Question de M. BOYER André (Lot - RDSE) publiée le 20/11/2003

M. André Boyer appelle l'attention M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur la situation des médecins hospitalo universitaires au regard de la retraite. Ces médecins contribuent largement à la qualité du système de santé français et à son rayonnement dans le monde, en formant les praticiens hospitaliers et libéraux et en exerçant la médecine dans les centres hospitaliers universitaires (CHU) au sein de services spécialisés très performants dont ils assument souvent la direction et ce, pour une très large moitié du temps. Or, ils ont actuellement le triste privilège de bénéficier de la plus faible retraite des médecins de notre pays. Calculée uniquement sur le salaire universitaire, leur retraite ne tient en effet aucun compte de leur activité hospitalière qui comporte pourtant des sujétions importantes. Le protocole d'accord signé en mai 2003 n'a modifié en rien malheureusement cette situation. La modicité de leur retraite, ajoutée à la difficulté d'animer des équipes hospitalières au moment où l'hôpital public traverse une crise grave, explique pour une large part la perte d'attractivité des carrières hospitalières universitaires. A terme, c'est à n'en pas douter la qualité de la formation des médecins et la santé qui en pâtiront. En conséquence, il lui demande quelles mesures de simple justice il envisage de prendre pour que la totalité des émoluments hospitaliers soient pris en compte pour le calcul de la retraite des praticiens enseignants en hôpital et pour assurer la pérennité de ce corps saisi par le doute.

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Réponse du Ministère délégué à la ville et à la rénovation urbaine publiée le 14/01/2004

Réponse apportée en séance publique le 13/01/2004

M. André Boyer. Monsieur le ministre, on se plaît à dire que notre médecine est l'une des meilleures du monde. Les médecins hospitalo-universitaires y contribuent largement, en formant les praticiens hospitaliers et libéraux, en exerçant la médecine dans les centres hospitaliers universitaires, les CHU, au sein de services spécialisés très performants dont ils assument souvent la direction, et ce pour une très large moitié de leur temps, qu'au demeurant ils ne comptent pas.

Ces praticiens enseignants et hospitaliers ne sont pas les mandarins que l'on croit. Ils se sont, notamment, alarmés du fait que le protocole d'accord de mai 2003 ne modifie en rien le triste privilège qui leur vaut de percevoir la plus faible retraite des médecins de notre pays. Cette retraite, en effet, calculée uniquement sur le salaire universitaire, ne tient aucun compte de leur activité hospitalière, qui comporte des sujétions importantes, sans bénéfice de la RTT, la réduction du temps de travail.

La difficulté d'animer les équipes hospitalières dont ils ont la charge au moment où l'hôpital public traverse une crise grave et la modicité de leur retraite expliquent largement la perte d'attractivité des carrières hospitalières universitaires, qui est sûrement, à terme, préjudiciable à la qualité de la formation des médecins et à la santé dans notre pays.

Monsieur le ministre, quelles sont les mesures de simple justice que vous pouvez envisager de prendre pour que la totalité des émoluments hospitaliers soient pris en compte dans le calcul de la retraite et pour assurer ainsi la pérennité d'un corps saisi par le doute mais dont dépendent la qualité des soins aux malades, la qualité de l'enseignement et de la recherche médicale et le rayonnement de la médecine française ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. Monsieur le sénateur, votre question porte sur la retraite des personnels enseignants et hospitaliers.

Leur activité professionnelle est double et elle comprend ainsi une double rémunération : une rémunération au regard de leur activité universitaire, qui donne droit à une retraite dans les conditions définies par le code des pensions civiles et militaires de retraite et une rémunération au regard de leur activité hospitalière, qui ne donne pas lieu à cotisation, et donc ne donne pas droit à retraite.

Fruit d'une histoire complexe, la situation décrite n'en demeure pas moins logique. Nos régimes de retraite reposent en effet sur un principe contributif. En tout état de cause, il paraît exclu d'accorder un montant de retraite pour une activité qui n'a pas donné lieu à cotisation.

Comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur, la question a été effectivement évoquée dans le protocole adopté au mois de mai dernier.

Un protocole d'accord, actant différentes mesures portant sur les champs hospitalier et universitaire, a en effet été signé le 16 mai 2003 par le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche et par le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées avec les organisations syndicales représentant les personnels enseignants et hospitaliers titulaires. Il réaffirme le rôle essentiel de la triple mission, de soins, d'enseignement et de recherche, impartie aux personnels hospitalo-universitaires, contribuant à la fois au rayonnement de la médecine française et à la qualité des soins prodigués aux patients, dans un contexte hospitalier marqué par de récentes évolutions statutaires pour différentes catégories de personnels.

Les signataires de ce protocole ont reconnu que la situation des médecins hospitalo-universitaires décrite, au regard de la retraite, représentait une préoccupation majeure pour ces personnels et qu'elle devra faire l'objet d'une étude et de négociations à la fois dans le cadre général de la réforme des retraites et dans le cadre particulier du comité de suivi du protocole mis en place.

Monsieur le sénateur, vous indiquez que rien n'a changé depuis la signature de ce protocole. Or M. Fillon, que je représente ce matin, ne partage pas cette conclusion. En effet, les médecins hospitalo-universitaires vont pouvoir bénéficier du dispositif prévu par l'article 76 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, à savoir le régime additionnel de retraite sur les éléments de rémunération non soumis à cotisation. Ce régime sera opérationnel au 1er janvier 2005.

Je peux vous garantir que les services des différents ministères se mobilisent pour que le décret d'application de l'article 76 puisse paraître avant la fin du premier semestre 2004.

Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments de réponse dont je souhaitais faire part au nom du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. André Boyer.

M. André Boyer. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse et je prends acte du rendez-vous que vous fixez aux praticiens hospitaliers dans le cadre de la réforme des retraites.

Néanmoins, je veux mettre l'accent sur les cris d'alarme lancés par les chefs de service des centres hospitalo-universitaires chargés des pôles d'excellence de la médecine française, qui estiment que la transmission d'un savoir de haut niveau est fortement compromise ; la presse s'en est fait largement l'écho ces derniers temps.

Ma question a pu vous paraître liée ponctuellement à un problème catégoriel, mais il s'agit en réalité d'un tout, dont par exemple la pénurie du nombre d'internes - le recrutement a chuté de 50 % en cinq ans - et le recours en masse à des praticiens étrangers sont des éléments révélateurs.

Alors que nous prenons acte, sur l'ensemble du territoire, de la disparition des hôpitaux de proximité, le désarroi que ressentent les médecins hospitalo-universitaires est très préoccupant. Ils constatent que la relève se tarit, notamment en raison de leur statut, qui est dissuasif.

Cette situation expose, à court terme, l'hôpital public à une détérioration de la qualité des soins et expose plus largement notre pays à renoncer au rayonnement de nos facultés de médecine en matière d'enseignement et de recherche.

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