Question de M. SUEUR Jean-Pierre (Loiret - SOC) publiée le 29/01/2009

M. Jean-Pierre Sueur appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les problèmes posés par des recours susceptibles d'être dilatoires devant les juridictions administratives qui peuvent conduire le juge à surseoir à statuer dans un procès pénal. En effet, si l'article 111-5 du code pénal donne compétence au juge pénal « pour interpréter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité lorsque, de cet examen, dépend la solution du procès pénal qui lui est soumis », il n'a pas compétence pour apprécier – par exemple – la légalité de l'invalidation d'un permis de conduire puisque celle-ci relève de la compétence de la juridiction administrative, alors même que la conduite d'un véhicule malgré l'invalidation du permis de conduire peut constituer une circonstance aggravante dans un procès pénal. En conséquence, les délais de procédure devant le tribunal administratif pouvant atteindre dix-huit mois, voire davantage, la suspension du procès pénal consécutive à un tel recours est susceptible d'entraîner un dommage certain pour les victimes attendant réparation. Dans de pareils cas, les personnes victimes le sont une seconde fois, puisqu'elles sont lésées par un délai excessivement long. Il lui demande en conséquence si des mesures sont envisagées pour raccourcir, dans de tels cas, les délais de ces recours devant les juridictions administratives et faire en sorte que ceux-ci ne puissent constituer des procédures dilatoires susceptibles de nuire au bon déroulement du procès pénal et de pénaliser les victimes qui attendent réparation.

- page 217


Réponse du Ministère de la Justice publiée le 25/06/2009

La garde des sceaux a l'honneur de répondre à l'honorable parlementaire que, par application des dispositions de l'article 111-5 du code pénal, les juridictions pénales sont compétentes pour interpréter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité lorsque de cet examen dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis. Ces dispositions légales peuvent trouver à s'appliquer devant le tribunal correctionnel lorsque le prévenu conteste la légalité de la décision administrative par laquelle son permis de conduire a été invalidé par perte de points. Dans ce cas, rien ne s'oppose à ce que le juge examine la légalité de la décision administrative fondant la poursuite. Cette faculté est d'ailleurs régulièrement mise en oeuvre par les juridictions. Cette hypothèse doit cependant être distinguée de celle dans laquelle le contrevenant a introduit un recours devant la juridiction administrative avant que le parquet n'ait engagé des poursuites. Dans ce cas, la juridiction répressive, qui aurait compétence pour statuer sur la légalité de l'acte administratif sur le fondement de l'article 111-5 du code pénal, sursoit parfois à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction administrative. Cette pratique ne paraît pas critiquable compte tenu, d'une part, du risque de contradiction entre les décisions des deux juridictions et, d'autre part, de la technicité de la matière, la juridiction administrative étant mieux à même d'apprécier la légalité des décisions prises par l'autorité préfectorale. La difficulté soulignée par l'honorable parlementaire est donc celle des délais de traitement de ces recours par les juridictions administratives. À cet égard, le délai moyen de jugement devant les tribunaux administratifs a été sensiblement réduit ces dernières années grâce aux moyens supplémentaires accordés à la juridiction administrative ainsi qu'aux efforts accomplis par les magistrats et agents de greffe. Il s'est ainsi établi en 2008 à un an et vingt-neuf jours. Il est en outre possible, pour les tribunaux administratifs, de traiter de manière prioritaire les recours qui font suite à une décision du juge judiciaire de sursoir à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction administrative.

- page 1613

Page mise à jour le