Question de M. DELFAU Gérard (Hérault - RDSE) publiée le 16/01/2003

M. Gérard Delfau attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la dégradation rapide du climat qui entoure les institutions composant le pôle financier public et semi-public. Les signaux particulièrement négatifs s'accumulent : le remplacement du directeur de la Caisse des dépôts et consignations, effectué dans des conditions jugées inopportunes ; les déclarations intempestives des dirigeants des caisses d'épargne à propos d'Eulia ; le sort réservé au Crédit foncier en dépit des engagements antérieurs ; les mesures arbitraires et contestées que s'apprête à prendre le gouverneur de la Banque de France ; l'incertitude qui règne autour de la Caisse nationale de prévoyance ; enfin, l'absence de visibilité sur l'avenir des services financiers de La Poste, au moment où le groupe Crédit agricole accélère sa mutation vers une banque privée et ferme plusieurs milliers de bureaux en milieu rural ; la reprise des fermetures de perceptions, y compris dans des communes de 4 à 5000 habitants. L'inquiétude est vive chez les personnels, les élus locaux et les élus nationaux. Il lui demande d'ouvrir un débat national de façon urgente afin d'informer et de consulter le Parlement.

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Réponse du Ministère délégué au commerce extérieur publiée le 26/03/2003

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2003

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, auteur de la question n° 150, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur la dégradation rapide du climat qui entoure les institutions composant le pôle financier public et semi-public. D'ailleurs, cela me fournit déjà une première question : vous-même, retenez-vous cette dénomination ?

Les signaux particulièrement négatifs s'accumulent. Le remplacement du directeur à la tête de la Caisse des dépôts et consignations, dans des conditions jugées inopportunes, a créé une incertitude sur la façon dont la Caisse assumera ses missions d'intérêt général.

L'attitude des dirigeants des caisses d'épargne, à propos de la filiale commune Eulia, a fait craindre une compétition préjudiciable.

Le sort, à terme, de la Caisse nationale de prévoyance, un fleuron de notre patrimoine, reste problématique.

La Poste est entrée dans une période périlleuse ; seuls la signature d'un contrat de plan courageux et un élargissement de la gamme de ses services financiers pourraient assurer une issue positive.

La Banque de France a lancé un plan rigoureux de fermeture de ses succursales, provoquant la mobilisation des élus.

La reprise des fermetures de perceptions, y compris dans des communes de 4 000 à 5 000 habitants, accentue le sentiment d'un désengagement des services publics au profit des grandes villes.

Le Crédit agricole, qui ferme des centaines de bureaux en milieu rural - même dans des communes de 1 500 habitants, comme j'en ai l'exemple dans mon département -, fusionne avec le Crédit lyonnais et s'engage dans un lourd programme de réduction de son réseau, au moins dans un certain nombre de départements.

Devant cette situation, monsieur le ministre, les salariés et les associations d'élus se mobilisent ; les rencontres ministérielles se multiplient, mais sans débouchés, sans mesures concrètes.

Il est temps que le Gouvernement ouvre un débat au Parlement sur la couverture nationale en matière de service public financier et sur le devenir de nos grandes institutions : la Caisse des dépôts et consignations, La Poste, la Caisse nationale de prévoyance et la Caisse d'épargne, notamment.

Un an après l'installation de ce gouvernement, il est temps d'expliquer votre politique, monsieur le ministre, et d'entendre notre point de vue. Il est temps, surtout, de cesser de procéder au coup par coup, de cesser de compenser par des déclarations lénifiantes les mesures de fermeture qui sont effectivement prises sur le terrain.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur Delfau, vous êtes élu d'un département, l'Hérault, extrêmement préoccupé par la situation des services publics et leur avenir. Ces questions inquiètent à juste titre nos concitoyens.

Je note, cependant, que votre question porte principalement sur l'évolution des institutions du secteur financier. Vous m'avez demandé si nous retenions la dénomination de « public et semi-public » pour le pôle financier. Nous considérons, au contraire, que chacune des institutions que vous avez citées a sa dynamique propre et sa problématique propre ; je vais donc vous répondre sur chacune d'entre elles.

S'agissant de la Caisse des dépôts et consignations, le nouveau directeur général a engagé, en concertation avec le Gouvernement et la commission de surveillance de la Caisse, qui est présidée par un parlementaire, en l'occurrence le député Philippe Auberger, une réflexion sur les orientations stratégiques du groupe pour conforter son rôle au service de la collectivité nationale. La Caisse des dépôts exerce ses activités d'intérêt général dans des domaines prioritaires de l'action publique, où ses moyens peuvent compléter utilement l'action de l'Etat.

Je pense notamment à la gestion de fonds qui réclament une protection spécifique, les fonds d'épargne ; je pense aussi à la gestion sous mandat de caisses de retraite publique ou à des programmes d'intérêt général, qui jouent un rôle majeur dans notre économie et notre société.

Cette réflexion sur la clarification des priorités d'action de la Caisse et le prolongement de leur efficacité doit, bien sûr, également porter sur ses interventions dans le secteur concurrentiel. Le Gouvernement procédera à un examen au cas par cas de ces questions, sans dogmatisme et dans le seul souci du développement des différentes entités et activités concernées.

S'agissant de la Banque de France, le gouverneur a, pour sa part, engagé des discussions avec les représentants du personnel et les élus pour préciser son projet d'évolution du réseau, à la suite des études techniques conduites par le secrétaire général de la Banque. Il a précisé, à l'occasion de cette concertation, que cette évolution s'inscrirait dans le cadre départemental et sans aucun licenciement, quel que soit le statut des agents.

Pour garantir l'exercice des missions de service public par les succursales, l'Etat conclura avec la Banque de France un contrat de service public qui précisera les objectifs qui lui sont assignés en matière de service public rendu aux usagers.

Le Gouvernement veillera notamment à ce que la Banque de France joue pleinement son rôle dans la gestion des dossiers de surendettement, sujet sur lequel il y a évidemment beaucoup à faire.

Cette mobilisation au service des missions est compatible avec l'adaptation du réseau. La Banque de France, comme tout organisme public, doit veiller à rendre à la collectivité nationale le meilleur service au meilleur coût.

S'agissant de La Poste, les discussions sur le contrat de plan sont en cours. L'avenir de chacun des trois métiers de La Poste - courrier, colis et services financiers - est examiné dans ce cadre, en tenant compte de l'évolution de l'environnement concurrentiel de La Poste.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, ces différentes réflexions se poursuivent comme il se doit, dans l'intérêt du développement de chacune des institutions concernées et des services qu'elles rendent au public.

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, ma dernière formule était donc particulièrement appropriée pour caractériser l'absence de dialogue ce matin : des déclarations lénifiantes, générales, qui ne correspondent pas aux mesures concrètes prises actuellement, c'est-à-dire les fermetures de services publics sur tout le territoire, avec, pour corollaire, la concentration dans les grandes villes de ce qui reste de l'épine dorsale de notre service public.

M. Raymond Courrière. C'est la décentralisation !

M. Gérard Delfau. Sans doute !

Vous l'avez d'ailleurs vous-même confirmé en reprenant les propos du gouverneur de la Banque de France, puisque vous nous avez expliqué que le réseau de la Banque de France devait désormais se limiter au cadre départemental. Cela signifie concrètement que, par exemple, dans le département de l'Hérault, département très peuplé qui a au moins deux pôles, Montpellier et Béziers, la partie ouest, ou partie biterroise, sera une fois de plus sacrifiée.

S'agissant de La Poste, vous ne m'avez rien dit du contenu du contrat de plan, au moment même où l'on transforme des bureaux de poste de plein exercice en agences communales, malgré le désaccord des élus. Mais je ne vais pas reprendre toute la litanie des griefs.

Non, monsieur le ministre, il s'agit non pas d'une politique nationale assumée mais d'une politique de fermetures que l'on n'ose pas avouer.

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