit mois (article D.401 du code de la procédure pénale). En février 1991, le ministère des affaires sociales a confié à l'inspection générale des affaires sociales une mission d'évaluation des conditions d'accueil des enfants en milieu pénitentiaire et sollicité d'elle des propositions. A la suite de ce rapport, un groupe de travail a été chargé par le directeur de l'administration pénitentiaire d'apporter des améliorations sur les conditions d'accueil de ces enfants. Cette réflexion a été menée conjointement avec le ministère des affaires sociales, de la santé et de la ville. Elle s'est appuyée sur des expériences de collaboration déjà conduites par les services des conseils généraux et certains établissements pénitentiaires. Ces travaux ont associé des médecins, des psychologues, des magistrats ainsi que des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire. En 1993, le groupe de travail interdisciplinaire, déposait ses conclusions sur les conditions d'accueil des enfants laissés auprès de leur mère incarcérée, en application des articles D. 401 à D. 401-1 du code de procédure pénale. Les travaux ont donné lieu à la rédaction de la circulaire du 16 août 1999, élaborée avec le concours de la direction de l'action sociale et la direction générale de la santé. La circulaire pose le principe que le maintien en détention au-delà de dix-huit mois demeure exceptionnel. Afin d'éviter une séparation trop brutale, le départ de l'enfant doit être préparé conjointement entre la mère et le service pénitentiaire d'insertion et de probation au plus tard lorsque l'enfant atteint l'âge d'un an. Une commission consultative constituée auprès de chaque direction régionale des services pénitentiaires examine la demande de prolongation. Présidée par le directeur régional, elle se compose d'un médecin psychiatre, d'un médecin pédiatre appartenant à un service de protection maternelle et infantile, d'un psychologue, d'un chef d'établissement spécialement affecté à la détention des femmes et d'un travailleur social. La circulaire de 1999 organise également une progressivité dans la séparation, afin d'éviter qu'une rupture trop violente n'entraîne des processus d'abandon de la part de la mère. Cette innovation consiste à permettre à l'enfant dans les six mois qui suivent son départ, à pouvoir venir séjourner pour de courtes périodes auprès de sa mère au sein de l'établissement pénitentiaire. Les modalités de ce retour sont fixées par écrit. La limite de dix-huit mois a été adoptée en 1946. Auparavant les enfants pouvaient demeurer jusqu'à l'âge de quatre ans auprès de leur mère (décret-loi de 1923). Après étude comparée des systèmes pénitentiaires étrangers, l'âge de dix-huit mois se situe dans une moyenne raisonnable entre les pays qui limitent à la période d'allaitement la présence de l'enfant auprès de sa mère (neuf mois en Grande-Bretagne) et ceux qui organisent son éducation en prison (six ans en Allemagne). Dans les cas d'hébergement prolongé des enfants en détention, il apparaît que la détention représente un inconvénient considérable pour les enfants de plus de trois ans. En outre le développement psychomoteur de l'enfant connaît un moment charnière vers l'âge de dix-huit mois. Au-delà de dix-huit mois un enfant marche bien, court et a besoin d'espace. C'est également la période où les relations avec la mère deviennent singulières et où l'enfant s'écarte de cette dernière dans le cadre de sa construction identitaire. Dès lors, il est apparu à l'administration pénitentiaire, à la suite des conclusions formulées par le groupe de travail, que la limite de dix-huit mois constituait le moins mauvais choix possible. La question portant la possibilité d'envisager un droit plus large, pour la femme détenue, de garder son enfant en bas âge auprès d'elle est actuellement examinée dans le cadre de l'élaboration du projet de loi pénitentiaire. Enfin, conformément aux dispositions de la loi du 15 juin 2000, renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, le placement en détention provisoire ou la prolongation de celle-ci, d'une personne faisant connaître qu'elle exerce l'autorité parentale sur un enfant de moins de dix ans ne peut être ordonnée sans qu'aient été recherchées au préalable les mesures propres à éviter la détention. S'agissant des dispositions relatives à l'exécution des peines, la libération conditionnelle peut-être accordée pout toute personne condamnée à une peine privative de liberté inférieure ou égale à quatre ans, ou pour laquelle la durée de la peine restant à subir est inférieure ou égale à quatre ans, lorsque cette personne condamnée exerce l'autorité parentale sur un enfant de moins de dix ans ayant chez ce parent sa résidence habituelle.

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