Question de M. RAFFARIN Jean-Pierre (Vienne - RI) publiée le 21/06/2001

M. Jean-Pierre Raffarin attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation sur les très vives préoccupations exprimées par la grande majorité des 290 000 entreprises de l'alimentation de détail quant à l'obligation prochaine du passage aux 35 heures. Ce secteur compte 1 200 000 personnes au travail dont 850 000 salariés et 50 000 apprentis. La situation au regard des 35 heures est particulièrement préoccupante. La boucherie, par exemple, n'a pas pu signer d'accord faute d'avoir trouvé des solutions effectivement applicables et ceci pour plusieurs raisons : les entreprises des métiers de boucherie comptent en moyenne 3 salariés. Cette réalité rend inopérante les dispositifs d'aide à la réduction du temps de travail ; les marges d'action en termes de réorganisation de ces entreprises sont souvent inexistantes. Leur petite taille et la diversité des postes de travail au sein de la même entreprise permettent rarement de dégager un nombre d'heures suffisant pour créer un emploi même à temps partiel ; la création de la valeur ajoutée dans les métiers de boucherie dépend uniquement de la main-d'oeuvre. Le temps passé pour découper une viande demeure le même depuis des années dans l'artisanat ; ces métiers rencontrent des difficultés de recrutement. Chacun s'accorde sur le constat que ces difficultés de recrutement sont structurelles. Malgré les efforts et la bonne volonté du plus grand nombre, il apparaît clairement aujourd'hui que la grande majorité de ces entreprises seront dans l'illégalité à compter du 1er janvier 2002. A cette date, ces chefs d'entreprise seront non seulement confrontés à la mise en application des 35 heures mais également au passage à l'euro. Il est urgent de prendre la mesure de la situation de cette majorité de petites entreprises qui ne peuvent trouver de solution pour passer aux 35 heures. Quelles sont les intentions du Gouvernement sur ce dossier ?

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Réponse du ministère : Petites et moyennes entreprises publiée le 23/08/2001

La première loi du 13 juin 1998 a pris en compte les difficultés particulières du passage aux 35 heures dans les petites entreprises, notamment en accordant un délai supplémentaire de préparation de deux ans aux entreprises de moins de 20 salariés. La seconde loi du 19 janvier 2000, relative à la réduction négociée du temps de travail, a également prévu plusieurs dispositions transitoires pour faciliter l'adaptation des entreprises à la nouvelle durée légale. Elles concernent principalement le régime des heures supplémentaires, puisqu'un taux réduit de majoration est prévu pendant un an ainsi qu'une progressivité dans les modalités de décompte du contingent pendant deux ans. La Confédération générale de l'alimentation en détail (CGAD) propose une augmentation du contingent d'heures supplémentaires. Le passage aux 35 heures engendrant de fait quatre heures supplémentaires par semaine pour les entreprises voulant rester à 39 heures, le simple statu quo supposerait que le contingent d'heures supplémentaires soit porté à 188 heures (47 semaines x 4 heures). L'objectif de la loi étant de réduire la durée du temps de travail pour favoriser la création d'emplois, c'est volontairement que le contingent annuel d'heures supplémentaires, effectuées sans autorisation de l'inspection du travail, a été maintenu, l'année dernière, par décret, à 130 heures par salarié. Cette contrainte est néanmoins sensiblement atténuée par une autre disposition de la loi, qui prévoit déjà un décompte favorable des heures supplémentaires contingentées. La première année suivant l'abaissement de la durée légale du travail à 35 heures, elles sont comptées à partir de 37 heures par semaine ; la deuxième année, à partir de 36 heures. Ce n'est qu'ensuite qu'elles seront comptées à partir de 35 heures, soit à partir du 1er janvier 2002 pour les entreprises de plus de 20 salariés et à partir du 1er janvier 2004 pour celles de 20 salariés et moins. De surcroît, ce volume de 130 heures, fixé par décret, peut être porté à un niveau supérieur par une convention ou un accord collectif étendu, mais les heures effectuées au-delà de ce contingent doivent donner lieu à un repos compensateur obligatoire, ce qui en limite l'intérêt dans les secteurs qui connaissent des difficultés de recrutement ou des problèmes spécifiques. Dans ce cas, le Gouvernement souhaite adopter, secteur par secteur, et à la demande des partenaires sociaux, des mesures d'accompagnement adaptées, comme il l'a déjà fait pour les transporteurs routiers, les marins pêcheurs et les ambulanciers, et comme il va le faire pour les hôtels, cafés et restaurants, à la suite de l'accord de branche signé le 15 juin dernier. En effet, le passage aux 35 heures dans les très petites entreprises dont le personnel exerce des missions non interchangeables ne permet pas toujours une ou plusieurs embauches compensatrices. En revanche, la réduction du temps de travail dans ces entreprises sera facilitée par la grande souplesse dans l'organisation du travail prévue par la loi. Des formes nouvelles de répartition et d'aménagement du temps de travail peuvent, en effet, être mises en place telles que la modulation des horaires sur tout ou partie de l'année, l'individualisation des horaires, la possibilité d'organiser la réduction du temps de travail sous forme de journées ou de demi-journées de repos ou le travail intermittent. La réorganisation du temps de travail permet également, dans la plupart des cas, d'augmenter la capacité de production. Pour faciliter ces réorganisations, le dispositif d'appui-conseil à la réduction du temps de travail vient d'être adapté aux besoins des petites entreprises. Le décret n° 2001-526 du 14 juin 2001 s'adresse en priorité aux entreprises de 20 salariés et moins ; il prévoit l'intervention de consultants compétents en matière d'aide à l'aménagement et à la réduction du temps de travail et aux réorganisations du temps de travail qui y sont associées, dont le coût est pris en charge en totalité ou partiellement par l'Etat. Par ailleurs, les difficultés de recrutement du secteur sont structurelles. Elles ont été prises en compte dans le cadre d'une convention Etat-UPA-CGAD signée le 29 septembre 1999, qui a pour objectif de mieux utiliser les procédures gérées par le ministère de l'emploi et de la solidarité et ainsi favoriser le recrutement et la formation des personnels des PME. Pour la CGAD, ces difficultés sont liées aux conditions de travail difficiles, aux durées de travail excessives qui incitent les jeunes à se détourner de certains de ses métiers. Aussi, la réduction du temps de travail dans ces secteurs apparaît-elle comme une des conditions de la revalorisation de leur image et de leur attractivité.

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