Question de M. VIAL Jean-Pierre (Savoie - UMP) publiée le 22/10/2009

M. Jean-Pierre Vial attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les difficultés juridiques auxquelles sont confrontés les directeurs d'établissements scolaires, et, plus généralement, les personnels enseignants, qui souhaitent réaliser et diffuser des photographies des élèves afin d'illustrer un projet ou des activités pédagogiques dans le plein respect du droit à l'image des élèves garanti par l'article 9 du code civil et de celui de leur vie privée protégée par l'article 226-1 du code pénal, ainsi que des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relatives à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Il lui demande en conséquence s'il envisage d'actualiser la circulaire n° 2003-091 du 5 juin 2003 dont les recommandations ne correspondent plus à l'état du droit, la loi du 6 janvier 1978 précitée ayant depuis lors été modifiée, et qui ne prend pas en compte les problèmes que soulèvent aujourd'hui le développement de la photographie numérique et de sa diffusion par Internet, et les problèmes que posent les usages gratuits ou non qui peuvent résulter des partenariats entre les établissements scolaires et les partenariats extérieurs privés ou publics.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce extérieur publiée le 18/11/2009

Réponse apportée en séance publique le 17/11/2009

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial, auteur de la question n° 681, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Jean-Pierre Vial. Madame la secrétaire d'État, le temps est révolu où la photographie en milieu scolaire se bornait à la réalisation chaque année par un professionnel spécialisé de la traditionnelle photo de classe. Le développement de la photographie numérique et les facilités qu'elle offre en matière de diffusion, qu'il s'agisse de sa reproduction sur un support numérique, de sa mise en ligne sur l'intranet ou sur l'extranet de l'établissement ou encore de l'échange de fichiers par courrier électronique ont radicalement changé la donne.

Certes, ces nouvelles technologies de l'image constituent pour les personnels enseignants, en particulier pour les plus dynamiques d'entre eux, des outils extrêmement précieux pour illustrer un projet ou des activités pédagogiques et les faire mieux connaître auprès des familles, de la communauté enseignante et, le cas échéant, d'un public plus large, par exemple à l'occasion de manifestations « portes ouvertes » ou de la création d'un portail.

Mais ces mêmes personnels éducatifs doivent aussi se montrer extrêmement attentifs au respect d'un ensemble de dispositions juridiques qui encadrent strictement, et à juste titre, la réalisation et l'exploitation de photographies représentant des personnes, en particulier des personnes mineures : droit au respect de la vie privée, et son corollaire, le droit à l'image garanti par l'article 9 du code civil et protégé par l'article 226-1 du code pénal, dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relatives à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

La circulaire du 5 juin 2003 actuellement en vigueur rappelle, certes, aux personnels enseignants un certain nombre de principes fondamentaux : nécessité d'une autorisation préalable des titulaires de l'autorité parentale, mise en garde contre les risques que peut comporter une diffusion électronique, nécessité de respecter le dispositif de la loi du 6 janvier 1978 précitée, dispositif dont il faut d'ailleurs relever qu'il a été depuis fortement remanié par la loi du 6 août 2004.

Mais cette circulaire, partiellement obsolète d'un point de vue juridique, est d'une façon générale insuffisamment précise et laisse les responsables éducatifs démunis face à la complexité des problèmes juridiques pratiques que soulève aujourd'hui la délicate question de la réalisation et de la diffusion de l'image des élèves des écoles, des collèges et des lycées.

Je souhaiterais en conséquence savoir si vous envisagez, madame la secrétaire d'État, de prendre une nouvelle circulaire qui traiterait de façon plus précise cette question sensible, afin de pouvoir satisfaire à la fois les droits à l'image de l'élève à travers l'autorité parentale et la sécurité juridique de l'établissement, des enseignants et des personnels éducatifs.

Elle devrait en outre préciser dans quelles conditions des photographies d'élèves peuvent être considérées comme des données à caractère personnel, voire comme des fichiers de données à caractère personnel au sens de la loi du 6 janvier 1978 précitée, et indiquer aux personnels éducatifs les démarches qu'ils doivent suivre pour se mettre en conformité avec les exigences de ladite loi préalablement à toute collecte et à toute diffusion de ces photos.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Luc Chatel, qui m'a chargée de vous transmettre les éléments de réponse suivants.

Votre question rejoint une réflexion actuellement menée par le ministère de l'éducation nationale sur la protection du droit à l'image dans les établissements scolaires.

Comme vous l'avez rappelé très justement, la circulaire du 5 juin 2003 relative à la photographie scolaire mérite d'être actualisée pour tenir compte des modifications de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

La photographie constitue une donnée personnelle, puisqu'elle permet l'identification du sujet concerné.

En conséquence, les établissements scolaires qui souhaitent conserver des photographies d'élèves, notamment des photographies numérisées, doivent respecter les prescriptions de la loi informatique et libertés. La circulaire du 5 juin 2003 fera donc très prochainement l'objet de modifications pour tenir compte de l'évolution de la loi CNIL, dans le sens du renforcement des droits des administrés.

En revanche, et même si le ministère de l'éducation nationale a l'intention d'accentuer la sensibilisation des chefs d'établissements et des enseignants à cette question, la circulaire du 5 juin 2003 paraît respecter le principe posé à l'article 9 du code civil du droit au respect de la vie privée des élèves et donc de leur droit à l'image.

Elle rappelle qu'une autorisation expresse de l'élève, ou de ses parents si ce dernier est mineur, est nécessaire avant toute prise de vue ainsi qu'avant toute diffusion, notamment sur internet, de la photographie.

Par ailleurs, monsieur Vial, vous citez l'article 226-1 du code pénal. Toutefois, et dès lors qu'il sanctionne la fixation de l'image d'une personne sans son consentement dans un lieu privé, il me semble que cet article n'est pas applicable aux photographies prises dans les établissements scolaires, qui ne constituent pas des lieux privés.

Il faut enfin rappeler que la circulaire du 5 juin 2003 pose des règles très strictes pour encadrer la pratique de la photographie scolaire, notamment afin de garantir la neutralité du service public et inciter à une très grande prudence à l'égard des pratiques commerciales qui pourraient accompagner le développement de la photographie à l'école.

Monsieur le sénateur, je voudrais vous remercier de votre contribution aux réflexions du ministère de l'éducation nationale.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial.

M. Jean-Pierre Vial. Je remercie Mme la secrétaire d'État de sa réponse, notamment des clarifications apportées sur l'interprétation des dispositions pénales, qui sont lourdes de conséquences pour les établissements scolaires.

J'ai bien noté que ces préoccupations rejoignent celles du ministère de l'éducation, qui travaille à l'adaptation de cette circulaire. Il y a une vraie urgence, puisque cette question relaie les interrogations exprimées au sein des conseils d'administration des établissements, qui doivent assumer ces contraintes au quotidien dans leur fonctionnement.

Madame la secrétaire d'État, j'espère la circulaire paraîtra dans les meilleurs délais.

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