Question de M. VANTOMME André (Oise - SOC) publiée le 23/01/2003

M. André Vantomme souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur l'outil marketing des " miles aériens ". Créés aux Etats-Unis voilà plus de vingt ans, les " miles aériens ", outil marketing destiné à fidéliser la clientèle des transports aériens, permettent d'obtenir des vols gratuits. Cette pratique a connu un succès énorme avec une progression annuelle de l'ordre de 20 %. Il convient de s'interroger sur la légalité d'un système quand il permet à une personne, différente de celle qui a acquitté le prix des billets, de bénéficier de cette réduction. Peut-on parler d'abus de biens sociaux quand une société commerciale acquitte les frais de déplacement en avion et que, la réduction acquise de par le système des " miles aériens ", bénéficie à une personne, qui en décide de l'usage pour un motif de déplacement qui peut être personnel et sans rapport avec les activités de l'entreprise ? S'agissant d'organismes ou d'institutions publics, n'y a-t-il pas lieu de prendre des dispositions pour éviter que des dépenses de transports aériens acquittées avec de l'argent public génèrent un droit à ristourne destiné à atténuer ou effacer éventuellement le coût de déplacements privés sans rapport avec le service public ?

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Réponse du Ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer publiée le 13/03/2003

La pratique des " miles aériens ", communément appelée par les compagnies aériennes " programme de fidélité ", s'est fortement développée ces dernières années. A chaque vol, un nombre de points est attribué aux adhérents au programme, leur permettant, une fois un certain nombre obtenu, d'effectuer un vol gratuit. Cette pratique peut être d'autant plus intéressante que le bénéfice en est ouvert non seulement à l'adhérent, mais à toute personne de son choix, sur toutes les compagnies membres d'une même alliance. Juridiquement, l'attribution de miles par les compagnies aériennes n'est pas par nature différente des cadeaux ou rabais accordés afin de fidéliser leur clientèle par les commerçants, et notamment les sociétés de vente par correspondance. On peut se demander si cette pratique n'est pas contraire aux règles de la concurrence, dans la mesure où elle incite fortement les passagers à effectuer leurs déplacements avec la même compagnie ou une compagnie membre d'une même alliance. La Commission européenne s'interroge sur l'opportunité de réglementer en ce domaine. En revanche, cette pratique ne constitue pas juridiquement, un abus de bien social, prévu aux articles L. 241-3 et L. 242-6 du code du commerce. Sont passibles de ce délit ceux qui, à des fins personnelles et de mauvaise foi, font un usage des biens d'une société contraire à l'intérêt de celle-ci. Or, ces dispositions ne s'appliquent qu'aux gérants des sociétés à responsabilité limitée et aux dirigeants et administrateurs des sociétés anonymes. En outre, l'élément moral constitutif de l'infraction, à savoir la mauvaise foi, est absent dans l'utilisation des miles. Enfin, il n'y a pas à proprement parler d'usage des biens d'une société puisque, juridiquement les points de fidélité accordés par une compagnie aérienne ne lui appartiennent pas. En effet, les miles, dont l'attribution est un accessoire du contrat de transport appartiennent, non à l'entreprise, mais au salarié. L'employeur, même s'il acquitte le prix de la prestation, n'assure que la représentation du salarié vis-à-vis de la compagnie et n'est pas partie au contrat. De même, les dédommagements pour surréservation, prévus par la réglementation européenne, sont accordés au passager et non à l'entreprise, bien que cette dernière en supporte également les conséquences éventuelles. Toutefois, une entreprise par son règlement intérieur, auquel le salarié a adhéré en signant son contrat de travail, ou l'administration par un acte réglementaire, pourrait imposer à leurs agents l'utilisation des " miles " au profit de l'organisme qui les ont financés. L'expérience montre que très peu d'institutions ont pris une disposition en ce sens. En effet, la possibilité effective d'obtenir des voyages gratuits grâce aux points de fidélité nécessite un recours très fréquent à l'avion, de préférence sur des vols longs courriers. Il est significatif que plus de 50 % des points acquis ne soient jamais utilisés. Dans ces conditions, cet avantage est perçu par les salariés et les employeurs comme la contrepartie des conditions de vie réellement difficiles que connaissent tous les voyageurs à titre professionnel, amenés à supporter les inconvénients liés aux décalages horaires et aux vols de nuit, dont les effets sont souvent aggravés par la brièveté des déplacements.

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