Question de Mme BLANDIN Marie-Christine (Nord - SOC-R) publiée le 11/12/2003

Mme Marie-Christine Blandin attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation en Mauritanie, pays ami de la France, qui vient de vivre, pratiquement à huis clos, une élection présidentielle, dont les conséquences encore imprévisibles pourraient affecter la paix, déjà précaire, dans ce pays et en Afrique occidentale. Les autorités, après avoir refusé toute observation indépendante, ont préparé cette échéance sensible dans l'opacité et l'ont terminée dans la répression. Le second tour de scrutin, pourtant attendu par la plupart des observateurs, n'a pas pu avoir lieu, laissant les populations de ce pays dans l'amertume et le désespoir. L'un des principaux candidats de l'opposition, l'ancien président Mohamed Khouna Ould Haïdalla ainsi que ses principaux collaborateurs et certains membres de sa famille ont été arrêtés la veille et le jour même du scrutin et sont actuellement maintenus en prison. Les observateurs mauritaniens, notamment de la société civile, établissent le constat d'une véritable parodie d'élection, que caractérisent l'absence de contrôle des urnes, les violations des règles de transparence, les intimidations, les emprisonnements arbitraires, les passages à tabac de représentants de l'opposition dans les bureaux de vote, sans oublier le défaut préalable de toute instance de contrôle indépendant. Le Président de la République vient d'adresser ses félicitations au chef de l'Etat Ould Sid'Ahmed Taya. Pourtant, la prudence diplomatique et les valeurs fondatrices de la République ne sont pas compatibles avec un régime dont les crimes ont atteint le seuil de nos tribunaux. Deux plaintes contre des tortionnaires mauritaniens sont en effet en cours d'instruction par les tribunaux français. Le chef de l'Etat mauritanien, arrivé au pouvoir par putsch, gouverne sans partage depuis 1984 au mépris constant de la démocratie (arrestations d'opposants, interdictions de partis, fraudes électorales) et des droits de l'homme (déportation de populations, exécutions extra-judiciaires, tortures, arrestations arbitraires, persistance de l'esclavage). Elle souhaite donc l'interpeller sur les causes d'une telle position diplomatique, aberrante à l'aune nos valeurs communes, désespérante pour ceux que la démocratie anime. Elle souhaite aussi savoir quelles mesures, au moins dans le cadre de la coopération bilatérale et multilatérale, le gouvernement français compte prendre, afin de rassurer et d'aider les démocrates mauritaniens et d'éviter la spirale dangereuse pouvant aboutir à une guerre civile.

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Réponse du Ministère des affaires étrangères publiée le 18/03/2004

Après avoir demandé aux autorités mauritaniennes de garantir un scrutin libre et transparent, permettant à l'ensemble des sensibilités de s'exprimer et de bénéficier d'un égal traitement, la France a été l'un des premiers Etats à appeler le Président Taya, nouvellement réélu, à oeuvrer en faveur d'une ouverture et d'un dialogue associant l'ensemble des sensibilités nationales, pour le développement et le bien-être de son pays. Sur un plan général, la France se montre particulièrement vigilante s'agissant de la question des droits de l'homme en Mauritanie. Elle use de toute son influence auprès des autorités de ce pays, en soulignant notamment l'importance qu'elle attache à la consolidation de l'Etat de droit et à un meilleur respect des procédures de justice. Par ailleurs, les questions liées aux droits de l'homme en Mauritanie figureront à l'ordre du jour de la prochaine commission mixte franco-mauritanienne, qui devrait se tenir à Paris en 2004. Dans un cadre bilatéral, la coopération française conduit par ailleurs des actions qui contribuent à l'amélioration du respect des droits de l'homme et qui s'organisent autour de trois axes prioritaires : la lutte contre la pauvreté, notamment pour favoriser l'accès à l'éducation et à la santé des populations les plus pauvres, en particulier dans les régions marquées par les séquelles de l'esclavage ; l'appui à la décentralisation, qui constitue la base d'une citoyenneté active dans toutes les couches sociales par le renforcement du rôle des élus et des communes ; le soutien à l'Assemblée nationale dans le cadre de la coopération interparlementaire, qui s'appuie sur la formation de parlementaires locaux et des échanges fréquents entre assemblées. La France inscrit enfin son action dans le cadre d'une approche commune aux partenaires de ce pays, en soutien au programme national d'appui à la bonne gouvernance, copiloté par le PNUD et les autorités mauritaniennes.

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