Question de M. CHARASSE Michel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 07/04/2005

M. Michel Charasse signale à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, qu'un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme, en date du 7 juin 2001, n° 39594/98, a rappelé la pratique des modalités de communication des conclusions du commissaire du Gouvernement devant les juridictions administratives. En effet, un citoyen français soutenait devant la Cour européenne des droits de l'homme avoir été privé d'un procès équitable, en raison : d'une part, de l'impossibilité d'obtenir, préalablement à l'audience, la communication des conclusions du commissaire du Gouvernement et de pouvoir y répliquer à l'audience, et d'autre part de la participation du commissaire au Gouvernement au délibéré. La Cour européenne des droits de l'homme a rappelé, concernant le premier point, qu'il était possible pour les avocats de demander au commissaire au Gouvernement, avant l'audience, le sens général de ses conclusions et, le cas échéant, d'établir une note en délibéré permettant aux parties de répliquer aux conclusions du commissaire au Gouvernement. La Cour européenne des droits de l'homme avait conclu que la procédure suivie par le Conseil d'Etat offrait suffisamment de garanties aux justiciables, au regard du respect du contradictoire, nonobstant la circonstance que le commissaire au Gouvernement prenne la parole en dernier. En revanche, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que la participation du commissaire au Gouvernement au délibéré méconnaissait les dispositions de l'article 6-1 de la Convention, notamment parce que le justiciable doit avoir la garantie que le commissaire ne puisse pas par sa présence exercer une certaine influence sur l'issue du délibéré. Concernant les modalités de communication des conclusions du commissaire du Gouvernement devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, force est de constater que l'attitude des greffes de tribunaux et des cours n'est pas totalement homogène. En effet, certains tribunaux administratifs ou cours administratives d'appel et ce malgré la demande adressée au greffe, ne communiquent toujours pas le sens général des conclusions du commissaire du Gouvernement, avant le délibéré. Une communication est parfois adressée par les greffes et ce, postérieurement à la date de l'audience, en indiquant simplement si le commissaire au Gouvernement a demandé le rejet ou l'acceptation de la requête engagée par le contribuable, sans préciser les éléments retenus dans son argumentation. Aussi, pour mettre un terme à ces incertitudes et pour parvenir à une attitude unique et homogène de l'ensemble des juridictions concernées, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître s'il envisage de préciser au moins par instruction les modalités concrètes et explicites devant être adoptées par les greffes des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, concernant la communication du sens général des conclusions du commissaire du Gouvernement afin que le cas échéant, les contribuables soient en mesure de déposer dans les temps une note en délibéré permettant ainsi de répliquer aux conclusions du commissaire du Gouvernement.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 07/07/2005

L'honorable parlementaire déplore l'absence de pratique homogène des juridictions administratives quant à la procédure de communication des conclusions du commissaire du Gouvernement, en dépit de l'arrêt Kress contre France, rendu le 7 juin 2001, par lequel la Cour européenne des droits de l'homme a considéré que « ... les avocats qui le souhaitent peuvent demander au commissaire du Gouvernement avant l'audience, le sens général de ses conclusions ». L'intervention de l'arrêt de la Cour précité n'a modifié ni les conditions ni l'esprit dans lesquels s'effectue, dans les juridictions administratives, la communication aux parties du sens général des conclusions du commissaire du Gouvernement. L'échange avec l'avocat, à l'initiative de celui-ci, porte sur le sens des conclusions et non sur le détail du raisonnement du commissaire. Intervenant dans les jours ou heures précédant l'audience, il a lieu à un moment où, juridiquement, l'instruction n'est pas nécessairement close. L'usage veut, toutefois, que l'avocat, après s'être ainsi entretenu avec un commissaire du Gouvernement, s'interdise de produire un nouveau mémoire faisant valoir un moyen ou une argumentation supplémentaire. En revanche, rien ne s'oppose à ce que l'entretien avec le commissaire incite l'avocat à présenter des observations orales ou à préparer une note en délibéré, initiatives qui ne peuvent modifier les conditions du débat contradictoire entre les parties, tel qu'il résulte de l'instruction écrite, mais seulement, le cas échéant, conduire la formation de jugement à rayer l'affaire du rôle pour rouvrir l'instruction. Dans les affaires dispensées de ministère d'avocat, le requérant qui le souhaite doit être mis en mesure de recevoir les mêmes informations de la part du commissaire du Gouvernement. Une note sera adressée, dans les prochains jours, aux présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel afin de rappeler ces principes et de s'assurer d'une attitude homogène des juridictions administratives en matière de communication des conclusions des commissaires du Gouvernement. L'attention des chefs de juridiction sera également attirée sur la nécessité, pour les greffes, de veiller à permettre aux avocats ou aux parties qui le souhaitent de prendre contact avec le commissaire du Gouvernement, dans un délai utile.

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