Question de Mme TERRADE Odette (Val-de-Marne - CRC-SPG) publiée le 01/10/2009

Mme Odette Terrade attire l'attention de M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sur la remise en cause des droits familiaux en matière de retraite pour les mères de famille.
Depuis le 1° janvier 2004, au régime général et dans les régimes alignés, les femmes salariées partant à la retraite bénéficient de majoration de durée d'assurance calculée sur la base d'un trimestre attribué à la naissance, à l'adoption ou à la prise en charge effective de chaque enfant, puis d'un trimestre supplémentaire jusqu'au seizième anniversaire de l'enfant, dans la limite de 7 trimestres. Cette majoration de durée d'assurance spécifique à la maternité est justifiée par la réalité de l'implication des mères dans la prise en charge des enfants bien avant leur naissance. Ces majorations spécifiques à la maternité bénéficient à 90% des femmes partant à la retraite et sont des acquis répondant au manque à gagner que les femmes subissent durant leur carrière professionnelle.
Or, dans un arrêt du 21 décembre 2006, confirmé par un arrêt du 15 avril 2009, la Cour de cassation s'est fondée sur l'article 14 de la Convention européenne des Droits de l'Homme pour considérer que la majoration de durée d'assurance devait également bénéficier aux hommes sans qu'ils apportent la preuve qu'ils ont élevé seul un enfant. Selon la Cour de cassation, « en l'absence d'une telle justification, l'article L. 351-4 du code de la sécurité sociale qui réserve aux femmes le bénéfice d'une majoration de carrière pour avoir élevé un ou plusieurs enfants est incompatible avec les stipulations de la Convention européenne des Droits de l'Homme ».
Dans l'hypothèse de son application, cet arrêt porterait un préjudice non négligeable à l'ensemble des femmes mères de famille ayant suspendu leur activité professionnelle ou non, qui perçoivent aujourd'hui encore, une pension de retraite moindre que celle des hommes. Selon la Caisse nationale d'assurance vieillesse, le montant de la retraite des femmes représente en moyenne 77% de celle des hommes. Sans les compensations dont elles bénéficient, ce montant serait alors de 64%.
De plus, elle lui rappelle les nombreuses inégalités subies par les femmes et plus particulièrement les mères de famille, dans leur vie professionnelle, notamment un salaire inférieur en moyenne de 21% à celui des hommes, des emplois précaires et à temps partiels, une carrière professionnelle hachurée, des promotions réduites... Autant de contraintes qui conduisent les femmes, lors de leur départ à la retraite, à valider en moyenne 20 trimestres de moins que les hommes et pour la moitié d'entre elles à être au minimum contributif, soit 590 euros par mois. Loin d'être considérée comme un privilège accordé aux femmes, la remise en cause de la majoration pour enfants verrait s'aggraver encore les inégalités qu'elles subissent.
C'est pourquoi, en lui signifiant son attachement à ce droit à majoration lié à la maternité, elle lui demande quels engagements il entend prendre afin de préserver et de consolider ce système de majoration de durée d'assurance de 2 ans par enfant accordé aux mères de famille.

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Réponse du Ministère du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville publiée le 03/12/2009

La Cour de cassation a, par une décision du 19 février dernier, déclaré ce dispositif, en sa forme actuelle, incompatible avec les stipulations de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. Une évolution de ce dispositif est donc nécessaire, qui doit s'effectuer dans le respect des trois objectifs suivants : le respect des obligations juridiques découlant de la CEDH ; la préservation d'un avantage de retraite pour les femmes, destiné à compenser l'impact sur leur carrière de l'accouchement et de l'éducation des enfants ; la préservation des finances de la branche retraite. Le Gouvernement a choisi d'agir rapidement pour sauvegarder le dispositif de majoration de durée d'assurance. Ce choix rejoint la préoccupation des partenaires sociaux qui se sont majoritairement prononcés en faveur de l'évolution du dispositif au sein du conseil d'administration de la CNAV. La majoration de durée d'assurance de deux ans sera donc sauvegardée. Le nouveau dispositif, qui figurera au sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 reposera sur les principes suivants : une majoration de quatre trimestres sera accordée aux femmes au titre de la maternité ; une majoration de quatre trimestres, s'ajoutant à la précédente, sera accordée aux parents au titre de l'éducation de l'enfant. Cette majoration sera attribuée selon les règles suivantes : pour les enfants nés avant l'entrée en vigueur de la loi, elle reviendra en principe à la mère sauf si le père démontre avoir élevé seul l'enfant ; pour les enfants à naître, la majoration pourra être répartie entre les deux parents d'un commun accord. En cas de silence du couple, celui-ci sera réputé avoir opté pour leur attribution à la mère. Enfin, en cas de désaccord, elle sera attribuée à celui des deux parents ayant assuré effectivement l'éducation de l'enfant. En outre une majoration spécifique de quatre trimestres sera accordée aux parents adoptant afin de maintenir pour eux également une majoration globale de huit trimestres. Ceci permettra aux parents adoptifs de bénéficier dans tous les cas de la totalité de la majoration alors que celle-ci est dans certains cas diminuée aujourd'hui. Enfin, le Gouvernement a décidé d'étendre cette majoration aux régimes de retraite des professions libérales (CNAVPL) et des avocats (CNBF) qui auparavant n'en bénéficiaient pas.

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