Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 20/01/2005

M. Jean-Louis Masson attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur le fait que le scrutin cantonal actuellement en vigueur pour élire les conseillers généraux est à la fois injuste et archaïque. Injuste car on peut constater d'énormes disproportions de population d'un canton à l'autre d'un même département, le rapport dépassant souvent le seuil de un à dix. Archaïque car il a été figé depuis plus de deux siècles, et les découpages des cantons ne correspondent plus aux réalités humaines. De plus, les cantons créés au cours des trente dernières années l'ont souvent été avec des arrière-pensées politiques, qui conduisent par exemple à ce qu'un même canton soit formé de deux ou trois parties disjointes, parfois éloignées de plusieurs kilomètres. Les ministres de l'intérieur successifs ont pris l'initiative d'améliorer le maillage de l'administration territoriale en renforçant l'intercommunalité, ce qui a permis une couverture du territoire des différents départements par des groupements de communes à fiscalité propre (EPCI tels que communautés de communes, communautés d'agglomération...). A la différence du découpage cantonal, celui des EPCI est récent et correspond à de réelles affinités économiques, humaines et sociales. Il souhaiterait donc qu'il lui indique si le découpage actuel des cantons ne pourrait pas être avantageusement remplacé par un système d'élection des conseillers généraux dans le cadre du périmètre des EPCI, chaque EPCI ayant un nombre de conseils généraux à élire proportionnel à sa population. La désignation pourrait par exemple être effectuée au scrutin majoritaire pour les petits EPCI et au scrutin proportionnel pour les autres, ce qui favoriserait aussi une meilleure représentativité des diverses sensibilités.

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Réponse du Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales publiée le 24/03/2005

Les conseillers généraux sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours conformément à l'article L. 193 du code électoral. Ce mode de scrutin, institué par la loi du 10 août 1871, était déjà en vigueur dans ses grandes lignes lorsque le principe de l'élection des conseillers généraux a été consacré par la loi du 22 juin 1833. Son ancienneté atteste l'importance du lien direct existant entre les élus et les électeurs qui constitue un réel facteur de participation électorale. Il a permis de garantir « la représentation des composantes territoriales » rappelée par le Conseil constitutionnel (décision n° 82-147 DC du 2 décembre 1982). Il contribue à doter les conseils généraux d'une majorité stable. Par ailleurs, l'objectif continu des réformes cantonales a été de réduire les disparités démographiques afin d'assurer systématiquement une meilleure représentation des secteurs urbains : 700 cantons ont donc été créés depuis 1973. L'adoption d'un nouveau découpage qui respecterait les limites des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre apparaît séduisante. Elle poserait, dans la pratique, de grandes difficultés. Le canton est une subdivision du département décidée par décret en Conseil d'Etat alors que la coopération intercommunale se fonde sur la libre volonté des communes conformément à l'article L. 5210-1 du code général des collectivités territoriales. Cela reviendrait à laisser aux communes le soin de déterminer les circonscriptions électorales. De plus, la situation de la carte intercommunale est extrêmement diversifiée. Lorsque les communes n'appartiennent à aucune structure intercommunale, des périmètres plus ou moins importants échapperaient à ce maillage et devraient faire l'objet d'un traitement particulier. En outre, l'intercommunalité franchit parfois les limites départementales. Juridiquement, le mode de scrutin mixte suggéré par l'honorable parlementaire, majoritaire dans les intercommunalités en deça d'un certain seuil de population et proportionnel ailleurs, serait probablement contraire au principe constitutionnel d'égalité du vote, les représentants d'une même collectivité élue au suffrage universel direct devant être désignés selon des modalités identiques. Techniquement, la constitution de deux listes d'intercommunalités dotées d'un nombre à peu près égal de sièges pour respecter le principe du renouvellement triennal par moitié des conseils généraux prescrit par l'article L. 192 du code électoral serait rendue plus difficile dans le cadre de ce mode de scrutin. En outre, la constitution de majorités claires et stables pourrait être compromise par l'introduction de la représentation proportionnelle. En conséquence, le Gouvernement n'entend pas modifier le mode d'élection des conseillers généraux.

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