Question de M. VANLERENBERGHE Jean-Marie (Pas-de-Calais - UC-UDF) publiée le 29/05/2008

M. Jean-Marie Vanlerenberghe rappelle à Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité que le décret n° 2007-221 du 19 février 2007 prévoit que les établissements qui accueillent des personnes âgées, mentionnés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, doivent désormais être dirigés par un professionnel titulaire d'une certification au moins de niveau II ou titulaire du diplôme de cadre de santé ou d'un diplôme sanitaire ou social de niveau III sous certaines conditions.

Ce décret s'applique aux simples résidences pour personnes âgées valides. Or, ces résidences ne nécessitent qu'une gestion strictement administrative souvent assurée par un agent communal.

L'obligation de recruter un professionnel de haut niveau dans le secteur médico-social pour gérer ces résidences est injustifiée médicalement et socialement.

Surtout, cette obligation conduira à une augmentation significative des loyers supportés par des personnes âgées dont le niveau moyen de revenu est de 600 euros mensuels.

Quelles sont les dispositions prévues pour adapter l'application du décret à la réalité du terrain et pour ne pas affaiblir financièrement les personnes âgées déjà les plus démunies ?

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la famille publiée le 09/07/2008

Réponse apportée en séance publique le 08/07/2008

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Ma question s'adresse à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.

Madame la secrétaire d'État, le décret n° 2007-221 du 19 février 2007 prévoit que les établissements sociaux ou médicosociaux gérés par un centre communal ou intercommunal d'action sociale devront désormais être dirigés par une personne titulaire d'un diplôme sanitaire ou social de niveau II ou de niveau III dans certaines conditions.

Je comprends la volonté exprimée par ce décret de renforcer les compétences des professionnels en charge des personnes accueillies dans ces établissements.

Cependant, pour certains services que les aléas de la vie administrative ont classé dans la catégorie « Établissements sociaux ou médicosociaux », ce décret est totalement inadapté. C'est le cas notamment des résidences pour personnes âgées valides. Ces résidences, comme leur nom l'indique, n'accueillent que des personnes autonomes et indépendantes. Dès que leur état de santé se détériore et qu'elles ont besoin d'une assistance médicale soutenue, elles doivent quitter l'établissement, comme le stipule leur contrat.

Les tâches administratives de gestion de ces résidences se résument à analyser des dossiers et à encaisser des loyers. Elles n'exigent absolument aucune compétence – j'y insiste –en matière médicosociale. D'ailleurs, depuis que ces services existent, c'est-à-dire depuis trente ans, c'est un employé de la commune ou du centre d'action sociale, dans l'immense majorité des cas, qui assume simplement leur gestion.

Ces résidences permettent, dans des centaines de petites communes en France, à des personnes âgées aux revenus très modestes d'être correctement logées. Un diplômé de niveau III dans le secteur médicosocial coûte au moins 36 000 euros annuels. Pour faire face à cette dépense nouvelle, et encore une fois totalement inutile, les communes seront forcées d'augmenter les loyers alors que les revenus mensuels des résidents sont le plus souvent largement inférieurs au SMIC.

Madame la secrétaire d'État, cette situation – je suis sûr que vous en conviendrez – est absurde. Il est absurde, en effet, de demander à des personnes qui parviennent tout juste à vivre dignement de payer une centaine d'euros de plus par mois pour le même service, alors que, à l'origine de cette demande, il n'y a aucune raison médicale, aucune raison sanitaire, aucune raison sociale, il n'y a que les effets involontaires de classements administratifs. De plus, le délai de sept ans laissé aux collectivités prévu par le décret ne change rien au problème, il ne fait que repousser ce dernier.

Ma question est donc la suivante : madame la secrétaire d'État, pouvez-vous sortir les résidences pour personnes âgées valides du champ du décret n° 2007-221 du 19 février 2007, pour ne pas rendre inutilement et injustement la vie plus difficile à des personnes âgées déjà fragilisées, qui ont besoin de notre soutien et de votre écoute ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention de Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité, sur la direction des établissements accueillant des personnes âgées.

La loi du 2 janvier 2002 a inséré au paragraphe II de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles l'obligation pour toute personne qui assume la direction d'un établissement ou service social ou médico-social d'être suffisamment qualifiée.

Le décret d'application du 19 février 2007 détermine trois niveaux de qualification minimale qu'un large débat avec les représentants du secteur – employeurs et salariés – a conduit à retenir comme opportuns et pertinents en fonction de la taille et du mode d'organisation des établissements et/ou de l'amplitude du poste de direction.

Ainsi, un logement foyer non médicalisé, comme vous l'évoquez dans votre question, pourra être dirigé par un titulaire du diplôme de cadre de santé ou d'un diplôme sanitaire ou social de niveau III à la condition qu'il ait acquis une expérience professionnelle de trois ans dans ce secteur et une formation à l'encadrement.

Cette exigence a été voulue pour garantir une direction compétente, capable d'accueillir des usagers par définition fragiles, dans le respect de leurs droits et de toutes leurs potentialités.

Cet enjeu et la valeur législative du principe n'autorisent donc pas aujourd'hui d'accommodements. Il faut en effet garder à l'esprit que, si ces logements-foyers, à la différence des établissements médicalisés, ne sont pas appelés à dispenser des soins directement, ils n'en ont pas moins un rôle essentiel à jouer en termes de prévention de la dépendance, ce qui suppose un management adapté et qualifié.

En revanche, la question soulevée renvoie effectivement à l'une des problématiques essentielles du secteur social et médico-social : la qualité de la prise en charge repose sur l'existence d'un réseau d'établissements ou services de proximité de dimension humaine. Il est vrai que certains coûts induits, notamment la rémunération d'un directeur qualifié, sont parfois disproportionnés dans les structures de taille modeste.

C'est pourquoi les services de l'État lancent actuellement un vaste mouvement de reconfiguration de ce réseau d'établissements et de services, de manière à mettre en commun leurs structures administratives au sein de groupements de coopération.

C'est ainsi que ces logements-foyers pourront à la fois disposer de personnels plus compétents et maintenir des tarifs compatibles avec les moyens limités des résidents qu'ils accueillent.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de ces précisions.

Il nous faut être attentifs aux coûts de cette réforme pour ces structures. L'expérience de trente ans dont elles font preuve, pour nombre d'entre elles, vaut, à mon avis, largement les diplômes que l'on est aujourd'hui en droit d'exiger.

Une réflexion approfondie pour valoriser les acquis de l'expérience de toutes celles et tous ceux qui dirigent ces établissements serait bienvenue, afin d'éviter, comme vous l'avez souligné vous-même, que cette décision n'entraîne un coût insupportable pour le fonctionnement de ces structures, bien souvent communales, d'ailleurs.

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