Question de M. SEILLIER Bernard (Aveyron - RDSE) publiée le 06/10/2006

Question posée en séance publique le 05/10/2006

M. Bernard Seillier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Ici même, en décembre dernier, abordant le problème crucial de l'apprentissage de la lecture, vous avez annoncé le nécessaire abandon de la méthode globale et la possibilité désormais pour les enseignants d'utiliser la méthode analytique sans être sanctionnés.

Votre décision n'était ni arbitraire ni isolée. Elle était étayée par les résultats expérimentalement constatés et par des travaux des scientifiques démontrant la conformité des méthodes analytiques aux requêtes d'un cerveau d'enfant en cours de structuration.

Vous avez ensuite adressé une circulaire sur l'apprentissage de la lecture aux inspecteurs d'académie et aux directeurs des Instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM, le 3 janvier, suivie d'un arrêté, le 24 mars dernier.

M. Yannick Bodin. Cela a fait « pschitt » !

M. Bernard Seillier. Malheureusement, force est de constater que certains syndicats d'enseignants, bravant votre autorité ministérielle, refusent par parti pris idéologique les évidences de l'expérience confirmées par la connaissance scientifique du cerveau.

M. Jean-Pierre Sueur. C'est faux !

M. Bernard Seillier. Ils ont récemment diffusé 500 000 tracts intitulés : Apprendre à lire, pas si simple ! condamnant implicitement votre circulaire, faisant l'éloge des méthodes synthétiques et mettant l'accent sur le fait qu'aujourd'hui « les jeunes n'éprouvent pas plus de difficultés en matière de lecture que leurs aînés, bien au contraire ».

M. Jean-Pierre Sueur. Non au scientisme !

M. Bernard Seillier. Et ce alors qu'il est de notoriété publique qu'un collégien sur cinq ne maîtrise pas correctement la lecture à son entrée en sixième !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On licencie ceux qui ne pensent pas la même chose !

M. Bernard Seillier. Or la première égalité des chances à l'école n'est-elle pas que tous les enfants apprennent à lire avec succès par la méthode dite « syllabique » parce qu'elle respecte le fonctionnement cérébral, associant consonnes et voyelles en syllabes, puis les syllabes entre elles, permettant ainsi de lire les mots avec sûreté ?

M. Didier Boulaud. Même moi, je n'ai pas appris avec la méthode globale !

M. Bernard Seillier. Devant cette situation plutôt scandaleuse quand on pense que l'attitude contestataire vient de personnes dont la mission est aussi de transmettre l'instruction civique et les règles démocratiques, quelles initiatives, quelles mesures concrètes pensez-vous prendre, monsieur le ministre, pour que tous les professeurs des écoles déjà prêts à utiliser la méthode syllabique puissent le faire sans intimidation...

M. Didier Boulaud. Quel retour en arrière !

M. René-Pierre Signé. C'est trop long !

M. Bernard Seillier. ... et avec possibilité de recours en cas d'abus, et pour que les autres professeurs soient très rapidement formés dès cet automne 2006 ? C'est tout à fait réalisable quand on sait que, devant la débâcle actuelle, un peu partout en France des parents, quelles que soient leurs opinions, s'organisent pour se former en quelques jours afin d'apprendre à lire à leurs enfants...

M. Didier Boulaud. C'est une mystification ! La vérité, c'est que la méthode globale n'existe plus depuis 1954 !

M. Bernard Seillier. ...photocopiant des fiches, vrais samizdats pédagogiques dans un pays qui doit rester celui de la liberté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 06/10/2006

Réponse apportée en séance publique le 05/10/2006

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, l'apprentissage de la lecture se fait dès les premières leçons du cours préparatoire par l'apprentissage des lettres et des sons qui forment des syllabes.

M. Didier Boulaud. À la maternelle, on apprend à lire !

M. Gilles de Robien, ministre. L'on forme ensuite les mots, puis les phrases qui font sens. Les scientifiques ont clairement dit que le cerveau apprenait par éléments.

M. Didier Boulaud. Vous êtes en retard d'une guerre !

M. Gilles de Robien, ministre. Nous avons évidemment le devoir de suivre les recommandations des scientifiques.

M. Jean-Pierre Sueur. Quels scientifiques ?

M. Gilles de Robien, ministre. Quels moyens ai-je mis en place ?

M. Didier Boulaud. Des oukases !

M. Gilles de Robien, ministre. Premièrement, 350 000 plaquettes d'explication ont été envoyées aux professeurs des écoles.

Deuxièmement, un DVD a été réalisé et les scientifiques s'y expriment sur ce sujet.

M. Didier Boulaud. Pas ceux que vous avez licenciés !

M. Gilles de Robien, ministre. Troisièmement, l'inspection générale est mobilisée : elle me remettra un rapport à la fin du mois d'octobre.

Quatrièmement, je demande à tous les recteurs de France de mettre en place, dans le cadre de la formation continue,...

M. Didier Boulaud. Vérifiez qu'ils savent lire avant !

M. Gilles de Robien, ministre. ... des apprentissages et des formations continues à l'intention des maîtres d'école en poste actuellement, de façon qu'il n'y ait aucune ambiguïté et qu'ils puissent suivre les textes officiels.

Par ailleurs, je travaille actuellement sur le cahier des charges des futurs IUFM...

M. Didier Boulaud. En licenciant les professeurs !

M. Gilles de Robien, ministre. ... dans le cadre de la loi d'orientation que vous avez votée, monsieur le sénateur ; sachez que les textes officiels s'appliqueront aux futurs enseignants.

Monsieur le sénateur, je suis sûr que l'immense majorité de la communauté éducative est tout à fait loyale vis-à-vis des textes officiels.

M. Didier Boulaud. Préparez vos valises, votre CDD sera bientôt terminé !

M. Gilles de Robien, ministre. Comme tous les fonctionnaires, ils ont le devoir de suivre les textes officiels.

D'ailleurs, un inspecteur de l'éducation nationale fait actuellement l'objet d'une procédure disciplinaire motivée par un manquement grave et caractérisé à ses obligations.

Je rappelle qu'un cadre de la fonction publique doit appliquer les instructions du ministre et doit également les faire appliquer. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.- Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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