Question de M. FOUCAUD Thierry (Seine-Maritime - CRC) publiée le 19/03/2005

M. Thierry Foucaud souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la progression du rendement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. D'après les indicateurs budgétaires communiqués par le ministère, cet impôt a rapporté 5,9 % de plus à l'Etat l'année dernière. Ce résultat dément les évaluations soumises à la commission parlementaire présidée par Jean-François Bénard, commission qui concluait que l'Etat ne tirerait aucun profit de la montée du prix du pétrole. Par ailleurs, les profits des groupes pétroliers, et notamment du groupe Total, connaissent également des hausses importantes. Les prix de l'essence à la pompe, ceux du fuel, restent quant à eux très élevés pour les ménages modestes et moyens. Aussi, il lui demande de réunir à nouveau ladite commission, afin que la plus-value fiscale - taxe intérieure sur les produits pétroliers et taxe sur la valeur ajoutée - soit redistribuée aux plus modestes, et que sa mission soit élargie aux mesures à prendre pour que les profits réalisés par les groupes pétroliers bénéficient au plus grand nombre.

- page 1961


Réponse du Secrétariat d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et à la ruralité publiée le 04/05/2005

Réponse apportée en séance publique le 03/05/2005

M. Thierry Foucaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, je voulais attirer votre attention sur la progression du rendement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, et sur le fait qu'il faille prendre des mesures positives, qui, à mon avis, sont possibles pour les Français.

D'après les indicateurs budgétaires communiqués par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, cet impôt a rapporté 5,9 % de plus à l'Etat l'année dernière, de janvier à janvier.

Or, lors du débat budgétaire sur la loi de finances pour 2005, nous étions nombreux à nous inquiéter non seulement du prix du baril retenu par le Gouvernement pour bâtir son projet de budget, mais surtout du prix de l'essence à la pompe et du prix du fuel, dont les montants élevés grèvent les budgets des ménages modestes et moyens.

Les indicateurs ne nous fournissent d'ailleurs pas d'éléments concernant les recettes de la TVA liées aux produits pétroliers. A ce sujet, je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, avoir quelques éclaircissements sur ce point.

Nous demandions notamment le rétablissement de la TIPP flottante. Le Gouvernement avait répondu par la mise en place d'une commission parlementaire présidée par M. Jean-François Bénard, qui, au vu des chiffres fournis par le ministère de l'économie, a conclu que l'Etat ne tirait aucun profit de la montée du prix du pétrole.

Un geste minime avait néanmoins été consenti : une prime de 70 euros en faveur des titulaires du minimum vieillesse. Il en a seulement coûté 50 millions d'euros à l'Etat.

D'après les derniers résultats des rentrées fiscales, nous devons, me semble-t-il, réexaminer ces conclusions.

C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande de réétudier la question avec la commission parlementaire, afin que la plus-value fiscale - taxe intérieure sur les produits pétroliers et taxe sur la valeur ajoutée - soit chiffrée et redistribuée aux plus modestes.

Cette commission pourrait également se pencher sur la question des profits des groupes pétroliers ; les profits du groupe Total étaient ainsi en augmentation de 23 % l'année dernière.

Comme tous les Français, nous nous apercevons en effet que les grands groupes consacrent leurs profits à l'attribution de dividendes, mais aussi au rachat d'autres sociétés pétrolières, et non, par conséquent, à des investissements dignes de ce nom.

Puisque l'augmentation du prix du gaz annoncée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est justifiée par l'augmentation des prix du pétrole, il conviendrait également d'aborder ce sujet.

L'annonce d'une augmentation du prix du gaz inquiète les 10 millions d'abonnés. Les Français souffrent déjà de la hausse du prix des carburants, et il semble que ce soit toujours le consommateur qui subisse de plein fouet les augmentations.

En bref, cette commission pourrait étudier les mesures qu'il serait urgent de prendre afin que l'augmentation du prix du baril ne conduise pas à amputer le pouvoir d'achat des ménages modestes et moyens, alors que les grands groupes pétroliers, eux, s'enrichissent.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et à la ruralité. Monsieur le sénateur, vous avez interrogé le ministre de l'économie sur le rendement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP. Je vous prie de bien vouloir excuser M. Thierry Breton, qui est retenu par des engagements internationaux et qui m'a demandé de le remplacer pour répondre à votre question.

Contrairement à ce que vous semblez affirmer, monsieur le sénateur, je vous confirme, à l'appui des résultats de la commission Bénard, que la forte hausse des cours du pétrole en 2004 n'a pas généré de surplus budgétaire.

Cette commission, comprenant des parlementaires de tous les groupes et présidée par un magistrat de la Cour des comptes, avait précisément pour mission de déterminer les recettes, en plus ou en moins, issues de la TIPP. En novembre 2004, elle avait conclu à une moins-value de 770 millions d'euros.

Pour l'ensemble de l'année 2004, les recettes de TIPP ont été inférieures de près de 4 % aux prévisions retenues pour le calcul du budget. Pour mémoire, lors de la loi de finances initiale pour 2004, les recettes de TIPP ont été estimées à 25 910 millions d'euros.

En effet, la hausse des prix du pétrole n'a eu aucune incidence favorable sur les recouvrements de TIPP, puisque celle-ci est calculée sur les volumes de produits pétroliers mis à la consommation, très atones pour l'année 2004.

Les conclusions de la commission Bénard restent valables : même en tenant compte des montants recouvrés au titre de la TVA pétrolière, le solde final pour l'Etat demeure négatif. Il n'y a donc pas de plus-value fiscale à redistribuer.

Par ailleurs, puisque vous évoquiez certaines situations sectorielles préoccupantes, je tiens à rappeler que le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures afin de soutenir les secteurs professionnels les plus touchés par la hausse des prix du pétrole ; je pense notamment aux agriculteurs et aux professionnels routiers.

Enfin, le Gouvernement a souhaité que ceux de nos compatriotes pour qui la facture de fioul pour le chauffage est la plus douloureuse, c'est-à-dire ceux qui ont une petite retraite, puissent bénéficier d'une prime exceptionnelle. C'est ainsi que, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2004, 49 millions d'euros ont été débloqués au profit des bénéficiaires du minimum vieillesse. Contrairement à ce que vous dites, ce n'est pas un geste modeste ; c'est même un geste important sur le plan budgétaire !

Telles sont les réponses précises que M. Thierry Breton souhaitait vous apporter et qui, j'en suis persuadé, vous donneront satisfaction, car elles s'appuient sur les faits et sur une évaluation très rigoureuse et indépendante de la commission Bénard. Nous restons bien évidemment très attentifs à l'évolution de ce dossier essentiel.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous m'avez répondu que le rendement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers n'avait pas généré de surplus budgétaire. Mais vous ne m'avez donné aucun chiffre. Je maintiens par conséquent ma proposition de réunir à nouveau la commission Bénard. L'erreur est humaine ! L'année dernière, je me souviens avoir entendu M. Devedjian annoncer que le prix du baril serait de 30 à 35 dollars pour l'année 2005 !

Permettez-moi d'appeler votre attention sur trois points.

D'abord, il faut regarder de plus près les profits actuels qui sont réalisés par les grands groupes pétroliers et qui sont consacrés aux dividendes et au rachat d'autres sociétés pétrolières, mais non à un investissement digne de ce nom.

Ensuite, vous pensez aujourd'hui que l'on surestime les recettes de TIPP. Mais, lors de l'élaboration de la loi de finances, le Gouvernement qualifiait la part de cet impôt transférée aux départements et aux régions de recette dynamique ! On nous affirme par ailleurs que la hausse des prix n'a aucun impact. Vous allez m'expliquer, car je ne comprends plus très bien !

Enfin, je vous demande de nouveau de protéger les consommateurs face à tous ceux qui profitent de l'augmentation des prix du pétrole.

- page 3397

Page mise à jour le