Question de M. HAENEL Hubert (Haut-Rhin - UMP) publiée le 15/06/2006

M. Hubert Haenel appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire sur les situations auxquelles sont confrontés les maires pour trouver la juste démarche dans le cadre législatif, réglementaire, administratif voire judiciaire lorsqu'ils doivent « débarrasser » un terrain communal qui était irrégulièrement occupé par des gens du voyage qui quittent les lieux en laissant derrière eux des épaves de caravanes contenant des détritus de toute sorte présentant un danger pour la salubrité voire la tranquillité publique compte tenu de la proximité de maisons habitées (référence à l'affaire qui concernait le maire d'Ensisheim dans le Haut-Rhin).
Il lui demande s'il n'y aurait pas lieu d'adresser une circulaire à tous les préfets et de traiter ce type d'affaire avec l'Association des Maires de France et les associations départementales car les maires, corvéables et justiciables à merci, sont révoltés de voir comment ils sont traités.

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Réponse du Ministère délégué aux collectivités territoriales publiée le 11/10/2006

Réponse apportée en séance publique le 10/10/2006

M. le président. La parole est à M. Hubert Haenel, auteur de la question n° 1081, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Hubert Haenel. Monsieur le ministre, ma question concerne les gens du voyage.

Malgré les évolutions législatives et réglementaires, les maires sont toujours confrontés à des situations inextricables. Que doit faire, par exemple, un maire pour débarrasser un terrain communal irrégulièrement occupé par des gens du voyage qui quittent les lieux en laissant derrière eux des épaves de caravanes contenant des détritus de toutes sortes et présentant un danger pour la salubrité, voire la tranquillité publiques, compte tenu de leur proximité avec des maisons d'habitation ?

Récemment, un maire du Haut-Rhin confronté à cette situation a été condamné au-delà des réquisitions du ministère public pour avoir détruit des épaves de caravanes, ayant appartenu à des gens du voyage qui étaient en situation illégale sur le territoire français. Il attend toujours que les représentants de l'État, notamment le procureur de la République, lui indiquent ce qu'il aurait dû faire.

Dans de telles situations, comme dans beaucoup d'autres d'ailleurs, les maires sont corvéables et justiciables à merci. Sur qui peuvent-ils compter pour les aider à assumer leurs responsabilités ?

Je prendrai un autre exemple. Toujours dans mon département, la présence massive et durable, depuis 2004, de gens du voyage sur un site privé d'une zone industrielle exaspère les entreprises. ALSABAIL, le propriétaire, qui a tout essayé, se déclare d'ailleurs prêt à engager un recours contre l'État pour carence. Les dégradations massives à l'intérieur comme à l'extérieur d'un bâtiment ont occasionné des dégâts estimés à quelque 4,3 millions d'euros ! Quatre requêtes en expulsion formulées devant le tribunal de grande instance de Colmar ont été rejetées, les procédures en référé contre des personnes nommément désignées ne pouvant aboutir puisque les préfectures refusent de communiquer les noms correspondant aux numéros d'immatriculation des véhicules relevés sur place.

Alors étonnons-nous que certains maires, exaspérés, en aient ras-le-bol et règlent parfois les problèmes d'une manière peu orthodoxe, mais à la plus grande satisfaction des habitants de leur commune ! Toutefois, l'État ne les ménage pas, notamment la justice. Que peut et doit faire cet État que vous représentez, monsieur le ministre ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Nicolas Sarkozy, qui m'a chargé de vous répondre aussi précisément que possible, car il sait combien vous êtes préoccupé par cette question.

Comme vous le savez, l'élimination des épaves de caravanes et des détritus qu'elles contiennent est mise en oeuvre au titre du code de l'environnement.

Aux termes de ce code, il appartient à la personne qui produit, détient ou abandonne des déchets d'en faire assurer l'élimination. À défaut, l'autorité de police peut, après mise en demeure, assurer d'office l'exécution des travaux nécessaires aux frais du responsable.

Le maire peut donc intervenir en matière de nuisances causées par les déchets sur un terrain. Cette intervention s'impose notamment lorsque ces déchets mettent en cause gravement la salubrité et la sécurité publiques.

Il doit, pour ce faire, adresser une mise en demeure à l'auteur des dépôts, assortie d'un délai pour qu'il procède ou fasse procéder à l'enlèvement. Une fois le délai échu, il peut d'office faire enlever les déchets, et ce toujours aux frais du contrevenant.

Je précise, monsieur le sénateur, que l'exercice du pouvoir de police doit toujours être, comme vous le savez, proportionné à son objet. Lorsqu'il s'agit d'enlever ou de détruire des caravanes de gens du voyage, même à l'état d'épaves, une particulière circonspection est de mise. En effet, ces caravanes sont considérées comme des résidences mobiles qui constituent l'habitat traditionnel de leurs occupants. La destruction d'une résidence mobile serait de nature à constituer une voie de fait susceptible d'entraîner la responsabilité pénale de son auteur. C'est donc là toute la difficulté.

Il convient donc de s'assurer préalablement que les caravanes concernées sont en état d'abandon manifeste. En principe, lorsqu'elles sont immatriculées, il y a lieu de faire procéder à la recherche de leur propriétaire. Ce n'est que lorsque l'abandon définitif de la caravane et son état d'épave sont avérés que celle-ci peut être considérée comme un déchet et remise à un démolisseur.

Enfin, monsieur le sénateur, le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a d'ores et déjà apporté des précisions aux élus sur la réalisation des aires d'accueil des gens du voyage par la voie du Guide du maire. En outre, une réflexion a également été entreprise quant à l'élaboration d'un document d'information générale précisant les pouvoirs de police du maire afférents à l'accueil des gens du voyage.

J'ajoute que la Haute Assemblée a adopté, lors de l'examen en première lecture du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, un amendement, présenté par votre collègue Pierre Hérisson, qui permettra aux maires de faire procéder avec plus de célérité à l'évacuation, par les gens du voyage, de terrains qu'ils occupent indûment.

Telles sont les informations qu'il me semblait utile de porter à votre connaissance, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Hubert Haenel.

M. Hubert Haenel. Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre. Votre réponse, qui constitue un début, était attendue par de nombreux maires, notamment celui auquel j'ai fait allusion dans mon intervention, et prouve que vous êtes à la fois un juriste et un homme de terrain.

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