Question de M. ANZIANI Alain (Gironde - SOC) publiée le 30/10/2008

M. Alain Anziani appelle l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur l'avenir de l'usine de transmissions automatiques de Ford Aquitaine Industrie située à Blanquefort en Gironde. Le 20 octobre 2008, la direction de Ford Europe a annoncé la fermeture de l'usine pour dix semaines, du 24 octobre au 5 janvier 2009. Cette décision entrainera la mise au chômage technique des 1 600 employés de FAI et semble préfigurer un abandon définitif du site par Ford.

Il rappelle que l'abandon du site de Blanquefort par Ford Aquitaine Industrie serait un désastre social, financier et industriel pour la Gironde. FAI est à ce jour le premier employeur industriel privé de la Gironde, avec 1 600 emplois directs et d'environ 10 000 emplois indirects. Bien normalement, l'attention se concentre aujourd'hui sur les employés de Ford dont la situation est dramatique, mais rien n'est prévu pour les 10 000 salariés des entreprises de sous-traitance dont l'activité dépend de celle de FAI.

De plus, la fermeture de ce site engendrerait des dommages économiques sans précédent pour la communauté urbaine de Bordeaux et plus généralement pour la Gironde. En effet, FAI représente 10% des recettes départementales liées à la taxe professionnelle, soit 35 millions d'euros en 2007. La disparition de FAI priverait le fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle de 9,15 millions d'euros par an. Cette perte fiscale serait un poids difficilement surmontable pour certaines communes, notamment rurales, dont les ressources budgétaires dépendent largement de l'activité de Ford.

Par ailleurs, la fermeture de ce site priverait l'Aquitaine de l'un de ses rares fleurons industriels. Cela est d'autant plus dommageable que, si le constructeur Ford connaît de réelles difficultés sur le marché américain, ses entités européenne et française ont réalisé de bons résultats ces dernières années.

L'incertitude qui pèse sur l'avenir de ce site a été dénoncée depuis des années par les organisations syndicales. Les collectivités locales, formant un front commun, ont proposé plusieurs pistes de reconversion industrielle, notamment en valorisant le savoir faire régional en matière de véhicule électrique. L'État a lui aussi manifesté sa volonté de s'impliquer dans le sauvetage du site de Blanquefort et des emplois. Pourtant, une vive inquiétude demeure sur les intentions réelles de Ford qui doit assumer la responsabilité de la revitalisation d'un site qui a dégagé une valeur ajoutée pour l'ensemble du groupe.

Il lui demande de lui indiquer comment l'État entend obtenir de Ford des solutions de nature à éviter le gâchis humain, industriel et financier que constituerait l'abandon du site de Blanquefort.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce extérieur publiée le 18/11/2008

Réponse apportée en séance publique le 17/11/2008

M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, auteur de la question n° 326, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

M. Alain Anziani. Madame la secrétaire d'État, dans son discours du 23 octobre dernier, à Annecy, le Président de la République a appelé de ses vœux un « État plus actif dans l'économie, qui assume ses responsabilités, qui entreprend, qui investit, qui est une force d'innovation et de progrès ». Ce souhait est partagé.

Pour le Gouvernement, les occasions de traduire en actes cette volonté ne manquent malheureusement pas. Je pense notamment au domaine industriel, en particulier au secteur automobile. La situation de Ford Aquitaine Industries S.A.S, à Blanquefort, constitue une application de choix.

Trop de temps a déjà été perdu. Voilà trois ans, M. François Loos, alors ministre délégué à l'industrie, interpellé ici même par mon collègue Philippe Madrelle, assurait qu'il n'y avait aucune crainte à avoir ni à court terme ni à moyen terme. Au mois de mars 2008, M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services, promettait que l'État s'engagerait dans des négociations étroites avec le groupe Ford pour faire émerger des pistes de reconversion du site.

Huit mois plus tard, la direction de Ford Europe a annoncé la fermeture de l'usine pour dix semaines, du 24 octobre 2008 au 5 janvier 2009. Cette décision a entraîné la mise au chômage technique des 1 580 salariés et fait craindre un abandon définitif du site avant même l'échéance annoncée de 2010.

Outre le désespoir qu'elle suscite, cette fermeture rend plus difficile encore la recherche de repreneurs confrontés au vide des lieux.

Depuis des années, les élus girondins alertent l'État sur le désastre social, financier et industriel qui se prépare. L'abandon du site concernera non seulement les employés de Ford, mais également 9 600 emplois indirects dans la sous-traitance. Qui les soutiendra ? La communauté urbaine de Bordeaux sera privée de 5 % de ses recettes directes et de 5 % de ses recettes indirectes, soit 10 % au total. Toutes les communes de la Gironde, urbaines comme rurales, verront disparaître une ressource – parfois la plus importante de leur budget – provenant de la péréquation de la taxe professionnelle.

Par lettre du 28 octobre dernier, le président de la communauté urbaine de Bordeaux, le président du conseil régional d'Aquitaine et le maire de Bordeaux ont demandé au Gouvernement à être mieux associés à la recherche de repreneurs, et ce alors que leur soutien financier est sollicité. Il est temps de lever le secret actuel.

Ensemble, nous avons une double obligation : ne laisser aucun salarié de Ford ou des entreprises sous-traitantes au bord de la route et réussir la reconversion du site.

Madame la secrétaire d'État, comment l'État entend-il obtenir du groupe Ford qu'il assume ses responsabilités ? Plus largement, quelle implication forte, plus forte, de l'État envisagez-vous pour éviter le gâchis humain, industriel et financier que constituerait l'abandon du site de Blanquefort ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Monsieur le sénateur, vous avez à nouveau attiré l'attention du Gouvernement sur l'impact social et économique de la fermeture du site de transmissions automatiques de Ford Aquitaine Industries, malheureusement programmée d'ici à 2010.

Conscients des enjeux très importants qu'aurait pour la région cette annonce de fermeture, les pouvoirs publics ont pris, depuis plusieurs mois déjà, différentes initiatives. Plusieurs chantiers ont été lancés à l'échelle régionale : analyse des emplois indirects concernés, formation du personnel, validation des acquis de l'expérience et, bien sûr, recherche de reprise d'activité et de diversification du site. En ce qui concerne les emplois indirects, une étude confiée à l'INSEE chiffre actuellement entre 4 500 et 5 000 emplois les impacts d'une telle fermeture.

Devant la difficulté manifeste de trouver des repreneurs ou des activités nouvelles – par exemple, celles qui sont liées aux véhicules électriques –, capables de donner un emploi à 1 600 personnes dans le calendrier imparti, Mme le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi a demandé, le 5 février dernier lors d'une réunion avec les principales parties prenantes, au PDG de Ford Europe de faire ses meilleurs efforts pour dégager des solutions permettant le maintien d'activités automobiles sur le site de Blanquefort et de s'impliquer dans la recherche de solutions de diversification susceptibles de se développer pour pallier le retrait du groupe sur le site.

Depuis cette date et la nomination de M. Benett comme référent de haut niveau en charge spécifique de ce dossier pour Ford, le groupe s'est engagé auprès des autorités publiques et a réaffirmé assurer l'ensemble de ses responsabilités dans l'évolution de ce site. À cet effet, Ford a mandaté un cabinet de conseil chargé d'amplifier sa propre recherche d'entrepreneurs désireux de se développer au sein de la filière automobile ou qui pourraient apporter de nouvelles activités susceptibles de s'implanter sur le site ou à proximité. Cette recherche se poursuit en étroite collaboration avec l'Agence française pour les investissements internationaux et les agences locales de développement.

Complémentaire du groupe de travail technique animé par la Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, la DRIRE, et réunissant les représentants de Ford Europe et des salariés, les principaux élus concernés et les services de l'État, un comité de suivi de l'évolution des sites de Blanquefort s'est tenu au mois de mai dernier, sous la présidence de Mme Christine Lagarde.

Grâce à cette mobilisation, plusieurs entreprises internationales du secteur de la mécanique ont manifesté leur intérêt soit pour la reprise du site, soit pour une implantation à proximité qui pourrait bénéficier aux salariés de Ford. À l'heure actuelle et malgré une conjoncture économique générale hélas peu favorable, des discussions très avancées sont en cours avec deux entreprises. Une réunion du comité de suivi, présidée par Mme Christine Lagarde et à laquelle les élus, conformément à votre souhait, monsieur le sénateur, seront évidemment associés, devra prochainement faire le point sur ces opérations.

M. le président. La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. Madame le secrétaire d'État, je vous remercie des précisions que vous venez d'apporter.

Il y a des repreneurs, c'est bien, mais – j'attire votre attention sur ce point - ils interviennent tous dans le domaine de la mécanique de transmission. Il en résultera des difficultés pour les sous-traitants. Il y aura aussi un problème de rupture de charges parce qu'il s'agit d'une technologie nouvelle. De ce fait, la moitié des salariés de Ford ne pourront pas être repris immédiatement. Ils seront donc au chômage et devront trouver d'autres solutions. Enfin, se poseront des problèmes à long terme puisque de prochaines mutations technologiques rendront sans doute désuètes les procédures de transmission et il faudra savoir anticiper.

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