Question de M. BIWER Claude (Meuse - UC) publiée le 02/10/2004

M. Claude Biwer attire l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur la vive inquiétude exprimée par de très nombreux maires à l'égard de la restructuration du réseau postal qui pourrait se traduire par la fermeture de plus de 6 000 bureaux de poste de plein exercice, le transfert de la gestion d'une grande partie des bureaux de poste situés en zone rurale aux communes et l'ouverture de points-poste chez des commerçants. Il lui rappelle que la disparition, après bien d'autres, d'un nouveau service public ne peut que contribuer à la désertification des zones rurales et le prie de bien vouloir préciser les initiatives que le Gouvernement compte prendre visant à donner à La Poste les moyens lui permettant de maintenir une présence postale de qualité dans les zones rurales et sensibles.

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Réponse du Ministère délégué au commerce extérieur publiée le 20/10/2004

Réponse apportée en séance publique le 19/10/2004

M. Claude Biwer. Monsieur le président, c'est un réel plaisir pour moi d'intervenir sous votre première présidence. Permettez-moi, à cette occasion, de vous féliciter.

M. le président. Je vous remercie, mon cher collègue.

M. Claude Biwer. Monsieur le ministre, l'annonce faite durant l'été de l'éventuelle fermeture de plus de 6 000 bureaux de poste, essentiellement en milieu rural, a fait l'objet d'une bombe et a certainement pesé sur la campagne pour les élections sénatoriales dans les départements concernés.

Cette information a, en effet, provoqué une très grande inquiétude chez les maires, qui craignent de voir disparaître un nouveau service public dans leur commune.

La direction de l'entreprise s'est bien gardée de confirmer ces chiffres, mais nous savons bien qu'elle envisage de transférer une grande partie des bureaux de poste situés dans les zones rurales aux mairies, voire d'ouvrir des points poste chez des commerçants, lorsqu'il en reste encore dans ces mêmes lieux.

Cet état de fait donne un peu plus de relief à la proposition de loi qu'avec plusieurs collègues du groupe de l'Union centriste nous avions déposée sur le bureau du Sénat dès janvier 2004 et qui visait à instaurer un moratoire sur les fermetures des services publics en milieu rural.

Les maires des communes rurales nous avaient, en effet, fait part de leurs graves préoccupations à l'égard de la disparition progressive de tous les services publics de proximité en milieu rural : gendarmeries, centres EDF-GDF, succursales de la Banque de France, douanes, écoles, hôpitaux ruraux, gares quelquefois, perceptions et, tout naturellement, bureaux de poste.

Cette disparition condamne nos concitoyens à effectuer de longs trajets pour accomplir leurs démarches administratives et dissuade souvent les jeunes couples à s'installer dans des communes dépourvues de tout service public.

Nous comprenons mieux, à présent, les raisons pour lesquelles le Gouvernement n'a pas véritablement souhaité réserver une suite favorable à notre proposition de loi.

Car, dans cette affaire des bureaux de poste, force est de reconnaître que l'entreprise n'est pas seule en cause : en effet, d'un côté, les pouvoirs publics lui demandent d'équilibrer ses comptes et, de l'autre, les moyens lui permettant de faire face au coût du maintien de la présence postale en milieu rural, évalués à environ 500 millions d'euros, lui ont été refusés dans le contrat de plan Etat-Poste couvrant la période 2004-2007. Voilà une équation bien difficile à résoudre !

C'est la raison pour laquelle je me permets d'interroger le président de la Poste, certes, mais aussi le Gouvernement pour leur demander quels moyens seront dégagés pour permettre à la Poste de maintenir un minimum de présence postale de qualité dans les zones rurales et sensibles.

C'est en effet de la réponse à cette question que dépendra le maintien, ou non, d'une activité publique dans les zones rurales.

Les moyens supplémentaires qui sont accordés à La Poste dans le système bancaire, en particulier, demeurent, me semble-t-il, trop limités pour permettre de restaurer cette présence en milieu rural.

Il n'est pas pour autant question, nous le comprenons bien, de maintenir tout et à n'importe quel prix. Toutefois, je pense que, à partir d'un certain niveau d'activité, il existe des possibilités pour améliorer cette présence tout en permettant une meilleure attractivité.

Monsieur le ministre, je suis persuadé que, si vous demandiez à la représentation nationale de consacrer quelques moyens supplémentaires à ce maintien de la présence postale, sénateurs et députés ne vous opposeraient certainement pas un refus. Cela devrait être encore possible : nous sommes à la veille d'entrer dans le débat budgétaire -c'est d'ailleurs le jour J à l'Assemblée nationale - et le projet de budget pour 2005 pourrait peut-être apporter encore des améliorations.

Sait-on jamais, nous pouvons encore rêver en cet instant. Je compte en tout cas sur vous, monsieur le ministre, afin que puissent être adoptées quelques mesures nous permettant encore d'espérer.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, je réponds à la place de Patrick Devedjian, que vous interrogez sur La Poste. J'espère que je vais vous faire rêver.

Votre question porte sur la présence territoriale de La Poste, qui est indiscutablement un acteur majeur de l'aménagement du territoire.

Vous me faites part de la vive inquiétude de nombreux élus.

Il est exact que, cet été, les projets de réorganisation de l'entreprise ont suscité une émotion forte et légitime. C'est pourquoi, à la demande du Gouvernement, le président de La Poste s'est engagé solennellement à maintenir une présence postale de 17 000 points de contact.

La concertation avec les élus, qui doit nécessairement accompagner tout projet local d'évolution, est désormais une priorité.

Ni le Gouvernement ni les Français n'auraient compris d'ailleurs que La Poste désertât les zones rurales. Elle y restera, parfois avec une présence plus diversifiée, qui, dans certains cas, et en accord avec les élus et souvent à leur demande, passe par la mise en place d'un point-poste chez un commerçant. Cette formule élargit les horaires d'ouverture du service postal pour la population et crée un revenu complémentaire pour le commerçant.

Pour autant, le développement des points-poste reste limité, leur nombre de 300 étant à comparer à celui de 14 000 bureaux de poste.

L'Etat, pour sa part, participe au financement de la présence postale en accordant à La Poste un abattement important sur les taxes locales dont elle est redevable. Cette aide viendra alimenter un fonds postal national de péréquation territoriale.

Le Gouvernement souhaite une participation forte des élus, à travers la commission supérieure du service public des postes et télécommunications et à travers les commissions départementales de présence postale territoriale, dans la mise en oeuvre de ce fonds.

La Poste doit rester le grand service public de proximité apprécié de tous les Français.

Cependant, nous devons aussi lui permettre de réussir son projet industriel d'ici à 2009, date envisagée par la commission pour la libéralisation du courrier, pour faire face avec succès à l'ouverture de ses marchés à la concurrence et rattraper le niveau de ses meilleurs concurrents européens, les postes néerlandaise et allemande.

En 1989, la poste allemande avait un statut d'administration, employait 400 000 personnes et connaissait des pertes de 700 millions d'euros pour un chiffre d'affaires de l'ordre de 12 milliards d'euros, inférieur à celui de la poste française. Depuis lors, elle est devenue une société employant 350 000 salariés qui, en 2003, aura réalisé un chiffre d'affaires de 40 milliards d'euros - le double de celui de La Poste française - pour un résultat de 1,3 milliard d'euros avec une qualité de service de 95 % de lettres distribuées à J+1.

L'effort de rattrapage de La Poste française est donc immense. Je suis confiant dans le fait qu'elle y parviendra et je suis confiant dans le fait qu'elle respectera son engagement des 17 000 points de présence postale, les points de contact.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Je remercie M. le ministre de l'objectivité de sa réponse.

Nous comprenons bien sûr la nécessité d'une réorganisation et d'une restructuration. Cependant, la diminution de la présence postale s'accompagne bien souvent d'une moindre fréquence de la levée du courrier et de l'absence de nouveaux services.

Aussi, nous souhaitons que le Gouvernement soit bien sûr le plus vigilant possible pour faire en sorte que la ruralité ne soit pas complètement oubliée.

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