Question de M. PONIATOWSKI Ladislas (Eure - UMP-R) publiée le 10/07/2009

Question posée en séance publique le 09/07/2009

M. Ladislas Poniatowski. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Madame la ministre, j'imagine que vous avez été aussi surprise que nous, les parlementaires, par l'annonce du président d'EDF, qui souhaite augmenter ses tarifs d'électricité de 20 %.

M. Guy Fischer. C'est scandaleux !

M. David Assouline. C'est un sale coup !

M. Ladislas Poniatowski. Bien sûr, cette hausse ne serait pas brutale puisqu'il vous est demandé de l'étaler sur trois ou quatre ans. Toutefois, dans la conjoncture qui est la nôtre, même une augmentation de 4 % par an des tarifs d'électricité serait durement vécue par un grand nombre de familles.

Ce qui a surpris, et même choqué, c'est le moment où a été formulée cette demande, c'est-à-dire quelques jours après le succès qu'a remporté l'emprunt obligataire lancé par EDF auprès des particuliers.

M. Didier Boulaud. C'est de la provocation !

M. Ladislas Poniatowski. La réussite de cette opération est incontestable : le président d'EDF, qui escomptait un milliard d'euros, en a obtenu 3,2 milliards, ce qui montre au passage que les Français ont une bonne image de cette entreprise et lui accordent leur confiance.

M. Guy Fischer. C'est le pillage de l'épargne populaire ! C'est du racket !

M. Paul Raoult. Les Français ne seront pas payés de retour…

M. Ladislas Poniatowski. Que nous demande aujourd'hui le président d'EDF ? Lorsqu'il a été entendu il y a quelques jours par le groupe d'études de l'énergie du Sénat, en présence du président Gérard Larcher, il a souligné trois points : tout d'abord, qu'EDF est lourdement endettée ; ensuite, que l'électricité est, en France, de 30 % à 40 % moins chère que dans les autres pays européens, et il a ainsi laissé entendre qu'il existait une marge de manœuvre ; enfin, que d'importants investissements sont nécessaires puisqu'il faut à la fois prolonger la durée de vie des centrales et en construire de nouvelles.

Conclusion du président d'EDF : « Je souhaite une augmentation des tarifs de l'électricité ».

Madame la ministre, ma question sera triple.

Premièrement, avez-vous été informée au préalable de cette demande ?

Deuxièmement, avez-vous l'intention d'y répondre favorablement, sinon à hauteur de ce qui vous est demandé, du moins d'une manière moins brutale, c'est-à-dire plus supportable pour le portefeuille des Français ?

Troisièmement, les sénateurs du groupe UMP, au nom desquels je m'exprime, souhaitent que soit lancé un débat national. En effet, nous voulons savoir si les Français sont prêts à accepter une hausse des tarifs pour répondre aux différents besoins en matière énergétique, c'est-à-dire renouveler les centrales nucléaires et en construire de nouvelles, moderniser les réseaux de transport et de distribution d'électricité,…

M. Paul Raoult. Ils sont bien défaillants, ces réseaux !

M. Ladislas Poniatowski. … accélérer le développement des énergies renouvelables, qu'il s'agisse de l'hydraulique, de la biomasse, de l'éolien ou du photovoltaïque,…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Ladislas Poniatowski. … enfin développer ce que j'appellerai les « autres besoins », notamment la construction des ports méthaniers qui sont nécessaires à la France, avec des installations permettant de regazéifier le gaz liquéfié. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Hervé Maurey applaudit également.)


Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 10/07/2009

Réponse apportée en séance publique le 09/07/2009

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, particulièrement d'actualité compte tenu de l'annonce dont nous avons tous pris connaissance avec beaucoup de surprise et par voie de presse, ce qui ne me satisfait guère, non plus que le ministre chargé de l'industrie, Christian Estrosi. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jacques Mahéas. Ils ne maîtrisent plus rien !

M. David Assouline. À l'Élysée, ils devaient savoir…

Mme Christine Lagarde, ministre. J'en profite pour rappeler que la variation des tarifs d'électricité résulte d'une décision conjointe du ministre de l'économie et du ministre chargé de l'énergie, après avis de la commission de régulation de l'énergie. Or celle-ci n'a pas été saisie d'une demande du Gouvernement concernant une quelconque augmentation des tarifs. (Mêmes mouvements.)

M. Jean-Pierre Sueur. On est donc en pleine anarchie !

M. Jacques Mahéas. C'est le grand bazar !

M. Paul Raoult. C'est le renard libre dans le poulailler libre !

Mme Christine Lagarde, ministre. Quant au fond, vous avez très bien posé les termes du débat, monsieur le sénateur.

Les tarifs de l'électricité dont bénéficient les consommateurs français sont effectivement, aujourd'hui, inférieurs de 15 % à 30 % à ceux qui sont pratiqués dans les autres pays d'Europe. Pourquoi cet écart ? Tout simplement parce que les consommateurs français bénéficient, et c'est légitime, de l'avance de compétitivité que la France a acquise grâce à des investissements massifs dans son parc électronucléaire, en particulier pendant les années 1980. (Très bien ! sur les travées de l'UMP.)

M. Charles Revet. C'est vrai !

M. Jean Bizet. Il ne faut pas l'oublier !

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement entend qu'ils continuent de profiter de cette avance, dans le respect du partage des gains de compétitivité résultant des investissements massifs de cette époque.

Cela étant, et vous avez eu raison de le souligner, monsieur le sénateur, EDF devra réaliser des investissements importants pour répondre aux exigences du Grenelle de l'environnement, notamment en développant des énergies renouvelables, mais aussi pour investir dans le parc électronucléaire, dont il convient d'allonger la durée de vie dans des conditions de sureté absolue. (Marques d'impatience sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Mahéas. Répondez plutôt à la question !

M. David Assouline. Vous ne respectez pas votre temps de parole, madame la ministre !

Mme Christine Lagarde, ministre. Comment financer ces investissements ? Nous pouvons envisager des hausses tarifaires, certes, mais je crois bien préférable de dégager des gains de productivité internes à l'entreprise. C'est d'ailleurs déjà, me semble-t-il, une priorité pour la direction d'EDF, à laquelle Christian Estrosi et moi-même demanderons de persévérer dans cette voie.

M. Guy Fischer. C'est-à-dire des suppressions d'emplois !

Mme Christine Lagarde, ministre. Les gains de productivité ne se traduisent pas nécessairement par des suppressions d'emplois ; ils passent aussi par une meilleure organisation du cycle de production.

Le rapport Champsaur, à la rédaction duquel vous avez participé, monsieur Poniatowski, avec le talent que l'on sait,…

M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. … a d'ailleurs souligné que ces investissements devaient être réalisés grâce à des gains de productivité, et nous aurons l'occasion de le rappeler.

Tout cela s'inscrit dans une politique parfaitement claire (Marques d'ironie sur les travées du groupe socialiste.),…

M. Didier Boulaud. Pour être clair, c'est clair ! En fait, c'est plutôt un clair-obscur !

Mme Christine Lagarde, ministre. … qui consiste, d'une part, à faire en sorte que les consommateurs les moins privilégiés bénéficient de tarifs sociaux particuliers et, d'autre part, à garantir la clarté et la vérité des prix. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l'Union centriste.)

M. Didier Boulaud. « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles » ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

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