Question de M. CHEVÈNEMENT Jean-Pierre (Territoire de Belfort - RDSE) publiée le 10/09/2009

M. Jean-Pierre Chevènement attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la très grave situation faite à des réfugiés iraniens dans le camp d'Achraf en Irak.
Ce camp a été créé en 1986 dans la province de Diyala, au nord de Bagdad, pour y accueillir des milliers de membres d'un groupe d'opposition au régime iranien dit des « Moudjahidines du peuple d'Iran ».
Après la chute en 2003 de Saddam Hussein, qui les protégeait et sans doute les instrumentait, ceux-ci ont été désarmés par les forces américaines et ont reçu le statut de « personnes protégées » conformément à la quatrième convention de Genève.
Le 17 juin 2008, le Conseil des ministres irakien a adopté une directive stipulant que les membres de cette organisation seraient expulsés d'Irak. Le 1er janvier 2009, les États-Unis ont cédé le contrôle du camp aux autorités irakiennes. En juillet dernier, l'armée irakienne est entrée en force dans ce camp faisant de nombreuses victimes (11 morts et 450 blessés selon certaines organisations non gouvernementales).
Il lui demande quelles interventions compte faire le gouvernement français auprès du gouvernement irakien pour que la lumière soit faite sur ces évènements et que des mesures soient prises afin que la quatrième convention de Genève soit respectée et quelles initiatives il compte prendre, y compris à l'Organisation des Nations unies (ONU), pour que ces réfugiés ne soient pas expulsés vers la République islamique d'Iran compte tenu du rapport de force qui prévaut entre ce pays et l'Irak.

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Réponse du Ministère des affaires étrangères et européennes publiée le 12/11/2009

Comme vous le savez, la France a constamment exprimé son soutien au recouvrement, par les autorités irakiennes, de leur complète souveraineté, le plus rapidement possible. L'une des étapes importantes de ce processus, que nous avons saluée, a été l'accord de retrait des forces américaines, adopté par le Parlement irakien en novembre 2008, qui prévoit que les forces irakiennes prendront progressivement le relais des forces américaines et que les autorités irakiennes pourront ainsi étendre leur autorité sur l'ensemble de leur territoire. Cette restauration de la souveraineté de l'Irak vaut naturellement aussi pour le camp d'Achraf, cette vaste zone située à 80 km de Bagdad et occupée par l'organisation des Moudjahiddin du peuple (OMPI), grâce à un statut d'exception, que lui avait octroyé Saddam Hussein en 1986. Les autorités irakiennes ne souhaitent en effet plus abriter, sur leur territoire et à proximité de l'Iran, une base appartenant à une organisation qui a participé à des actions militaires contre ce pays ainsi qu'à des crimes commis par l'ancien régime de Saddam Hussein contre sa population. C'est dans ce cadre que les autorités irakiennes ont informé, dès janvier 2009, les chefs de mission diplomatique à Bagdad que le camp d'Ashraf ne pouvait bénéficier d'aucun privilège d'extraterritorialité et qu'il avait vocation à être fermé au terme d'un processus encadré par le droit international. C'est dans ce cadre également, et à la suite de l'échec des négociations engagées avec les habitants du camp, que les autorités irakiennes sont intervenues en juillet 2009 à l'intérieur de l'enclave pour y établir un poste de police. Cette opération a malheureusement pris un tour violent : onze victimes ainsi que de nombreux blessés de part et d'autre sont à déplorer. La France est naturellement attachée à ce que la mise en oeuvre de la fermeture du camp d'Ashraf se fasse dans le plein respect des principes du droit international. C'est le message que nous avons fait passer à plusieurs reprises à titre national et dans le cadre européen aux autorités irakiennes, notamment au ministre irakien des droits de l'homme qui est chargé de cette question. Cette exigence de respect des droits de l'homme doit également s'appliquer aux dirigeants de l'OMPI, qui, selon tous les témoignages, continuent à user de pratiques d'intimidation à l'endroit des habitants du camp. De ce fait, ceux-ci ne seraient ainsi pas libres de décider de leur sort. Comme vous le savez, la France s'était opposée à ce que l'OMPI, inscrite sur la liste des organisations terroristes européennes depuis 2002, en soit retirée en 2008. L'OMPI reste néanmoins considérée comme une organisation terroriste dans plusieurs pays, dont le Canada, les États-Unis et l'Irak. La France salue les efforts que déploient la mission d'assistance des Nations unies en Irak (MANUI) à travers son bureau des droits de l'homme, le haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés et le comité International de la Croix-Rouge, afin qu'une solution puisse être trouvée sur ce dossier difficile, qui soit respectueuse à la fois de la souveraineté irakienne et du droit.

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