Question de Mme SCHILLINGER Patricia (Haut-Rhin - SOC) publiée le 18/10/2007

Mme Patricia Schillinger attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les termes de l'article 713 du code civil français (dans sa rédaction issue de l'article 147 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004). En vertu de cette disposition résultant d'un vote du Parlement, les biens qui n'ont pas de maître appartiennent à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés. Le texte législatif ne subordonne pas à son entrée en vigueur de dispositions réglementaires nécessaires à son application. Le 8 mars 2006, une circulaire des ministres de l'intérieur et de l'économie et des finances prétendait amputer le domaine d'application de l'article 713 du code civil en excluant les biens mobiliers, alors que la loi ne comporte aucune distinction entre les biens mobiliers et les bien immobiliers. Les auteurs de la circulaire ont pensé pouvoir régulariser cette situation en utilisant la procédure des ordonnances et en faisant valider l'abus de pouvoir par l'ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006, acte de l'administration qui abroge (sous prétexte de la « compléter ») une loi votée par le Parlement et introduite dans le code civil. Il est évident que déterminer la « situation » des biens mobiliers pose parfois des problèmes plus délicats que celle des biens immobiliers. Une option administrative qui implique une critique du législateur, ne saurait autoriser l'administration à amender la loi. Le 21 avril 2006 étant chronologiquement postérieur au 13 août 2004 et l'ordonnance n'ayant pas de caractère interprétatif et ne pouvant produire d'effet rétroactif, elle lui demande, par conséquent, de bien vouloir lui indiquer si les biens mobiliers sans maître apparus dans l'espace juridique français entre les deux dates susdites appartiennent légalement à la commune sur le territoire de laquelle ils étaient situés.

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Réponse du Ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales publiée le 20/03/2008

La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a modifié le régime juridique d'acquisition des biens sans maître. Désormais, « les biens qui n'ont pas de maître appartiennent à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés. Toutefois, la propriété est transférée de plein droit à l'Etat si la commune renonce à exercer ses droits ». Pour sa part, le code général de la propriété des personnes publiques précise, dans le contexte de dévolution des biens sans maître aux communes, la consistance de ces biens (art. L. 1123-1) et modernise la procédure d'appréhension des immeubles qui étaient présumés sans maître (art. L. 1123-3). Dans ce cadre, l'article L. 1123-1 donne une base législative à la définition usuelle des biens sans maître et s'il constitue une disposition nouvelle, il n'a pas pour objet de restreindre le champ d'application de l'article 713 du code civil par rapport au droit antérieur résultant de la loi du 13 août 2004. En effet, il ressort des débats parlementaires qui ont précédé l'adoption de cette loi que le législateur a décidé d'une dévolution directe aux communes des biens sans maître, substituant celles-ci à l'Etat, sans pour autant modifier le périmètre de cette catégorie de biens. Ces débats font clairement apparaître que la question de la dévolution des biens sans maître fut exclusivement examinée sous l'angle des immeubles. Dès lors, s'agissant de la consistance des biens sans maître, même si le 1° de l'article L. 1123-1 du CGPPP ne précise pas la nature, mobilière ou immobilière, des biens visés, cette absence de précision ne suffit pas pour déduire que ce texte s'applique tant aux meubles qu'aux immeubles. Concernant les biens meubles, il n'existe pas de règles particulières permettant de les appréhender au titre des biens sans maître. L'application de l'article 2279 du code civil, qui précise qu'en fait de meubles, la possession vaut titre, demeure en tout état de cause possible. Les meubles sont, en outre, concernés par les dispositions sur les biens abandonnés et peuvent, à ce titre, éventuellement être appréhendés par l'Etat ou par une commune dans le respect des règles du droit civil ou encore sur le fondement de législations catégorielles. A titre d'exemples, les sommes et valeurs prescrites sont acquises par l'Etat dans les conditions prévues aux articles L. 1126-1 à L. 1126-4 du CGPPP et L. 27 (alinéa 6) et R. 47 à R. 51 du CDE. De même, les véhicules abandonnés sont remis au service chargé du domaine dans les conditions prévues à l'article L. 325-8 du code de la route. Sous certaines conditions, un bien meuble abandonné peut encore être considéré comme un déchet en vertu de l'article L. 541-1 du code de l'environnement et ainsi être appréhendé par une commune qui doit ensuite procéder à sa destruction. En définitive, il n'est pas possible de considérer que les biens mobiliers abandonnés apparus dans l'espace juridique français entre le 13 août 2004 et le 21 avril 2006 appartiennent légalement à la commune sur le territoire de laquelle ils étaient situés, au titre des biens sans maître.

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