Question de M. GRIGNON Francis (Bas-Rhin - UMP) publiée le 24/09/2009

M. Francis Grignon attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur les risques de la transposition de la directive « services » de l'Union européenne pour les architectes. La transposition de cette directive pourrait conduire à la constitution de sociétés dans lesquelles les architectes seraient des actionnaires minoritaires. Or, la profession est soumise à une déontologie qui lui impose d'être indépendante dans l'exercice de ses fonctions. L'ouverture du capital des sociétés d'architecture à des personnes morales n'appartenant pas à leur profession risque de générer d'importants conflits d'intérêt et de conduire à la disparition de leur spécificité. En effet, des logiques purement économiques et des considérations conjoncturelles risquent de briser l'équilibre entre l'intérêt de l'usager et celui du maître d'ouvrage dont l'architecte est le garant. Il lui demande donc si le Gouvernement entend prendre des mesures pour défendre l'indépendance et la capacité d'exercice des architectes pour produire un développement urbain durable au service de tous les usagers.

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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 28/10/2009

Réponse apportée en séance publique le 27/10/2009

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, auteur de la question n° 630, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Francis Grignon. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les risques que fait peser sur les architectes la transposition de la directive relative aux services dans le marché intérieur. Celle-ci pourrait en effet conduire à la constitution de sociétés dans lesquelles ces professionnels seraient des actionnaires minoritaires.

Or la profession est soumise à une déontologie qui lui impose d'être indépendante dans l'exercice de ses fonctions. L'ouverture du capital des sociétés d'architecture à des personnes morales extérieures risque d'entraîner d'importants conflits d'intérêt et de conduire à la disparition de ce qui fait leur spécificité.

Le fait de n'obéir qu'à des logiques purement économiques et à des considérations conjoncturelles est de nature à briser l'équilibre entre l'intérêt de l'usager et celui du maître d'ouvrage, dont l'architecte est le garant.

Dans la mesure où l'acte d'architecture se conçoit dans l'indépendance, je voudrais savoir si le Gouvernement entend prendre des mesures en vue non seulement de la défendre, mais aussi de préserver la capacité d'exercice des architectes pour produire un développement urbain durable, au service de tous les usagers.

Il s'agit, je tiens à le souligner, non pas d'un problème financier, mais bien d'une question de morale publique et d'équité.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, croyez bien que je suis très sensible à votre préoccupation. La précision que vous avez apportée à la fin de votre propos montre qu'il s'agit d'un point important.

Je suis ainsi particulièrement attentif à la transposition de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. C'est un texte majeur, dont l'un des objectifs est de contribuer à dynamiser le marché intérieur européen afin de stimuler la croissance et la création d'emplois.

Cette transposition doit pleinement prendre en compte, d'une part, la spécificité du secteur de la culture, qui, chacun le sait, n'est pas un secteur comme les autres, et, d'autre part, comme vous le soulignez à très juste titre, l'intérêt des usagers, c'est-à-dire de nos concitoyens.

À cet égard, la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture consacre l'approche, à laquelle le Gouvernement est attaché, selon laquelle l'architecture est une expression de la culture. La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le cadre de vie renvoient à la dimension éminemment culturelle de notre environnement. Tous ces éléments sont, par ailleurs, d'intérêt public et participent directement au développement et à l'aménagement durables de notre territoire.

Dans ce contexte, il est essentiel de respecter les principes fondamentaux posés par la loi de 1977 que sont l'indépendance, la capacité d'exercice et la responsabilité des architectes et des sociétés d'architecture.

Pour assurer la transposition de la directive relative aux services dans le marché intérieur, le Gouvernement a retenu une approche de nature à favoriser la juste prise en compte de la spécificité de la culture. Il a exclu une loi unique de transposition et laissé à chaque secteur, dans le cadre d'une réflexion générale, le soin de proposer les adaptations nécessaires aux corpus législatif et réglementaire propres à chaque activité.

Je peux donc vous assurer que, à l'occasion des travaux de transposition de la directive relative aux services dans le marché intérieur, je suis très attentif à la pleine prise en compte des enjeux culturels et au respect des principes fondamentaux de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture.

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.

M. Francis Grignon. Je voudrais d'abord remercier M. le ministre de cette prise de position très claire. J'ai vécu une transposition de directive dans une profession, certes hors du domaine de la culture, mais confrontée à un problème assez proche, je veux parler de la profession de pharmacien. Fort de cette expérience et sachant que les choses se sont à peu près bien réglées, je ne doute pas que vous réussirez la transposition de la directive européenne concernant la profession d'architecte.

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