Question de M. PIRAS Bernard (Drôme - SOC) publiée le 21/10/2004

M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le fait qu'il est stipulé à l'article 53-II du code des marchés publics que " les critères (de choix de l'offre économiquement la plus avantageuse) sont définis dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans le règlement de la consultation " et qu'ils " sont pondérés ou à défaut hiérarchisés ". Dans ce sens, votre direction des affaires juridiques, auteur du nouveau code 2004, affirme, lors de l'organisation d'une discussion sur internet, dont le contenu est consultable sur le site www.colloc.minefi.gouv.fr, que : " la réforme laisse le choix entre la pondération et la hiérarchisation des critères. Reste que la pondération, qui semble d'un premier abord plus difficile à manier, est un meilleur outil pour susciter au final un choix objectif. Il faut préciser le mode utilisé dans la publicité ou dans le règlement de la consultation. Or, le tribunal administratif de Nice a été amené à considérer que " il ressort de ces dispositions qui ont un caractère impératif que la publication des règles de pondération des critères de sélection des offres constitue une obligation qui ne peut être écartée, au profit de la simple hiérarchisation des critères, que lorsque la nature du marché y fait obstacle ou lorsqu'il peut être dûment justifié par la personne responsable du marché ; que le non-respect de cette exigence de transparence est constitutif d'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence (...) que ni la nature du marché litigieux ni le nombre de critères de sélection, limité à deux, ne permettait d'écarter " (TA de Nice, 11 mai 2004, Société varoise de construction routière c/ commune de la Seyne-sur-Mer, n° 0401930). La position adoptée par le juge administratif rejoint ici les termes du 46e considérant de la directive 2004/18/CE du Parlement et du Conseil du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, qui précise que : " afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement lors de l'attribution des marchés, il convient de prévoir l'obligation - consacrée par la jurisprudence - d'assurer la transparence nécessaire pour permettre à tout soumissionnaire d'être raisonnablement informé des critères et des modalités qui seront appliqués pour identifier l'offre économiquement la plus avantageuse. Il incombe dès lors aux pouvoirs adjudicateurs d'indiquer les critères d'attribution ainsi que la pondération relative donnée à chacun de ces critères, et ce en temps utile afin que les soumissionnaires en aient connaissance pour établir leurs offres. Les pouvoirs adjudicateurs peuvent déroger à l'indication de la pondération des critères d'attribution dans les cas dûment justifiés, qu'ils doivent être en mesure de motiver, lorsque cette pondération ne peut pas être établie au préalable, notamment en raison de la complexité du marché. Dans ces cas, ils doivent indiquer l'ordre d'importance décroissant de ces critères ". Si donc chacun a pu prendre conscience de l'obligation faite par la réglementation de pondérer les critères de choix, reste à savoir en quoi peut consister une pondération. En effet, s'agit-il uniquement d'affecter, sans plus de précision, un coefficient numérique à chacun des critères de choix retenus, par exemple, comme suit : valeur technique (coefficient 2) et prix (coefficient 1). Ce qui tendrait à indiquer par le coefficient 2 affecté au critère valeur technique de l'offre que l'acheteur public lui accordera deux fois plus d'importance au moment de considérer une offre qu'à celui du prix. Dans le même genre, ces coefficients peuvent-ils être exprimés sous forme de pourcentage reflétant l'importance de chaque critère par rapport aux autres (ex : délai d'exécution 30 %, valeur technique 50 % et prix 20 %). Ou s'agit-il de manière plus complexe d'introduire, comme l'accepte la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE, 17 septembre 2002, Concordia bus Finland Oy Ab, affaire C-513/99), un système de notation des offres selon une échelle de valeur préétablie, la note obtenue au regard de chaque critère étant multipliée par un coefficient numérique plus ou moins grand selon l'importance attribuée à chaque critère pris en compte. L'addition de l'ensemble des notes, une fois multipliées par leurs coefficients respectifs, rendant compte du caractère économiquement plus ou moins avantageux de chaque offre comparée aux autres. Dans ce sens, il lui demande donc de préciser quelles sont les modalités de pondération des critères de choix d'une offre économiquement la plus avantageuse et quel est le système le plus simple qui s'imposé et pourrait être conseillé.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 19/05/2005

Le choix de l'offre économiquement la plus avantageuse s'effectue après application des critères d'attribution du marché définis par l'acheteur. Ces critères, instruments indispensables de transparence dont le non-respect porte atteinte aux règles de publicité et de mise en concurrence, sont hiérarchisés ou pondérés. En effet, l'article 53 du code des marchés publics dans sa rédaction issue du décret n° 2004-15 du 7 janvier 2004 modifié prévoit en effet que : « (...) Il. - Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, la personne publique se fonde sur divers critères variables selon l'objet du marché, notamment le coût d'utilisation, la valeur technique de l'offre, son caractère innovant, ses performances en matière de protection de l'environnement, le délai d'exécution les qualités esthétiques et fonctionnelles, le service après-vente et l'assistance technique, la date et le délai de livraison, le prix des prestations. D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché (...). Ces critères sont pondérés ou à défaut hiérarchisés ». Par ailleurs, dans la circulaire du 7 janvier 2004 portant manuel d'application du code des marchés publics, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a appelé l'attention de l'acheteur public « sur l'obligation et l'intérêt de la pondération des critères, ou à défaut de leur hiérarchisation, telle que publiée en amont dans l'avis de publicité ou leur règlement de consultation. ». L'acheteur public demeure libre de pondérer ou hiérarchiser les critères. En effet, la directive n° 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services n'est pas, à ce jour, transposée en droit national. Elle ne s'impose donc pas en droit français. Par ailleurs, il convient de relativiser la portée de l'ordonnance du 11 mai 2004 du tribunal administratif de Nice, Société varoise de construction routière c/commune de la Seyne-sur-mer - n° 0401930. Cette décision a été rendue dans le cadre de la procédure d'urgence par le juge des référés et sur laquelle le Conseil d'État n'a pas eu à se prononcer en appel. Elle a donc vocation à régler un cas d'espèce et ne saurait valoir jurisprudence concernant cette question. L'intention du pouvoir réglementaire a clairement été de poser une alternative, laissée à la libre appréciation des acheteurs publics, entre pondération et hiérarchisation des critères. Cette alternative a été introduite dans le code afin de permettre aux acheteurs de se familiariser avec le mécanisme de pondération des critères et ainsi de se préparer aux nouvelles règles posées par les directives qui imposent le recours à la pondération, sauf cas où la pondération n'est pas possible, l'acheteur public devant alors pouvoir justifier cette impossibilité. En effet, la transposition de la directive, dite « directive classique », tout comme celle de la directive 2004/17/CE du 31 mars 2004 portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux, dite « directive secteurs spéciaux », sera réalisée en 2005. Dans le cadre de la liberté conférée aux acheteurs publics, aucune instruction n'est donnée par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il appartient à chaque acheteur d'élaborer sa propre méthode en fonction de l'importance respective qu'il entend donner à chacun des critères définis par lui pour la sélection des offres.

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