Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 22/05/2008

M. Jean Louis Masson attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le fait que le directeur d'une publication est pénalement responsable du contenu des articles qui y sont publiés. Parallèlement, le code général des collectivités territoriales prévoit que les élus n'appartenant pas à la majorité municipale ont un droit d'expression dans le bulletin municipal, dont le plus souvent le maire est le directeur de la publication. Il souhaiterait qu'elle lui indique si le maire peut refuser la publication d'un article des élus de son opposition s'il juge celui-ci comme étant diffamatoire. Si tel est le cas, il souhaiterait connaître quels sont les droits des conseillers minoritaires afin que sous prétexte d'éviter des propos jugés par lui diffamatoires, le maire ne puisse agir abusivement en les empêchant d'exprimer leur point de vue sur la gestion municipale. Réciproquement, si le maire n'a pas la possibilité d'empêcher la publication d'un article qui serait réellement diffamatoire, il souhaiterait savoir si compte tenu de cette circonstance, sa responsabilité pénale pourrait être engagée.

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Réponse du Ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales publiée le 21/08/2008

Le droit d'expression des élus n'appartenant pas à la majorité municipale dans les bulletins d'information générale diffusés par la commune est soumis aux règles fixées par la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse. Or l'article 42 de cette loi définit le directeur de publication comme auteur principal des crimes et délits commis par voie de presse, les auteurs étant considérés, en vertu de l'article 43 de cette loi, comme complices. Le maire, en tant que directeur de publication, est donc fondé à exercer un contrôle sur le contenu des articles produits par les conseillers minoritaires, afin d'éviter tout propos injurieux ou diffamatoire. Il pourrait donc demander le cas échéant aux conseillers concernés de modifier leur rédaction, voire, en cas de refus de leur part, ne pas publier les mentions diffamatoires ou injurieuses. Une telle décision peut néanmoins faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. Ainsi, la cour administrative d'appel de Versailles, dans sa décision du 8 mars 2007, n° 05VE02112, a considéré que le projet de tribune litigieux, rédigé en des termes polémiques et excessifs et faisant allusion à des actes commis par certaines personnes, « ne présentait toutefois pas un caractère outrageant de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération des personnes publiques dont le comportement était dénoncé ; que dès lors le contenu des écrits en cause n'avait pas un caractère diffamatoire ou injurieux qui aurait été de nature à faire obstacle au droit d'expression des élus d'opposition consacré par les dispositions de l'article L. 2121-27-1 du code général de collectivités territoriales ; que, dans ces conditions, le directeur de publication, qui avait au demeurant la possibilité d'assortir cette tribune d'un article rectificatif pour démentir les faits qu'il considérait comme inexacts, ne pouvait pas faire valoir l'éventuelle mise en jeu de sa responsabilité pénale sur le fondement de l'article 42 de la loi du 29 juillet 1881 susvisée pour justifier un tel refus » de publier. La cour administrative d'appel de Versailles, dans une affaire similaire, a pris une décision dans le même sens, le 27 septembre 2007 (n° 06VE02569). L'appréciation portée par le directeur de publication ne peut donc pas conduire à sanctionner des prises de position qui, bien que présentant un caractère polémique et agressif, ne sont pas pour autant réellement diffamatoires. Dans l'hypothèse où un article de l'opposition municipale pourrait apparaître comme outrageant ou diffamatoire, le maire, directeur de publication, peut le publier en prenant les précautions qui ont été mentionnées dans la réponse ministérielle à la question écrite n° 19105 posée le 11 août 2005 par l'honorable parlementaire (cf. JO du 23 février 2006 p. 505).

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