Question de M. ROUJAS Gérard (Haute-Garonne - SOC) publiée le 10/12/2002

M. Gérard Roujas tient à attirer l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur l'accord conclu par la Commission européenne dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, notamment en ce qui concerne l'efficacité du nouveau régime douanier céréalier dont l'entrée en vigueur est prévue pour le 1er janvier 2003. Pour le blé tendre, cet accord prévoit un régime différent en fonction de la qualité, pour le blé dit de haute qualité, les droits de douane seraient, comme auparavant, nuls, pour le blé tendre dit de moyenne ou basse qualité, les droits de douanes s'élèveraient, hors contingent, à 95 euros par tonne. Dans la réglementation européenne, la haute qualité correspond à 13,3 % de protéine minimum. Or, certains blés venant de l'Est tout en dépassant ce taux sont, en fait, impropres à la meunerie. Par ailleurs, les accords conclus dans le cadre de l'OMC seraient complétés par des accords avec des pays non membres de l'OMC tels que la Russie ou l'Ukraine. Il lui demande de bien vouloir lui préciser quelle est la position de la France quant à un renforcement des critères distinguant les blés de haute qualité des blés de qualité inférieure d'une part, et d'autre part en ce qui concerne d'éventuels accords complémentaires avec la Russie et l'Ukraine.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales publiée le 12/03/2003

Réponse apportée en séance publique le 11/03/2003

M. le président. La parole est à M. Gérard Roujas, auteur de la question n° 118, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

M. Gérard Roujas. Monsieur le ministre, ma question, déposée en 2002, portait sur les accords conclus par la Commission européenne dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce et plus particulièrement sur l'efficacité du régime douanier céréalier devant entrer en vigueur au 1er janvier 2003.

Pour ce qui concerne le blé tendre, les accords prévoyaient un régime douanier différent selon la qualité du produit. Sans changement pour la haute qualité, les droits étaient prévus, hors contingent, à 95 euros par tonne pour la qualité dite moyenne ou basse.

Comme vous le savez, selon la réglementation européenne, la haute qualité correspond à 13,3 % de protéine minimum. Or certains blés venant de l'Est, tout en dépassant ce taux minimum, sont, en fait, impropres à la meunerie.

Par ailleurs, la Commission européenne avait envisagé la signature d'accords complémentaires avec certains pays non membres de l'Organisation mondiale du commerce, comme la Russie et l'Ukraine.

A la veille d'un élargissement européen qui ne sera pas sans conséquences, notamment sur la politique agricole commune (M. Gérard César approuve), je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir apporter toutes les précisions utiles sur ce dossier et nous dire quelle est la position de la France en la matière.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le sénateur, il est tout à fait vrai que, depuis 2001, les céréales à bas prix en provenance de la mer Noire, notamment de Russie et d'Ukraine, ont envahi le marché européen.

Quand nous sommes arrivés aux responsabilités, en mai dernier, j'ai immédiatement été alerté de cette situation. Rien n'avait été fait pour enrayer cette invasion de blés russes et ukrainiens, alors même que nos agriculteurs avaient réalisé des efforts remarquables pour élever la qualité et satisfaire les attentes des consommateurs et que, par ailleurs, l'Union européenne est autosuffisante en céréales.

Dès ma prise de fonctions, j'ai demandé à la Commission européenne de prendre les mesures nécessaires. A l'époque, notre idée était de mettre en place ce que l'on aurait appelé un système de « cotation Odessa » pour que le calcul des droits de douane soit fait de manière plus sincère que par rapport à la cotation « Amérique du Nord ».

A la fin du mois de juillet 2002, nous avons obtenu du conseil des ministres de l'agriculture que mandat soit donné à la Commission pour engager des concertations sur ce dossier. A notre regret, ce n'est pas la méthode de la « cotation Odessa » qui a été retenue. Nous avons cependant obtenu que ce dossier soit pris en main sur la base d'un système de quotas d'importation. A la suite des négociations menées au cours de l'automne dernier, nous avons approuvé, le 21 décembre - juste avant Noël, pendant le « marathon » du Conseil des ministres de la pêche -, l'accord que la Commission nous proposait. Sachez, monsieur le sénateur, qu'il a été obtenu « à l'arraché » et qu'il eût suffi qu'un seul pays change d'avis pour que la minorité de blocage puisse s'exercer et que tous nos efforts soient réduits à néant.

Cet accord est ciblé sur ce qui a posé problème, c'est-à-dire sur les importations de blé tendre de qualité basse et moyenne, désormais limitées à un contingent de 2,9 millions de tonnes. Cela a permis d'endiguer le flot des importations depuis le début de cette année.

Bien évidemment, nous restons très vigilants sur les conditions de mise en oeuvre de ce dispositif, notamment sur les contrôles, car certains pourraient avoir la tentation de réaliser des importations sur la base du régime applicable au blé tendre de haute qualité, qui est plus favorable. La France a donc alerté la Commission sur ce point, et celle-ci a proposé, la semaine dernière, un renforcement des critères de contrôle qui va dans le sens de nos attentes. Il faut que les services de contrôle dans la Communauté soient particulièrement rigoureux en ce domaine. Nous veillerons à ce que la Commission ne baisse pas la garde.

Sur la seconde partie de votre question, la Commission conduit actuellement ce qu'elle appelle des consultations techniques avec l'Ukraine et avec la Russie, qui ne sont pas membres de l'OMC. En tout état de cause, il n'est pas question d'augmenter le volume du contingent fixé pour le blé tendre de basse et de moyenne qualité. Ces pays demandent actuellement à bénéficier d'une part du contingent global, au même titre que d'autres partenaires commerciaux, comme les Etats-Unis et le Canada, qui disposent déjà d'un sous-plafond. Les discussions se poursuivent.

Vous pouvez compter sur notre vigilance, monsieur le sénateur, par rapport au pilotage de ce dossier. Nous savons bien que ce qui s'est passé en 2001 et en 2002 est complètement aberrant, loufoque, même. Alors qu'elle est autosuffisante en matière céréalière, l'Union européenne a en effet importé environ 11 millions de tonnes de céréales, notamment en provenance de Russie et d'Ukraine et, dans le même temps, elle a elle-même exporté des céréales à destination de certains pays dont les récoltes avaient souffert des effets d'El Niño. Nous avons donc pu constater, à cette occasion, que la préférence communautaire n'était plus respectée : nous nous battrons pour qu'elle le soit de nouveau.

M. le président. La parole est à M. Gérard Roujas.

M. Gérard Roujas. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre.

Je souhaite néanmoins réaffirmer la nécessité que les aides soient modulées en fonction de la superficie des exploitations, car il est bien évident que, entre les contraintes liées à l'Organisation mondiale du commerce et les contraintes financières supplémentaires liées à l'élargissement, l'Union européenne devra faire un choix.

Il ne serait en effet pas logique que les exploitations agricoles soient toutes logées à la même enseigne et subissent toutes, de la même manière, les restrictions qui ne manqueront pas d'advenir.

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