Question de M. TODESCHINI Jean-Marc (Moselle - SOC) publiée le 20/05/2004

M. Jean-Marc Todeschini souhaite attirer l'attention de M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire sur les incidences de la taxe sur les salaires à laquelle sont assujetties les associations, et notamment les maisons de jeunes et de la culture, en application de l'article 231, alinéa 1 du code général des impôts. Aujourd'hui, les représentants du secteur associatif tirent la sonnette d'alarme sur cette taxe qui fragilise leur budget et par conséquent leurs actions et leur développement. Celle-ci équivaut à plus de 8 % d'un salaire annuel brut d'environ 15 000 euros et à 10 % d'un salaire annuel de 22 250 euros. Ce coût est pour beaucoup un obstacle à l'emploi. En effet, l'emploi dans le secteur associatif, dont le potentiel est énorme, revêt une importance capitale dans toutes les politiques de lutte contre l'exclusion et plus généralement de lutte contre le chômage, notamment en milieu rural. Il comprend bien qu'une exonération de cette taxe aux associations ne puisse rester durablement limitée à ce seul secteur, et serait revendiquée par l'ensemble des redevables de la taxe sur les salaires. A terme, il mesure bien que c'est donc le produit total de la taxe sur les salaires, qui contribue pour plus de 8,5 milliards d'euros au budget général de l'Etat, qui serait remis en cause. Toutefois, il lui rappelle qu'en octobre 2001 son prédécesseur déposait, au nom de la commission des finances du Sénat, un rapport d'information relatif à la taxe sur les salaires, dans lequel trois propositions avaient été formulées la suppression totale, la suppression partielle et la suppression par étapes de la taxe sur les salaires. Enfin, il ressort de l'historique de cette taxe qu'elle a difficilement trouvé sa justification, ce qui la rend unique en Europe. La question de sa suppression se pose donc dans l'optique d'une harmonisation de la fiscalité à l'échelon européen. En conséquence, il lui demande s'il compte revoir l'assujettissement des associations à la taxe sur les salaires. Il souhaite également savoir si le Gouvernement entend examiner, dans un premier temps, les propositions élaborées en octobre 2001 et envisager les modalités d'une suppression par étapes de ladite taxe particulièrement injuste et préjudiciable à l'emploi.

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Réponse du Ministère délégué aux affaires européennes publiée le 02/06/2004

Réponse apportée en séance publique le 01/06/2004

M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite appeler à nouveau l'attention du Gouvernement sur les incidences de la taxe sur les salaires à laquelle sont assujetties les associations, notamment les maisons des jeunes et de la culture.

Aujourd'hui, les représentants du secteur associatif tirent la sonnette d'alarme, par le biais d'une campagne de sensibilisation importante et légitime, sur cette taxe qui fragilise leur budget et, par conséquent, leurs actions et leur développement.

En application de l'article 231, alinéa 1, du code général des impôts, les associations, au même titre que les personnes physiques ou morales qui ne sont pas soumises à la TVA ou qui l'ont été sur moins de 90 % de leur chiffre d'affaires ou de leurs recettes au titre de l'année civile précédant celle du paiement des rémunérations, sont redevables de la taxe sur les salaires à raison des rémunérations versées à leur personnel.

Je comprends bien qu'une exonération du paiement de cette taxe au bénéfice des associations ne puisse rester durablement limitée à ce seul secteur. Elle serait revendiquée par l'ensemble des redevables de la taxe sur les salaires.

Je mesure donc également, madame la ministre, que c'est le produit total de la taxe sur les salaires, qui contribue pour plus de 8,5 milliards d'euros au budget général de l'Etat, qui serait remis en cause.

Toutefois, je tiens à vous rappeler que, au-delà des mesures légales d'abattement possibles en la matière pour les associations régies par la loi de 1901, la taxe sur les salaires grève lourdement la trésorerie de ces dernières. En effet, celle-ci équivaut à plus de 8 % d'un salaire annuel brut d'environ 15 000 euros, et à 10 % d'un salaire annuel de 22 250 euros.

Ce coût a un fort impact sur l'emploi ; il en constitue même un obstacle. Je vous rappelle, là aussi, que l'emploi dans le secteur associatif, dont le potentiel est énorme, revêt une importance capitale dans toutes les politiques de lutte contre l'exclusion et, plus généralement, de lutte contre le chômage, notamment en milieu rural.

Par ailleurs, je tiens également à vous préciser à ce sujet que, en octobre 2001, le prédécesseur de M. Dominique Bussereau au secrétariat d'Etat au budget, M. Alain Lambert, alors président de la commission des finances du Sénat, avait déposé un rapport d'information relatif à la taxe sur les salaires.

Dans ce rapport, il concluait sur ce point : « Il faut noter que les activités hospitalières, l'action sociale, le secteur associatif et les administrations acquittent 67 % du produit de la taxe sur les salaires. C'est 41 % du produit total de cet impôt qui est acquitté au moyen de financements publics. Cette situation est absurde : la puissance publique lève en quelque sorte un impôt sur elle-même. »

Je partage cette analyse réaliste et je rappelle que, à l'époque, trois propositions avaient été formulées : la suppression totale, la suppression partielle, et la suppression par étapes de la taxe sur les salaires.

Il ressort de l'historique de cette taxe qu'elle a difficilement trouvé sa justification, ce qui la rend unique en Europe. La question de sa suppression se pose donc dans l'optique d'une harmonisation de la fiscalité à l'échelon européen.

Je souhaite, madame la ministre, savoir si le Gouvernement compte revoir l'assujettissement des associations à la taxe sur les salaires. Je souhaite également savoir si le Gouvernement entend examiner, dans un premier temps, les propositions élaborées en octobre 2001 et envisager les modalités d'une suppression par étapes de ladite taxe, particulièrement injuste et préjudiciable à l'emploi.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le sénateur, je vais vous répondre au nom de Dominique Bussereau.

La taxe sur les salaires repose sur un principe simple : elle est due, sur le montant des rémunérations versées à leur personnel, par les employeurs qui ne sont pas soumis à la TVA ou qui l'ont été sur moins de 90 % de leur chiffre d'affaires ou de leurs recettes au titre de l'année civile précédant celle du paiement des rémunérations.

C'est en application de ce principe général d'imposition que les associations, notamment les maisons des jeunes et de la culture, sont redevables de la taxe sur les salaires.

Comme vous l'avez vous-même indiqué, une exonération de la taxe sur les salaires ne pourrait être limitée au seul secteur associatif, car celle-ci serait revendiquée par l'ensemble de ses redevables. A terme, c'est le produit total de la taxe sur les salaires, qui rapporte plus de 8,5 milliards d'euros au budget général de l'Etat, qui serait menacé.

Vous comprendrez donc, monsieur le sénateur, que le Gouvernement ne peut envisager une telle éventualité dans le contexte budgétaire actuel.

Cela étant, je crois tout de même utile de rappeler que des mesures, d'application générale ou spécifique aux associations, permettent déjà de stabiliser ou d'alléger le poids de la taxe sur les salaires.

Ainsi, les associations bénéficient d'un abattement sur le montant annuel de la taxe sur les salaires dont elles sont redevables qui, indexé dans les mêmes conditions que les limites des tranches du barème de la taxe, s'établit à 5 362 euros pour les rémunérations versées en 2004.

Cet abattement, d'un coût budgétaire de l'ordre de 230 millions d'euros, procure aux associations un allégement d'impôt substantiel, puisqu'il permet d'exonérer complètement de la taxe sur les salaires les associations employant jusqu'à près de six salariés occupés à temps plein et payés au SMIC, voire plus en cas de recours au temps partiel.

En outre, les rémunérations versées dans le cadre de certains types de contrats, comme les contrats emploi-solidarité et les contrats emploi-consolidé, sont expressément exonérées de la taxe sur les salaires.

L'ensemble de ces mesures, qui témoignent de l'attention particulière portée par les pouvoirs publics au secteur associatif, représente un effort budgétaire important.

Enfin, puisque vous avez évoqué la lutte contre l'exclusion, plus généralement la lutte contre le chômage, je vous rappelle que mon collègue Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, prépare, en concertation avec les représentants des forces vives de la nation, notamment avec les partenaires sociaux, un plan ambitieux de cohésion sociale dont l'un des volets sera consacré à l'emploi, notamment à l'emploi des jeunes.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini. Madame la ministre, vous me répondez que la taxe sur les salaires rapporte 8,5 milliards d'euros et que certains types de contrats de travail en sont exonérés. Je le savais déjà, puisque ce n'est pas la première fois que le Gouvernement est interpellé sur ce sujet.

Je l'ai dit moi-même, il me paraît impossible pour un Gouvernement de supprimer une telle recette en une seule fois. Mais il faut comparer le montant de la recette liée à la taxe sur les salaires avec la réduction de l'impôt sur le revenu, qui n'a aucune incidence sur la création d'emplois, voire sur la consommation, même si l'on peut espérer qu'elle la favorise.

Je le répète, la taxe sur les salaires constitue un véritable obstacle à l'emploi. Vous avez cité les contrats qui en sont exonérés. Néanmoins, ces mesures d'exonération ne concernent pas toutes les associations, notamment pas celles que je citais, et elles renforcent la précarité de certains emplois du secteur associatif. Il est donc urgent d'étudier les intéressantes propositions d'Alain Lambert faites au nom de la commission des finances du Sénat.

Je ne vous citerai qu'un exemple complémentaire. Pour une association qui n'est pas concernée par l'exonération, le taux le plus élevé de la taxe, qui est de 13,6 %, est atteint pour un salaire à peine supérieur au SMIC.

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