Question de M. VALLET André (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 23/10/2002

M. André Vallet attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur l'inadéquation du seuil de 5 000 habitants pour la mise en oeuvre des schémas départementaux d'accueil des gens du voyage à la situation de nombreuses communes rurales. Il lui rappelle que la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 impose aux communes de plus de 5 000 habitants l'implantation sur leur territoire d'un terrain d'accueil pour les gens du voyage, et que cette obligation est souvent très lourde pour les petites communes rurales. Il lui indique que la localisation géographique de ce terrain est souvent délicate car il doit satisfaire à d'élémentaires conditions d'hygiène et de sécurité, et que, dans les petites communes rurales, la mise à disposition de terrains répondant à ces critères n'est souvent pas possible. Il lui indique également que la capacité d'accueil dans les écoles de la plupart des communes ne permet pas la scolarisation dans de bonnes conditions de tous les enfants des gens du voyage. De même, seule la présence d'une gendarmerie permet de " limiter les conflits générés par la présence des gens du voyage, souvent anarchique et conflictuelle ", objectif fixé par la loi. Dès lors, s'il apparaît que la présence d'une gendarmerie est indispensable pour l'encadrement des aires d'accueil et de stationnement des gens du voyage, toutes les petites communes rurales ne bénéficient pas de cette présence. Il lui précise enfin que les finances communales ne peuvent souvent pas permettre de financer l'installation et d'assurer le fonctionnement d'une aire de stationnement des gens du voyage, sans que ce coût n'ait de graves répercussions sur la vie de toute la population de la commune. Il estime que le seuil des 5 000 habitants n'est pas adapté à la situation, et qu'il devrait être substantiellement relevé. Dès lors, il lui demande si le Gouvernement envisage des solutions alternatives à l'installation d'aires de stationnement des gens du voyage sur le territoire des petites communes.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux transports et à la mer publiée le 20/11/2002

Réponse apportée en séance publique le 19/11/2002

M. le président. La parole est à M. André Vallet, auteur de la question n° 66, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. André Vallet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je souhaite revenir sur un débat que nous avons eu lors de l'examen du projet de loi pour la sécurité intérieure : il s'agit du problème de l'aménagement des aires d'accueil pour les gens du voyage.
Les dispositions en vigueur sont difficilement applicables. Aussi, le Gouvernement va-t-il les modifier et présenter au Parlement d'autres mesures afin de mettre un terme à un certain nombre d'incohérences ?
Les petites communes, celles dont la population est supérieure au seuil de 5 000 habitants, rencontrent d'importantes difficultés. En effet, la loi leur impose de créer une aire d'accueil pour les gens du voyage. Très souvent, cette obligation est lourde pour les communes rurales. En effet, il faut un terrain. Or, pour une commune de quelque 5 000 habitants, il n'est pas aisé de trouver un terrain permettant de réunir les conditions nécessaires d'hygiène et de sécurité. Il arrive souvent que la mise à disposition d'un terrain répondant à ces critères ne soit pas possible.
Pour les écoles des petites communes se pose un problème considérable lorsqu'elles voient arriver trente enfants des gens du voyage qu'il leur faut accueillir, alors que, le plus souvent, elles sont déjà surchargées.
Par ailleurs, aux termes de la loi actuelle, la gendarmerie est nécessaire « pour limiter les conflits générés par la présence des gens du voyage, souvent anarchique et conflictuelle ». Alors que la présence de la gendarmerie, paraît nécessaire, toutes les communes de 5 000 habitants n'en sont pas dotées, ce qui entrave l'application de la loi.
S'agissant des finances locales, l'Etat annonce une aide de 70 % pour ces aires et a évalué le prix d'une place à 100 000 francs. Or toutes les études qui ont été réalisées dans mon département montrent que le coût avoisine les 200 000 francs. L'aide de l'Etat n'est donc en réalité que de 35 %
Le dernier point que je voulais évoquer concerne la cohérence de cette loi. Dans mon département, les Bouches-du-Rhône, certaines communes de 5 000 habitants se voient exiger cinquante places, alors qu'on ne demande que soixante places à une commune de 133 000 habitants. Il y a là une situation anormale, qui, selon moi, devrait être corrigée. J'ai bon espoir que le Gouvernement y parvienne.
M. Auguste Cazalet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser l'absence du ministre de l'intérieur qui participe, comme M. Gilles de Robien, à une réunion sur l'avenir de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Si j'avais eu l'honneur et le plaisir de siéger dans votre Haute Assemblée, j'aurais certainement posé la même question que vous. En effet, jusqu'à mon entrée au Gouvernement, j'ai été maire d'une commune d'environ 5 000 habitants, de surcroît située dans une zone touristique. Je sais donc à quel point le problème que vous évoquez est fortement ressenti par de nombreux maires.
La loi Besson, à laquelle vous avez fait allusion, sera très vraisemblablement revue. En effet, le seuil de 5 000 habitants pour l'implantation d'aires d'accueil pour les gens du voyage génère un certain nombre de difficultés. Tout d'abord, un schéma départemental d'accueil des gens du voyage doit être élaboré en concertation avec tous les élus locaux. Dans certains départements, dont le vôtre, ce schéma est en cours d'élaboration ; dans d'autres, cette élaboration vient à peine de commencer et on est très loin du résultat.
Permettez-moi de dire un mot de votre département, les Bouches-du-Rhône, monsieur le sénateur. La concertation y est en cours. Votre département fait partie des départements dans lesquels les choses se font. En mars 2002, le préfet a adressé à tous les élus une première proposition, pour connaître vos observations et vos contre-propositions. Une réunion s'est tenue en octobre avec l'Association des maires et avec les sous-préfets. Ces derniers vont rencontrer maintenant tous les élus concernés dans les différents arrondissements. J'espère que ce dialogue sera fructueux.
Il est également possible de confier la responsabilité de l'accueil des gens du voyage aux intercommunalités - un certain nombre d'entre elles ont pris en charge cette compétence - et de faire jouer les solidarités territoriales au sein d'une intercommunalité.
Ces schémas sont donc impératifs pour régler les difficultés que pose l'implantation sauvage. Vous avez rappelé, à juste titre, que M. le ministre de l'intérieur a l'intention de proposer des dispositions spécifiques et très précises pour lutter contre les implantations sauvages, avec la possibilité de les réprimer par la loi.
Il est vrai que certaines choses ne vont pas. Vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur : les aides sont jugées très souvent insuffisantes par les élus locaux. Par ailleurs, ce n'est pas parce que l'aire existe que les moyens d'expulsion sont donnés par le préfet. Parfois, les élus locaux ont le sentiment d'avoir dépensé de l'argent pour créer une aire d'accueil, d'assurer les frais de fonctionnement, sans avoir la possibilité de recourir à l'expulsion quand cela ne se passe pas convenablement.
Se pose également le problème scolaire, sur lequel vous avez attiré notre attention et qu'il faudra bien sûr résoudre. M. de Robien m'a demandé de vous indiquer qu'il a proposé, dans le cadre du futur plan de lutte contre les exclusions qui sera présenté par Mme Versini au mois de décembre, des aides actives pour une politique d'incitation à la sédentarisation. Cette mesure pourrait permettre une meilleure insertion des gens du voyage et, si possible, comme vous l'avez souhaité, une meilleure scolarisation de leurs enfants.
Aux yeux du Gouvernement, c'est donc la loi Besson dans son ensemble qui doit être revue, pour tenir compte des difficultés que vous avez indiquées à l'instant, monsieur le sénateur. Sachez que le Gouvernement est très conscient des problèmes que rencontrent les maires de France. Durant leur congrès, qui s'ouvre aujourd'hui, ils vont les rappeler à haute voix. Je vous remercie d'avoir posé cette question, qui nous permettra d'avancer s'agissant des dispositifs d'amélioration de l'ensemble de cette loi.
M. le président. La parole est à M. André Vallet.
M. André Vallet. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse. L'annonce de la révision de cette loi réjouira tous les maires qui éprouvent des difficultés pour implanter ces aires d'accueil. Comme la plupart d'entre eux l'ont compris, il est nécessaire d'aménager des aires pour l'accueil des gens du voyage. Dans mon esprit, il n'est pas question de revenir sur ce point.
Selon moi, la loi est mal faite, et c'est elle qui doit être aménagée et corrigée dans le sens que vous avez indiqué tout à l'heure. A mon avis, il conviendrait de retenir le seuil de 10 000 habitants par communauté de communes ou par commune ; il ne faut pas descendre en deçà.

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