Question de M. GERBAUD François (Indre - UMP) publiée le 19/06/2008

M. François Gerbaud attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la réglementation relative aux conditions de délivrance et de renouvellement des passeports. Le Décret n° 2008-426 du 30 avril 2008 modifiant le décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 relatif aux passeports électroniques a introduit l'obligation de recueillir l'image numérisée du visage et les empreintes digitales de huit des doigts du demandeur, afin d'alimenter un fichier informatique national dénommé « Delphine » servant à conserver les photos et empreintes de tous les citoyens – à l'exception des empreintes des enfants de moins de six ans. Il s'agit donc ici d'un système biométrique visant l'identification des citoyens, et non leur seule authentification. Pourtant, la mise en œuvre d'informations nominatives de cette nature, dans la mesure où elle relève de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, est soumise à l'autorisation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), dans un souci de protection de la vie privée ou et des libertés individuelles ou publiques. Depuis la réforme législative du 6 août 2004 loi n° 2004-801), toute personne publique ou privée doit obtenir l'autorisation de la CNIL préalablement à l'installation d'un système biométrique. Or, la CNIL a rendu un avis défavorable à ce type de système, car si elle admet le stockage des données sur un support individualisé (en l'occurrence le passeport lui-même), elle le conteste dès lors qu'il est effectué sur une base de données centralisée, qui comporte à ses yeux « des risques sérieux d'atteintes graves à la vie privée et aux libertés individuelles ». La commission, qui estimait alors qu'au regard de l'importance du sujet et des libertés en jeu, seul le pouvoir législatif était compétent, a indiqué n'avoir « pas obtenu d'éléments qui permettent de justifier la création de la banque de données surnommée Delphine ». Ne convient-il pas, dans ces conditions, de s'interroger sur l'existence de risques de détournement de ce fichier informatique centralisé ? Le fichage généralisé et systématique des citoyens ne conduit-il pas à les traiter en délinquants potentiels, le relevé de huit des empreintes digitales sur dix allant bien au delà de ce qui est exigé aux plans européen et international ? Un tel fichage semble même contraire à certains droits fondamentaux et libertés publiques reconnus tant par notre Constitution que par la Convention européenne des droits de l'Homme (CEDH) et les autres traités ratifiés par la France dans ce domaine : droit au respect de la vie privée et familiale (article 8 de la CEDH et article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne), respect de la protection des données à caractère personnel (article 8 de cette même Charte). Partant, le Gouvernement entend-il revenir sur les dispositions exorbitantes du droit commun du décret n° 2008-426 du 30 avril 2008 afin de les rendre compatibles avec des normes essentielles fondant notre démocratie ou compte-t-il, conformément à l'article 34 de notre Constitution, soumettre au législateur un projet de loi sur ce thème ?

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La question a été retirée pour cause de fin de mandat.

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