Question de M. PLANCADE Jean-Pierre (Haute-Garonne - SOC) publiée le 01/08/2002

M. Jean-Pierre Plancade appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'extraction des détenus vers des centres médicaux ou hospitaliers. Cette mission incombant depuis le 1er février 2002 à l'administration pénitentiaire, celui-ci lui rappelle que si la création de 415 emplois doit permettre le transfert de cette charge, la totalité de ces emplois n'est pas encore créée, ce qui n'est pas sans causer de réelles difficultés aux établissements pénitentiaires. Il lui demande si, pour tenir compte de ces difficultés, les juges d'application des peines ne pourraient pas délivrer aux détenus permissionnaires des titres de sortie médicale sans accompagnement. Cette mesure irait dans le sens souhaitable d'un renforcement d'une pénalité caractérisée par la réinsertion ; en effet, ce principe serait une mise à l'épreuve supplémentaire aux détenus déjà permissionnaires. Par ailleurs, cette mesure permettrait également une meilleure organisation des personnels dans les établissements pénitentiaires.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 06/11/2003

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le 6 décembre 1999, le conseil de sécurité intérieure a décidé qu'au 1er janvier 2002, les escortes des détenus consultants médicaux, seraient assurées en totalité par la direction de l'administration pénitentiaire sous réserve des détenus dangereux qui continueraient à être escortés par les forces de l'ordre. Il convient de souligner que cette décision vise exclusivement les escortes de détenus conduits à l'hôpital pour consultation et ne s'applique pas aux mouvements de détenus vers l'hôpital pour hospitalisation. Elle ne supprime pas non plus la possibilité de demander à l'autorité préfectorale de renforcer l'escorte pénitentiaire par des forces de l'ordre lorsque la personnalité et la dangerosité du détenu le justifient. Enfin, les dispositions confiant la garde des détenus hospitalisés aux forces de l'ordre (art. D. 394 du CPP) ne sont pas remises en cause par la décision du CSI et demeurent donc applicables. La décision du CSI, relative aux consultations, n'a toutefois pu recevoir une application complète au 1er janvier 2002, puisque la réserve du relevé de décision de ce comité qui mentionne " la création de 415 emplois à la direction de l'administration pénitentiaire " n'a pu être levée, seulement 50 emplois étant créés en 2002 à ce titre sur le budget du ministère de la justice, et 53 pour l'année 2003. Néanmoins, à l'heure actuelle, plus de 80 % des mouvements de détenus vers les hôpitaux sont pris en charge par l'administration pénitentiaire ; ce pourcentage augmentant progressivement à la suite des créations d'emplois prévues à ce titre par les lois de finances. Aller au-delà, dans la prise en charge par l'administration pénitentiaire de détenus se trouvant hors d'un établissement pénitentiaire, en confiant au personnel de surveillance des compétences de sécurité publique jusque-là dévolues aux forces de l'ordre, nécessiterait la création d'un nombre très important d'emplois et supposerait de modifier les règles applicables aux fonctionnaires pénitentiaires, lesquels demeurent actuellement sans armes pour toute sortie extra-muros. Un groupe de travail interministériel (inspection générale de l'administration, inspection générale de la police nationale, inspection générale des services judiciaires et inspection générale de la gendarmerie nationale) mis en place en octobre 2002 a cependant pour double mission, d'une part d'établir un constat et d'évaluer les implications d'un transfert de la charge des extractions médicales et judiciaires actuellement assurées par l'administration pénitentiaire, la police et la gendarmerie nationale, vers la première citée, et d'autre part d'analyser les mesures envisageables afin de réduire le nombre des extractions. Concernant par ailleurs la possibilité de permission de sortir pour raison médicale, il convient de relever que lorsque la personne remplit les conditions juridiques de l'article D. 143 du CPP, il peut lui être accordé, en application du 3°, une permission de sortir pour " se présenter à un centre de soins ". Il s'agit le plus souvent de permissions de sortir destinées à préparer la sortie ou un aménagement de peine, afin d'initier une démarche de soins ou de mettre en oeuvre une continuité des soins, par exemple, dans le cadre de la prise en charge sanitaire des personnes dépendantes à des substances psychoactives, ou du suivi médico-psychologique des auteurs d'infractions sexuelles. La présentation à un centre de soins doit être distinguée des consultations médicales spécialisées, réalisées dans les hôpitaux de proximité, sous forme d'extraction médicale. En effet, il n'est pas opportun d'étendre les permissions de sortir aux consultations médicales à caractère somatique pour plusieurs raisons : il s'agirait là d'une dénaturation de la décision judiciaire, alors détournée de son objet de réinsertion dans le seul but de faciliter le fonctionnement des hôpitaux ; cela porterait, en outre, atteinte au principe de la gratuité des soins pour les personnes détenues, dès lors qu'elles devraient assumer les frais de transport pour se rendre à la consultation ; enfin, l'état de santé de la personne détenue peut être compatible, ou non, avec une telle permission ; le secret professionnel médical ne permet au médecin intervenant en milieu pénitentiaire que d'émettre un avis sur la compatibilité de l'état de santé de la personne avec une permission de sortir. Or, les médecins ne sont pas tenus d'émettre cet avis, et lorsqu'ils en formulent un, ils ne doivent pas l'argumenter. Se poserait alors la question de l'imputation de la responsabilité dans l'hypothèse d'un accident survenu à la suite d'un malaise d'une personne détenue, se rendant seule à une consultation médicale, dans le cadre d'une permission de sortie accordée par le juge de l'application des peines, avec ou sans avis médical.

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