Question de M. AUBAN Bertrand (Haute-Garonne - SOC) publiée le 28/02/2003

M. Bertrand Auban attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur l'étude présentée en janvier 2003 par l'Etat concernant l'hypothèse de localisation d'un éventuel nouvel aéroport international se substituant à la plate-forme de Toulouse-Blagnac. Cette étude menée par le bureau d'études d'Aéroports de Paris est très contestable et très contestée. Elle néglige l'impact de mise en place d'une ligne TGV Toulouse-Paris sur le trafic domestique, alors même que cet impact est important partout où les liaisons TGV existent. Elle néglige l'opportunité de s'appuyer sur les aéroports existants dans les régions Midi-Pyrénées ou Languedoc-Roussillon alors même que ces aéroports aspirent à se développer. Cette étude semble par ailleurs avoir été conduite en partant d'un a priori selon lequel une croissance ininterrompue du trafic aérien amènerait inéluctablement à créer un nouvel aéroport dimensionné pour 20 millions de passagers et susceptible d'accueillir dès 2015-2020 un trafic double de Toulouse-Blagnac aujourd'hui. Elle semble avoir également établi et hiérarchisé ses critères de localisation de façon à conduire inévitablement à un ou deux sites qui auraient été choisis bien en amont. Cette étude est très contestée par de très nombreux élus de la Haute-Garonne et du Tarn-et-Garonne mais également par les très nombreuses associations de citoyens du nord et nord-est du département dont le cadre de vie serait anéanti et la vie gravement perturbée mais aussi par les milieux socioprofessionnels locaux dont l'activité économique principale, la viticulture de qualité et l'agriculture de qualité, serait gravement pénalisée par un tel projet : il se situe au coeur d'un vignoble AOC ! Le président du conseil général de la Haute-Garonne a qualifié à juste titre cette étude d'" imparfaite, incomplète, tendancieuse, menée sous le signe d'un excès de zèle, de précipitations inexplicables ". Les conseils généraux de la Haute-Garonne et du Tarn-et-Garonne ont décidé conjointement de faire appel à un expert en matière d'études et de constructions aéroportuaires afin de mieux cerner et approfondir l'intégralité du sujet, ce que n'a pas fait cette étude. Le 19 février, plus de 1 000 élus représentants 75 communes et représentant plus de 100 000 citoyens sont venus en masse apporter au préfet de la région Midi-Pyrénées les délibérations hostiles à ce projet de toutes les municipalités concernées. C'est pourquoi il lui demande, comme il a su le faire à Chaulnes, de bien vouloir renoncer à toute décision concernant la création d'une seconde ou nouvelle plate-forme aéroportuaire internationale dans la Haute-Garonne, d'indiquer quelles mesures il compte prendre pour accélérer la desserte TGV directe en 3 h 06 de Toulouse, dernière grande métropole régionale française à en être dépourvue, et de procéder à une nouvelle étude prenant en compte la desserte ferroviaire, des prévisions plus réalistes d'évolution du trafic aérien, l'ensemble des aéroports existants, la dimension d'aménagement du territoire et le respect de l'environnement.

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Réponse du Ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer publiée le 26/03/2003

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2003

M. le président. La parole est à M. Bertrand Auban, auteur de la question n° 198, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

M. Bertrand Auban. Je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur l'étude présentée en janvier 2003 par l'Etat concernant l'hypothèse de localisation d'un éventuel nouvel aéroport international se substituant à la plate-forme de Toulouse-Blagnac.

Cette étude menée par le bureau d'études d'Aéroports de Paris est très contestable et très contestée. Elle néglige les conséquences qu'entraînerait la mise en place d'une ligne TGV Toulouse-Paris sur le trafic domestique, alors même qu'elles sont importantes partout où les liaisons TGV existent. Elle néglige également l'opportunité de s'appuyer sur les aéroports existants dans les régions Midi-Pyrénées ou Languedoc-Roussillon, alors même que ces aéroports aspirent à se développer.

Cette étude semble par ailleurs avoir été conduite à partir d'un a priori selon lequel une croissance ininterrompue du trafic aérien conduirait inéluctablement à la création d'un nouvel aéroport susceptible d'accueillir 20 millions de passagers puis, dès 2015-2020, le double du trafic de celui de Toulouse-Blagnac aujourd'hui. Elle semble avoir également établi et hiérarchisé ses critères de localisation de façon à conduire inévitablement à un ou deux sites qui auraient été choisis bien en amont.

Cette étude est très contestée par de très nombreux élus de la Haute-Garonne et du Tarn-et-Garonne mais également par les très nombreuses associations de citoyens du nord et nord-est du département dont le cadre de vie serait anéanti et la vie gravement perturbée. Elle est aussi contestée par les milieux socio-professionnels locaux dont l'activité économique principale, la viticulture et l'agriculture de qualité, serait gravement pénalisée par un tel projet. Le projet se situe en effet au coeur d'un vignoble AOC !

Le président du conseil général de la Haute-Garonne a déclaré à juste titre que cette étude était « imparfaite, incomplète, tendancieuse, menée sous le signe d'un excès de zèle, de précipitations inexplicables ». Les conseils généraux de la Haute-Garonne et du Tarn-et-Garonne ont décidé conjointement de faire appel à un expert en matière d'études et de constructions aéroportuaires afin de mieux cerner et approfondir l'intégralité du sujet, ce que n'a pas fait cette étude.

Le 19 février, plus de 1 000 élus représentant 75 communes et plus de 100 000 citoyens sont venus en masse apporter au préfet de la région Midi-Pyrénées les délibérations hostiles à ce projet de toutes les municipalités concernées.

C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, comme vous avez su le faire pour Chaulnes, de bien vouloir renoncer à toute décision concernant la création d'une seconde ou nouvelle plate-forme aéroportuaire internationale dans la Haute-Garonne.

Je vous demande également d'indiquer quelles mesures vous comptez prendre pour accélérer la desserte directe de Toulouse par TGV en trois heures et six minutes - c'est la dernière grande métropole régionale française à en être dépourvue - et de procéder à une nouvelle étude prenant en compte la desserte ferroviaire, des prévisions plus réalistes d'évolution du trafic aérien, l'ensemble des aéroports existants, la dimension d'aménagement du territoire et le respect de l'environnement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, je tiens tout d'abord à préciser que la comparaison avec Chaulnes n'est pas appropriée. En effet, à Chaulnes, la décision était prise, ce qui n'est pas le cas à Toulouse, vous le savez bien.

La plate-forme aérienne régionale de Toulouse-Blagnac, par ses effets sur l'économie, l'environnement et l'aménagement du territoire, représente - personne ne peut le nier - un enjeu de premier plan pour l'agglomération toulousaine et pour l'ensemble de la région.

Du fait de fortes contraintes environnementales, en raison d'une insertion dans un tissu urbain devenu très dense, le développement de cette plate-forme semble obéré à terme, même si la capacité d'accueil ne devrait pas être en cause avant 2020. Nous avons tout de même le temps d'y réfléchir !

Devant l'importance du sujet, l'Etat et les principales collectivités locales ont naturellement engagé une réflexion approfondie afin de rechercher les moyens de doter la région toulousaine d'une desserte qui soit à la hauteur de son dynamisme économique. Cette démarche, qui s'est traduite par une série d'études, n'a écarté a priori aucune option. Si tel n'avait pas été le cas, on nous aurait reproché la réalisation d'une étude partielle et partiale.

L'étude a ainsi analysé huit sites localisés dans un rayon de cinquante kilomètres autour de Toulouse. D'autres études ont examiné, de façon détaillée, les conséquences d'une offre ferroviaire à grande vitesse sur le trafic aérien, les possibilités de transfert de certains trafics vers des aéroports proches de Toulouse et la création d'une nouvelle plate-forme aéroportuaire entre Bordeaux et Toulouse.

Dans un souci de complète transparence, ces études ont été présentées en janvier dernier par les consultants aux différents acteurs concernés et sont aujourd'hui accessibles sur le site Internet de la direction régionale de l'équipement Midi-Pyrénées. L'objectif est d'informer le public de manière à ce qu'il puisse être associé à la démarche prospective en toute connaissance de cause. Chacun est invité à faire part de ses observations, de ses critiques, voire de ses propositions. Une synthèse apportant des éléments de réponse sera ensuite réalisée et pourra déboucher, le cas échéant, sur les études complémentaires qui pourraient apparaître nécessaires.

Parallèlement à la démarche de concertation en cours sur l'avenir de la plate-forme aéroportuaire de la région toulousaine, la desserte de cette métropole par le TGV fait actuellement l'objet d'études spécifiques.

La desserte ferroviaire pourra être améliorée en deux étapes, d'abord par la mise en service de la ligne à grande vitesse Sud-Europe-Atlantique, ensuite par la réalisation d'aménagements entre Bordeaux et Toulouse. L'étude concernant ces aménagements devrait s'achever à la fin de l'année 2003.

Compte tenu de la complémentarité entre les modes de transport qui doit être envisagée pour des projets de cet ordre, un débat public conjoint pourrait être organisé en 2004 autour des deux infrastructures, qu'il s'agisse de l'amélioration de la desserte ferroviaire ou de la création éventuelle d'une nouvelle plate-forme aéroportuaire régionale.

M. le président. La parole est à M. Bertrand Auban.

M. Bertrand Auban. Monsieur le ministre, j'ai écouté attentivement votre réponse et j'en prends bonne note.

Toutefois, sur ce dossier très sensible, je souhaiterais ajouter que, le 15 mars de cette année, 20 000 manifestants ont défilé contre ce dernier projet, constituant l'une des manifestations les plus importantes que Toulouse ait connue.

A la fin de cette manifestation, le président du conseil régional de Midi-Pyrénées et le président du conseil général de Haute-Garonne ont exprimé très fermement leur refus d'un nouvel aéroport.

Monsieur le ministre, je suis sûr que vous saurez être attentif à ce que vous disent tous les élus locaux concernés, qui s'opposent unanimement à ce projet, représentant en cela la voix de leurs concitoyens.

En octobre 2002, un colloque de l'association Ville et Aéroport placé sous votre haut patronage a souligné le coût social ainsi que les phénomènes de dégradation urbaine et de paupérisation sociale que peut induire le développement aéroportuaire. Le gigantisme aéroportuaire et ses conséquences funestes ne sont pas l'avenir que ces territoires, leurs élus et leurs habitants ont choisi pour eux et pour leurs enfants.

On ne se débarrasse pas des nuisances aéroportuaires supportées par les uns en y soumettant autoritairement les autres. On doit au contraire les combattre plus vigoureusement - je songe évidemment à l'aéroport de Toulouse-Blagnac -, tous les acteurs ayant la volonté de mieux protéger les riverains des aéroports existants, à la fois par des réglementations plus draconiennes, par des indemnisations totales et rapides, et - pourquoi pas ? - en offrant aux habitants les plus exposés la possibilité financière de déménager et de se reloger ailleurs.

Je conclurai, monsieur le ministre, en citant un récent entretien que vous avez accordé au quotidien régional La Dépêche du Midi, dans lequel vous appeliez les élus locaux à se mobiliser pour indiquer leurs priorités en matière de transports. Je vous assure que les élus locaux haut-garonnais sont fermement mobilisés et déterminés à la fois contre ce projet d'aéroport et en faveur d'un TGV reliant Toulouse à Paris en trois heures et six minutes.

J'espère, monsieur le ministre, que vous aurez à coeur de les écouter.

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