Question de M. MIRASSOU Jean-Jacques (Haute-Garonne - SOC) publiée le 24/12/2009

M. Jean-Jacques Mirassou attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État sur les conséquences, pour les collectivités territoriales, de la disparition de la taxe professionnelle sur les entreprises du secteur de l'énergie éolienne.

Jusqu'à présent, parce qu'ils constituent une source d'énergie verte et peu polluante, les parcs éoliens ont bénéficié d'une politique bienveillante de la part des collectivités territoriales qui ont favorisé leur installation et qui, ce faisant, ont également cherché à assurer l'abondement de leurs budgets grâce aux bénéfices de la taxe professionnelle à laquelle les entreprises du secteur étaient soumises. En effet, le fruit de cette taxe était perçu par les communes ou le bloc communal, ainsi que par les départements et par les régions.

Notons au passage que favorisant le développement d'une source d'énergie respectueuse des principes du développement durable, ces collectivités ont également fait un choix qui se voulait raisonné. Comme l'a mis en évidence le supplément du week-end d'un grand quotidien national, le développement de l'énergie éolienne sur un territoire peut parfois être à l'origine d'une décote du foncier, du fait de nuisances qu'il sera nécessaire à l'avenir de prendre en compte pour en limiter l'impact autant que faire se peut. Théoriquement, il est prévu de compenser le manque à gagner lié à la disparition de la taxe professionnelle grâce à la mise en œuvre de la future cotisation économique territoriale et en attendant, d'une taxation spécifique, l'IFER (imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau).

Si le projet de loi de finances pour 2010 bénéficie d'une meilleure prise en considération de ce problème – grâce à l'adoption du sous-amendement n° I-97 rectifié -, il n'en reste pas moins que la compensation du manque à gagner occasionné par la disparition de la taxe professionnelle menace d'être tout à fait insuffisante et pénalisante pour les collectivités territoriales qui ont favorisé le développement de cette énergie renouvelable.

Aussi, il lui demande quelles sont les mesures compensatoires envisagées afin de ne pas pénaliser les territoires qui ont privilégié la production de l'énergie éolienne, et qui ce faisant ont mis en œuvre une politique cohérente avec ce qu'était l'esprit du Grenelle I.

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Transmise au Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi


Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation publiée le 03/02/2010

Réponse apportée en séance publique le 02/02/2010

M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur un sujet d'actualité : la disparition de la taxe professionnelle et l'impact négatif de cette mesure sur les entreprises du secteur de l'énergie verte.

Jusqu'à présent, les collectivités territoriales, plus particulièrement les communes, ont regardé avec bienveillance l'avènement des parcs éoliens, qui, tout en assurant la promotion d'une énergie peu polluante, ont abondé leur budget grâce à la taxe professionnelle perçue sur ces installations.

Relevons au passage que le recours à cette nouvelle énergie respectueuse des principes du développement durable ressort d'un choix raisonné des collectivités. Il faut saluer la volonté dont elles ont fait preuve, car ces décisions n'ont pas été si simples à prendre. En effet, l'implantation des parcs éoliens s'est traduite, pour ceux qui habitent à proximité, par une indiscutable nuisance visuelle, mais aussi, parfois, sonore. De ce fait, la valeur de leurs biens fonciers et immobiliers a subi une diminution non négligeable.

Pour assurer l'implantation et la promotion des éoliennes, les maires ont expliqué que la taxe professionnelle perçue sur ces parcs permettrait en contrepartie aux budgets communaux de financer des équipements publics de proximité, telles des écoles, des piscines, etc.

Au cours du débat relatif à la suppression de la taxe professionnelle, qui a récemment animé, voire agité notre hémicycle, le Gouvernement s'est formellement engagé à compenser le manque à gagner consécutif à cette mesure par la mise en œuvre de la future cotisation économique territoriale et, de manière transitoire, par l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, l'IFER.

Or, si le projet de loi de finances pour 2010 témoigne d'une relative prise en considération de ce problème, il reste que la compensation du manque à gagner causé par la disparition de la taxe professionnelle menace d'être insuffisante et même pénalisante pour les collectivités territoriales qui ont favorisé la promotion de cette énergie.

La compensation paraît assurée, au moins partiellement, pour l'année 2010. Mais les inquiétudes sont vives pour ce qui est des années suivantes. Je pense, par exemple, à la situation de certaines communes du département de la Haute-Garonne : Saint-Félix-Lauragais – six éoliennes –, Roumens – quatre éoliennes –, Montégut-Lauragais – une éolienne –, Avignonet-Lauragais – dix éoliennes. Je pense également au projet CoLaurSud, projet intercommunal destiné à accompagner l'installation de sept éoliennes.

Ma question, monsieur le secrétaire d'État, est donc très précise : quelles mesures compensatoires pérennes sont envisagées afin de ne pas pénaliser les territoires qui ont privilégié la production de l'énergie éolienne et qui, ce faisant, ont devancé l'appel aux grands principes invoqués lors du vote du Grenelle I ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le sénateur Mirassou, conformément à l'annonce du Président de la République du 5 février 2009, après un long débat, qui a effectivement été parfois agité, la loi de finances pour 2010 a supprimé la taxe professionnelle. C'est heureux, car cet impôt unique en Europe pesait spécifiquement sur l'outil de production. Il s'agissait donc pour nous de rétablir la compétitivité des entreprises françaises.

Je rappelle que, à la suite de cette suppression, a été instituée une contribution économique territoriale, ou CET, composée d'une cotisation foncière des entreprises, ou CFE, assise sur les valeurs locatives foncières, et d'une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, ou CVAE.

Cet allégement de la fiscalité des entreprises ne remet pas en cause la politique engagée en faveur du développement de l'éolien. Le Gouvernement a déjà eu l'occasion de souligner son attachement à un développement raisonné de l'éolien, de manière à prévenir les atteintes aux paysages, au patrimoine et à la qualité de vie des riverains.

La fiscalité applicable à ce secteur d'activité a été aménagée, dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, afin que les territoires ayant privilégié la production de l'énergie éolienne, tel celui que vous avez évoqué, ne soient pas pénalisés par la suppression de cet impôt.

Outre la CFE et la CVAE acquittées par les entreprises de ce secteur d'activité, la loi de finances pour 2010 a institué une imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, l'IFER, au profit des collectivités territoriales et des EPCI, notamment sur les installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie du vent. Le tarif annuel de cette imposition est fixé à 2,913 euros par kilowatt.

Schématiquement, ce produit est réparti à concurrence de 50 % au bloc communal et de 50 % au département.

Le dispositif prévu permet de maintenir un système de mutualisation de la ressource fiscale liée à l'éolien au sein d'un EPCI, comme cela était prévu dans le cadre de la taxe professionnelle.

En outre, la loi de finances pour 2010 a prévu la rédaction, avant le 1er juin 2010, d'un rapport qui devra notamment tirer les conséquences de la création de l'IFER sur les collectivités ainsi que sur l'équilibre des entreprises. Des ajustements seront opérés si cela s'avère nécessaire.

De manière plus large, la suppression de la taxe professionnelle se traduit avant tout par la définition d'un nouveau schéma de financement à compter de 2011.

Ce schéma a été établi en tenant compte du principe d'autonomie financière posé par la loi organique du 29 juillet 2004.

Pour 2010, ainsi que vous l'avez vous-même souligné, la perte de recettes liée à la suppression de la taxe professionnelle sera compensée.

À compter de 2011, le bloc communal bénéficiera d'impôts nouveaux : il se verra affecter la taxe sur les surfaces commerciales, la TASCOM, et concentrera l'essentiel du produit des impôts directs locaux, y compris la cotisation foncière des entreprises, avec un pouvoir de vote de taux ; il bénéficiera, en outre, d'une fraction de la CVAE et de l'IFER.

Les départements, quant à eux, percevront désormais la taxe foncière sur les propriétés bâties, une fraction des composantes de l'IFER ainsi qu'une fraction de la CVAE.

Enfin, les régions disposeront également de ressources nouvelles constituées de 25 % de la CVAE et de composantes de l'IFER afférentes au matériel roulant utilisé sur le réseau ferré national.

Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement a pris en compte l'essentiel des préoccupations, parfois très vives, exprimées par les représentants des collectivités. La compensation au titre de 2010 est assurée ; des compensations sont prévues pour 2011 et le rapport d'étape dont je vous ai parlé permettra de faire le point au milieu de l'année 2010 et, si nécessaire, d'opérer des ajustements.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.

M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez consacré près des trois quarts de votre réponse à nous expliquer ce que j'avais moi-même décrit dans mon intervention, c'est-à-dire ce qu'a été le passé et ce qui va se passer pour 2010.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. J'ai clarifié votre propos !

M. Jean-Jacques Mirassou. Or le problème, comme je l'ai souligné, se posera avec beaucoup d'acuité à partir de 2011.

Malgré toutes les explications que vous avez données, je ne peux que revenir sur la thématique générale qui a été développée ici et ailleurs à l'occasion de la suppression de la taxe professionnelle : par cette suppression, vous allez créer une rupture entre les entreprises – en l'occurrence celles qui exploitent des éoliennes – et les territoires sur lesquels elles seront implantées, en misant sur une compilation de mesures qui, en tout état de cause, n'ont pratiquement aucune chance de réussir à compenser ce qu'aurait été le montant de la taxe professionnelle.

Donc, en 2010, la compensation sera « peut-être » assurée, pour 2011, elle ne le sera « vraisemblablement pas » et, pour les années à venir, c'est encore pire !

Je serais tenté d'ajouter, monsieur le secrétaire d'État, pour conclure mon propos sur une note humoristique, que, sur ce sujet de l'éolien, vous nous avez livré une réponse très fractionnée et, pour le reste, un peu de vent… (Sourires.)

M. René-Pierre Signé. Il en faut pour faire tourner les éoliennes !

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