Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UC) publiée le 01/08/2002

M. Philippe Richert attire l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur le rapport du professeur Pierre Pradier sur la santé en milieu carcéral, et notamment sur le cas des malades mentaux. Selon le professeur Pradier en effet, en raison de l'attitude des hôpitaux psychiatriques, qui refusent de plus en plus souvent, au nom d'une éthique qui leur appartient, de recevoir des malades très sévèrement atteints, la prison (est) devenue le seul lieu d'accueil pour un nombre croissant de psychotiques. Or, dans ces prisons, la situation de la psychiatrie serait accablante. Les pathologies seraient traitées de manière tout à fait légère, quand elles ne seraient pas totalement occultées, provoquant dans certains cas ce que le docteur Pradier qualifie de " désastre psychiatrique ". Ces déficiences mentales étant, selon lui, souvent à l'origine des délits ou crimes pour lesquels ces individus ont été condamnés, elles sont susceptibles, faute de soins, d'annihiler toute chance de réinsertion. Il souhaiterait connaître ses observations sur ce rapport et les suites qui y ont été données. Il lui demande, en particulier, si le Gouvernement a envisagé de se pencher sur la question de l'accueil des malades mentaux sévèrement atteints dans des structures médicales adaptées à leur cas.

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Réponse du Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées publiée le 29/05/2003

A la suite des rapports parlementaires de juin et juillet 2000 consacrés à l'état des prisons en France, l'inspection générale des affaires sociales et l'inspection des services judiciaires ont évalué l'organisation des soins apportés aux personnes détenues depuis la loi de 1994 qui a transféré la responsabilité de ces soins au système hospitalier. Le rapport des inspections générales, tout comme celui des parlementaires ainsi que celui du professeur Pradier, ont mis l'accent sur l'importance des troubles mentaux dont souffrent les personnes détenues et l'impérieuse nécessité que les soins apportés à ces personnes soient de qualité équivalente à ceux offerts à la population générale. La prévalence de ces troubles parmi les entrants en détention, évaluée en 1997 entre 25 % à 30 %, a été estimée par une autre étude menée en juin 2001 à un entrant en prison sur deux. Cette dernière étude a néanmoins été réalisée dans une partie seulement des établissements pénitentiaires français, ceux disposant d'un service médico-psychologique régional (SMPR). Elle démontre qu'entre 20 % et 33 % des entrants dans ces établissements ont fait l'objet d'un suivi antérieur par le dispositif de soins psychiatriques. En outre, la prévalence des psychoses qui constituent des pathologies mentales graves a été évaluée à 8 % à 9 % des entrants. Face à l'importance de ces besoins, les SMPR, tout comme les secteurs de psychiatrie qui interviennent dans les établissements pénitentiaires non dotés de SMPR, rencontrent de grandes difficultés dans la prise en charge des personnes détenues malades, notamment lorsqu'elles requièrent une hospitalisation complète. Les personnels de l'administration pénitentiaire se sentent en outre démunis face à certains comportements qu'ils ne comprennent pas et qu'ils assimilent souvent à des troubles mentaux, alors qu'il peut s'agir dans un certain nombre de cas de troubles du comportement réactionnels à l'incarcération et à l'inactivité qui en découle. En conséquence, un groupe de travail interministériel composé de professionnels des champs sanitaire et pénitentiaire a été réuni en 2001 et 2002 afin de définir les voies d'amélioration de la prise en charge de la santé mentale des personnes détenues, tant en milieu pénitentiaire, par la nécessaire promotion de la santé mentale et la diversification des activités, qu'en milieu hospitalier pour une prise en charge adaptée. Une attention particulière a également été portée à la continuité des soins à l'issue de l'incarcération afin de favoriser la réinsertion des personnes sortant de prison. Une partie des préconisations du groupe de travail a été à l'origine des dispositions de l'article 48 de la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice : il est prévu désormais que les personnes détenues, dont les troubles mentaux nécessitent une hospitalisation, seront, à l'issue d'une période transitoire, hospitalisées exclusivement en établissement de santé dans des unités spécialement aménagées et selon les mêmes modalités que la population générale.

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