Question de M. NOGRIX Philippe (Ille-et-Vilaine - UC-UDF) publiée le 13/12/2007

M. Philippe Nogrix rappelle à M. le ministre de la défense que, depuis de trop nombreux mois, on attend la confirmation de mise en condition opérationnelle des trois SIDM commandés sur étagère le 16 août 2001 afin d'éviter la lacune capacitaire de nos possibilités de surveillance de notre espace aérien, suite au retrait des Hunters hors d'usage. Sans revenir sur les nombreux avatars qui n'ont pas permis une mise à disposition prévue pour mai 2006, il lui semble aujourd'hui ne plus percevoir de volonté de posséder une réelle capacité de surveillance par des drones MALE, d'autant que le projet EUROMALE est abandonné. De temps en temps, on apprend que des accords sont passés, non plus sur des drones MALE, mais sur un drone d'EADS Allemagne dont on ne connaît pas exactement le niveau de développement ni l'engagement financier qu'il représente. Sans parler de l'échéance de sa mise à disposition ni de la quantité envisagée de commander. Il rappelle son attachement à doter nos armées de moyens de surveillance et de communications susceptibles de préserver nos forces sur le terrain ou de permettre de suivre des manifestations d'ampleur. Il lui demande de donner des éclairages précis sur sa volonté de décider le lancement d'une démarche d'acquisition afin de rassurer nos militaires qui sont inquiets de devoir se passer du soutien de tels équipements.

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Réponse du Ministère de la santé, de la jeunesse et des sports publiée le 30/01/2008

Réponse apportée en séance publique le 29/01/2008

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, auteur de la question n° 125, adressée à M. le ministre de la défense.

M. Philippe Nogrix. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vous prie d'excuser mon retard, dû à des problèmes de signalisation à la SNCF. Je déplore l'absence de M. le ministre de la défense, même si j'en comprends la raison. Lors des questions orales, il est tout de même sympathique d'avoir le ministre en face de soi, mais je me contenterai de la réponse de Mme la ministre avec beaucoup de plaisir. (Sourires.)

L'entrée en service des trois appareils de reconnaissance du Système intérimaire de drones moyenne altitude longue endurance, dit SIDM, est retardée mois après mois, semestre après semestre, depuis le mois de mai 2006, date initialement prévue par vos services pour le début de son utilisation opérationnelle.

Ces appareils, sans présence humaine à bord, sont réalisés par la société EADS à partir d'un appareil de type Eagle produit par une société israélienne. La commande initiale du ministère français de la défense remonte au 16 août 2001 ! Cette commande visait à éviter la rupture capacitaire des moyens de surveillance de notre espace aérien, alors assurée par des drones Hunter, devenus trop coûteux à maintenir en vol à partir de la fin de 2004. Que d'années passent !

Je vous rappelle que des manifestations importantes comme le G8 d'Évian, en juin 2003, ou les cérémonies du soixantième anniversaire du débarquement allié en Normandie, en mai 2004, ont été sécurisées par la surveillance aérienne assurée par les drones Hunter.

À l'heure où quasiment tous les pays, occidentaux ou non, dotés d'une armée de qualité n'engagent leurs forces sur un champ de bataille qu'appuyées par des drones de reconnaissance, et sans revenir sur les nombreux aléas qui n'ont pas permis la mise à disposition prévue en mai 2006, il me semble discerner aujourd'hui une absence de volonté de notre pays de posséder une telle capacité de surveillance par des drones MALE. Ce renoncement semble remonter à l'échec du projet EuroMALE, conçu par la France pour réaliser un appareil de ce type en coopération européenne.

Nous apprenons incidemment que des industriels français développent des projets comme l'Advanced UAV en Allemagne. Mais ni le niveau de développement, ni l'engagement financier de ces projets ne sont clairement identifiés, sans parler de l'échéance de leur mise à disposition, ni du nombre d'appareils qu'il est envisagé de commander.

M. le ministre connaît mon attachement à doter nos armées de moyens de surveillance et de communications susceptibles de préserver nos forces sur le terrain, moyens qui sont à usage dual, puisqu'ils permettent aussi aux autorités civiles de surveiller des manifestations d'ampleur. Il faut que M. le ministre nous donne des éclairages précis sur sa volonté de doter notre pays d'une telle capacité.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur, je tiens tout d'abord à excuser le ministre de la défense retenu, comme je l'ai dit tout à l'heure, aux obsèques des trois gendarmes décédés tragiquement vendredi dernier.

L'essor des technologies d'aéronefs sans pilote a donné naissance à plusieurs familles de drones aux applications variées, en fonction de leur vitesse, de leur altitude de vol et de leur endurance. Du mini-drone issu de l'aéromodélisme au drone endurant de la taille d'un avion de tourisme, toutes ces familles exploitent les atouts majeurs que constituent la réduction des risques humains et la permanence sur zone.

C'est ainsi que les systèmes de drones de surveillance ont pris une place importante dans notre dispositif de maîtrise de l'information sur les théâtres d'opération : l'analyse des images recueillies par leurs capteurs optique, infrarouge ou radar offre une aide précieuse à la décision.

Depuis plus d'une décennie, l'armée française met en oeuvre de tels systèmes dont les capacités s'améliorent significativement au fil des générations de matériels.

Si l'on met de côté les drones de combat, qui font l'objet d'une démarche de coopération européenne ambitieuse avec le démonstrateur Neuron, les programmes en cours se rangent en deux catégories : les drones tactiques et les drones endurants.

Votre question, monsieur le sénateur, porte sur les drones endurants et plus précisément sur le programme actuel, à savoir le Système intérimaire de drones moyenne altitude longue endurance, le SIDM, d'une part, et sur le programme futur Moyenne altitude longue endurance, dit « MALE », d'autre part.

Il est exact, monsieur le sénateur, que l'industriel a pris du retard dans la mise au point du SIDM. Composé de trois drones et d'un segment sol, le SIDM est actuellement testé au Centre d'expériences aériennes militaires de Mont-de Marsan, où il a fait son premier vol le 20 décembre dernier. La formation des futurs utilisateurs débutera en février, et la livraison à l'armée de l'air est prévue à l'été 2008.

Au-delà du SIDM, le programme MALE prépare la prochaine génération de drones endurants. L'objectif est d'apporter une plus grande capacité de surveillance de théâtre, avec des drones plus performants et plus nombreux.

Le projet de démonstrateur technologique « EuroMALE », annoncé lors du salon Eurosatory de 2004, n'a pas vu le jour faute d'avoir pu réunir trois partenaires majeurs afin d'en supporter le coût.

La société EADS a proposé une autre solution de nature à répondre aux besoins opérationnels de la France, de l'Allemagne et de l'Espagne.

Nos trois pays ont signé un arrangement technique en juillet 2007, afin d'approfondir la faisabilité de ce projet, et le contrat d'études a été notifié à la société EADS en décembre 2007.

L'engagement financier de la France est d'environ 20 millions d'euros, identique à celui de ses deux partenaires.

Voilà, monsieur le sénateur, la réponse que je souhaitais apporter, au nom de mon collègue Hervé Morin.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.

M. Philippe Nogrix. Je dois vous faire part de ma déception, car la description des technologies ne peut me satisfaire.

Je constate que nous avons de plus en plus d'hommes engagés sur le terrain. Aujourd'hui, avec les technologies qui sont mises en oeuvre sur le champ de bataille, il est nécessaire de n'engager nos troupes que lorsque nous savons ce qui se passe de l'autre côté de la ligne de démarcation.

Or, depuis maintenant quatre années, nous n'avons plus les moyens d'assurer la sécurité de l'engagement de nos troupes. Le retard pris dans un programme comme celui-là, qui pourrait très bien être inclus dans les investissements de nos armées, montre que nous n'avons pas su prendre les bonnes décisions.

Est-ce la faute de la DGA, des ministres successifs ? Il faut absolument que nous obtenions des réponses à ce sujet. Je vous demande de faire part de mon inquiétude à M. le ministre de la défense.

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